Chapitre 87: Position embarrassante

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La boîte paraissait large, vue de l'extérieur, mais cette impression s'estompait en y pénétrant. J'avisai l'intérieur d'un air hébété puis repliai mes genoux contre ma poitrine pour m'adapter à la taille exiguë de mon moyen de transport improvisé.
Qu'étais-je en train de faire?
Cette question passait et repassait inlassablement dans mon esprit sans que je ne sois en mesure d'y répondre. Car je pouvais ressasser autant que je le désirais, je ne quittais pas mon pays en reine mais en fugitive.

Le chariot roulait sans à-coups mais la boîte s'avérait située près des roues. Chaque bosse, aussi petite fût-elle, secouait tout mon corps, sans oublier le bruit de cliquetis émis par notre moyen de transport pour compléter mon lot de désagréments. A chaque fois, ma tête heurtait le haut de la boîte, je rebondissais sur les fesses et mes jambes cognaient méchamment contre le fond. Après plusieurs douloureux à-coups, je parvins tout de même à trouver une position un peu plus confortable.

(NDT : à l'attention de ceux qui n'auraient pas lu les épisodes 84-85 du webtoon : le chariot dans lequel voyagent Navier, Heinly et Ergy correspond aux « chariot[s] bâché[s] chariot[s] couvert[s] ou chariot[s] à bâche de la colonisation de l'Ouest américain » (wikipedia).)

« Reine, est-ce que ça va ? »

De temps à autre, Heinly me rassurait.

« Reine, nous allons franchir la frontière. »

Je serrai le poing et toquai contre la paroi, en guise de réponse. J'étais presque certaine que ma voix ressortait bizarrement à travers. La première fois qu'Heinly m'avait demandé : « Est-ce que ça va ? », je lui avais retourné un sarcastique 'Ça va.' Le duc Ergy avait alors éclaté de rire, me faisant rougir d'embarras et par là, prendre conscience de ma gêne.

Toutefois, le simple fait de toquer semblait le divertir. Je l'entendis rire à nouveau, suivi du ton sec d'Heinly qui lui ordonnait d'arrêter. Il n'obtempéra pas pour autant et je mordis ma lèvre inférieure.

« Quoi ? Tu souris aussi. La seule différence, c'est que tu ne fais pas de bruit. »

La réplique du duc Ergy sembla faire soudainement cesser leur conversation, mais je les imaginais se disputer en silence.

'Wouah'

Je soupirai et fermai étroitement les yeux.

J'aurais préféré m'endormir. Le temps serait passé plus vite, ainsi.

**

Je devinai que mon esprit était plus fatigué que je ne l'avais imaginé. Je me rappelais avoir fermé les yeux et songé à dormir. Quand le couvercle de la boîte s'ouvrit et qu'un bol d'air frais s'engouffra à l'intérieur, me faisant cligner avec confusion, je réalisai que j'avais dû m'assoupir. Penché au-dessus de moi, Heinly me dévisageait avec un émerveillement qui étirait ses lèvres jusqu'aux oreilles. Je lui retournai un sourire penaud.

« On dirait une scène tirée d'un mythe. La voir ouvrir les yeux et poser son regard sur moi m'a tant bouleversé... mon cœur battait à tout rompre.»

Je rougis à son compliment. Je lui en étais reconnaissante, bien sûr, mais il en faisait trop à mon goût. Passé un certain degré d'exagération, certains propos élogieux deviennent embarrassants à entendre. Aussi, je dépliai mes jambes et me redressai dans la gêne, en vacillant.

« Ah. Attention. »

Heinly me tendit la main, pour m'aider à me relever.

« Ce n'est pas bon de rester dans la même position trop longtemps et de vous lever si vite, Reine. »

Une fois debout, je défroissai ma robe plissée et lui souris en retour. Je pris la parole avant de recevoir plus de compliments embarrassants:

« Sommes-nous arrivés ?

Remarried EmpressWhere stories live. Discover now