𝙲𝚑𝚊𝚙𝚒𝚝𝚛𝚎 𝚟𝚒𝚗𝚐𝚝-𝚗𝚎𝚞𝚏

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Bonne lecture !

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Spencer tient jusqu'au soir.

À un moment dans la matinée, il s'est assis sur son canapé pour regarder le mur en face de lui, a ramené ses jambes contre son torse, et n'a plus bougé. Regarder, fixer, penser : essayer d'ignorer les fantômes, les voix, les cris à l'extérieur de son appartement. Le couple s'engueule, un bébé pleure, quelqu'un semble faire des travaux dans la rue.

Spencer reste là sans bouger, les yeux grands ouverts, et essaye de se concentrer sur sa mère, sur le souvenir de sa mère qui lui lit de la poésie. Française, anglaise, russe, des traductions ou les rimes originales. Elle lui parle de l'amour, de l'amour qu'on voit dans la littérature et qui semble toujours plus parfait en un sens, de l'amour respectueux qu'on voit et qu'on comprend.

Parfois, Spencer entend des gens dire « je l'ai lu dans ses yeux ». Au départ il pensait que c'était impossible de lire quoi que ce soit dans les yeux de quelqu'un. Puis il a changé d'avis, et s'est dit que finalement ça devait être possible.

Aaron Hotchner a dû le regarder des tas de fois. Spencer aurait pu lire quelque chose dans ses yeux. C'est impossible. Spencer ne comprend pas le sarcasme, ou les questions rhétoriques, ou l'humour, ou certains jeux de mots. Ce n'est jamais évident.

Il fait des efforts, mais les émotions ne sont pas basées sur des faits. Parfois il ne comprend pas que des gens se vexent quand il ouvre la bouche, et parfois il ne comprend pas lui-même la sensation étrange de sentir sa poitrine se serrer. Il apprend encore. Les sentiments, ce ne sont pas des statistiques facilement traitables : on ne peut pas confondre une addition avec une soustraction.

En revanche, on peut confondre de l'amour avec du désir et de la culpabilité.

Spencer Reid reprend conscience quand la nuit tombe. Il cligne des yeux, et ça fait mal : ils sont trop secs, trop gonflés, et finalement il a à peine le temps de bouger une jambe ankylosée qu'une larme coule le long de sa joue. Il n'aime pas ça, pas ça du tout, et tout à coup il se demande à quel point il a perdu le contrôle.

À quel point, et à quel moment.

— Spencer ?

Cette voix le fait se figer. Il se mord la lèvre, très fort, et inspire profondément avant de se retourner vers Riley. Le garçon a un air peiné sur le visage.

— Pas toi, souffle Spencer.

Il se relève, incertain. Sa main droite tremble, la pièce est plongée dans l'obscurité, la chaise face au plateau d'échec est pleine de poussière.

— Pas toi ! siffle-t-il plus fort.

Riley recule d'un pas.

— Spencer....

— Depuis toujours ? Depuis toujours ?

Spencer marche rageusement dans la pièce, mais s'arrête soudain en se rendant compte qu'il ne sait pas quoi faire. Il n'ose rien toucher, rien boire, rien manger. Tout son corps se rebelle à la simple idée de mettre quelque chose dans sa bouche, et de toute façon la peur lui coupe le souffle.

— Depuis le début, je croyais vraiment je.... je croyais tellement...

— Spencer je suis désolé. Ne pleure pas, je n'aime pas te...

— Bien sûr que non tu n'aimes pas, puisque tu n'es pas réel !

De rage, il attrape la chaise la plus proche et la renverse sur le sol. Les livres bien rangés de sa bibliothèque semblent le narguer, alors il en attrape un et le jette contre le mur.

La mort entre tes bras || Spencer ReidWhere stories live. Discover now