9-Rose Grenadine

567 74 709
                                    

— Lizzie, réveille-toi ! Bastien, si vous savez quoi que ce soit pour la ramener, c'est le moment de m'aider ! C'est votre monde !

Depuis qu'il le connaissait, Bastien n'avait jamais vu le vampire aussi paniqué, ni aussi expressif d'ailleurs. De lourdes larmes s'écrasèrent sur le parquet de la chambre puis sur la peau, à présent cadaverique, de son amie. Il ne la lâcha pas, la secoua par les épaules, écouta son pouls qui ralentissait de minute en minute puis essuya un reniflement. Lorsqu'une fée mourrait, son cœur bleu s'entachait jusqu'à  devenir cendre et partir, en même temps que son corps, dans  une vague traînée de poussière. Cela ne pouvait pas arriver à Lizzie. Jamais.

Une étrange tristesse monta aux yeux du chimiste. Il avouait s'être également attaché à la petite fée.

— Je... ne sais pas. Je vous le jure. On devrait appeler un hôpital. C'est un lieu pour guérir les huma...

Le bois du parquet se fissura, frappé par le rude poing de Tom.

— Je sais ce qu'est un hôpital ! Vous pensez vraiment que beaucoup  savent soigner des fées, ici ? rugit-t-il avec aigreur. C'est illogique, aucun vœu n'a jamais tué personne. Et puisqu'elle n'a rien avalé, ça doit forcément venir de l'air ou du sol de ce monde. Alors si elle est dans cet état, moi aussi, je le devrais. Pourquoi, je ne sens rien !? Lizzie, je ne te laisserai pas, je te le promets. Si tu sais comment te sortir de là, fais moi un signe. Je ferai n'importe quoi ! N'importe quoi pour te ramener !

Deux petites étincelles brillèrent entre ses mèches décolorées. Ses doigts de fée se raidirent pour aggripper fermement ceux du buveur de sang qui ne bougeait plus, accroché à ce miniscule espoir.

— Lizzie, souffla-t-il d'une voix faiblarde alors qu'elle ne s'échappait toujours pas des étroits filets de l'inconscience. Réveille-toi, bon sang !

À ces mots, Bastien se figea.
Du Sang, mais oui. Se précipitant sur le sac plein, il dénicha une poche rougeâtre, puis se tourna vers Tom afin de confirmer ses soupçons.

— Vous vous nourrissez de sang, pas vrai ?

— Du simili-sang, corrigea-t-il avec une moue de dégoût. Mais est-ce  vraiment le moment de refaire mon régime alimentaire ?

Il s'arrêta, comprenant en un regard où le chimiste voulait en venir. S'écartant de son amie, non sans une légère appréhension, il lui laissa quelques mots :

— Tu vas t'en sortir, tiens bon.
Bastien, donnez en lui autant qu'il lui faudra et ramenez la moi... S'il vous plaît.

Il se recula ensuite, sachant que s'il restait, l'odeur du sang l'obligerait à s'en abreuver. Il ignorait s'il serait alors capable de secourir sa fée.

Avant d'être tenté, Tom disparut donc de la pièce, accordant une confiance aveugle à celui qu'il rêvait d'abandonner, il y avait de cela quelques heures. Il croisa les doigts, pétrifié d'inquiétude tandis que l'opération sanglante, à coup de matériels médicaux de substitution, se tenait de l'autre côté du mur. Heureusement qu'il avait quitté la pièce.

***

Lizzie ouvrit les yeux, un goût métallique immonde en bouche qui lui donna rapidement la nausée, et le bras scotché à une espèce de machine de torture, tranchante et d'acier, d'où un tuyau translucide laissait couler jusqu'à ses veines un étrange liquide carmin.

— Si on m'avait dit que je pouvais m'improviser médecin pour Ombrumes aussi facilement, je n'aurais pas fait autant d'études. Enfin, facilement... j'ai du m'y reprendre plusieurs fois mais je crois que tu peux m'appeler preux chevalier Bastien.

Rose framboise (terminée) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant