- Je vais nettoyer !

Il sauta quasi littéralement de la chaise sur laquelle il était assis, une seconde auparavant, et fonça en direction de l'évier pour récupérer un torchon qui traînait. Les sourcils froncés, les épaules contractées, il semblait soucieux.

- Laisse, chéri, ce n'est pas à toi de faire ça...

Mais la contestation de Niall se perdit dans la pièce avant de parvenir aux oreilles d'Andreas qui, à genoux, épongea comme il le pouvait le jus d'orange qu'avait finalement renversé le blond.

Un échange de regard suffit aux deux adultes pour se concerter : il devait parler de son comportement au petit garçon. Il n'était pas normal qu'il cherche sans arrêt à passer derrière tout le monde, et à exterminer la moindre tâche comme s'il s'agissait d'un crime.

Zayn le prit donc d'autorité contre lui, l'installant sur ses genoux tandis que son mari s'installait à la même table, face à lui. L'atmosphère sérieuse qui s'installait insidieusement déclencha la chair de poule sur les bras d'Andreas. Il allait être grondé.

- Andy, petit ange... Tu sais, tu n'as à faire tout ça.

C'était Niall, étonnamment, qui avait commencé. Probablement parce que Zayn se sentait trop affecté, trop désarçonné face à cette situation. Et puis, le blond pouvait enfin se sentir utile.

- Pourquoi tu fais ça ?

L'homme le plus proche de lui avait besoin de comprendre. Mais Andreas n'avait pas de réponse, satisfaisante tout du moins, à leur apporter. Sauf qu'en ne disant rien, ce serait encore pire ? Et puis, il ne savait même pas ce qu'il risquait réellement, dans le fond...

- Mais si...

- Mais si ?

- S-si je le fais pas... Vous allez plus vouloir... vouloir de... que je reste.

C'était donc ça ? Il pensait avoir quelque chose à leur rendre, en échange de leur hospitalité. C'était ridicule. Qu'avait-ils pu faire ou dire pour qu'il songe à une chose pareille ?

- Qu'est-ce qui te fait penser ça ?

Niall était toujours si pragmatique. Pourtant, c'était souvent lui, qu'on prenait pour le sentimental. Les apparences étaient réellement trompeuses. Le brun, d'un tempérament plus fougueux, plus impulsif, était davantage soumis à ses émotions. Positives comme négatives.

- Ma-Maman...?

Il semblait si peu sûr de lui, si incertain d'être autorisé à fournir cette information, que son affirmation sonna davantage comme une question.

Toujours cette femme. Et Niall, qui prolongeait l'interrogatoire, argnieux comme un flic en mal d'un coupable... Non, il était injuste : son mari cherchait seulement à savoir, comme lui, de quoi il en retournait exactement. Pour pouvoir aider Andreas. Leur but premier.

- Ta maman ?

- Bah oui. Je...

L'enfant se stoppa brutalement, levant les yeux vers Zayn, comme s'il n'attendait que ce dernier ne le pousse à parler, à déverser cette eau usée de drames et de malheurs qui pesaient sur sa poitrine, stagnait dans ses poumons. Il dût lire ce qu'il souhaitait dans le regard de l'adulte, car il reprit.

- Je dois laver la vaisselle, et attendre que Maman rentre pour dormir, même si c'est très tard. Et si je ne le fais pas, comme je n'ai pas été sage, je vais au lit sans manger.

Il s'était exprimé avec un tel calme, et une telle aisance. Il ne semblait ne pas avoir besoin de réfléchir à la question, récitant une leçon sordide parfaitement apprise. Probablement inculquée à force de coups et de cris.

- Ca ne fonctionne pas comme ça, ici. Ce sont les adultes qui s'occupent de la propreté de la maison. Et tu auras toujours à manger à ta faim, chez nous, même si tu fais une bêtise. Tu comprends, chéri ? Maintenant, tu viens me faire un câlin ?

Le petit garçon hésita, et même si, l'espace d'un instant, il sembla prêt à capituler, il se renforgna et posa sa joue contre le torse de Zayn, en signe de refus. Le blond acquiesça simplement, compréhensif.

L'infirmier savait son mari plus fort que ça. Même si Andreas acceptait, avec une certaine réticence néanmoins, son contact, ils étaient encore loin d'un quelconque lien de confiance.

Il faudrait du temps pour qu'ils s'apprivoisent les uns les autres, mais si lui était convaincu d'une chose, c'est qu'ils y parviendraient. Qu'ils seraient, un jour, une véritable famille, aimante, pour Andreas.

- Je n'aurais pas dû le dire...

Le garçon marmonait contre lui, et Zayn l'enveloppa de ses bras forts pour le serrer contre lui. Il espérait qu'il se sentirait en sécurité, même un bref instant, dans ce cocon de chair et de chaleur.

- Si, justement. Tu ne dois jamais hésiter à nous raconter ce genre de choses : comment s'était, avant, et comment tu ne veux plus que ce soit. OK ?

L'enfant hocha seulement la tête, mais de sa place, Niall put constater son regard dans le vague, et les quelques larmes silencieuses qui entachaient son visage juvénile.

Il carrait les épaules, comme pour se faire plus petit, et se blottir l'air de rien contre l'infirmier, avant de se redresser dans un sursaut.

Ses yeux, arrondis, trahissaient la surprise de sa prise de conscience. Il se laissait aller, au figuré comme au propre, et c'était une mauvaise chose.

Se tenir droit, être serviable, ne pas contester, toujours faire ce que ses parents lui demandaient...

Est-ce que Niall et Zayn étaient ses parents, maintenant ? Était-ce à eux à qui ils devaient obéir au doigt et à l'œil, désormais ?

Il n'y comprenait plus rien. Et tout cela le frustrait. Comme le fait qu'ils ne l'aient pas réveillé avant cinq heures, ce matin.

Maman le réveillait pourtant toujours, si ce n'est volontairement, par le bouquan qu'elle faisait depuis la salle de bain, pourtant à l'autre bout de leur habitation.

Zayn et Niall, pour ainsi dire, agissaient à l'opposé d'elle. Et c'était suspect, selon le petit garçon. Très étrange, et anormal, inhabituel.

Est-ce qu'ils allaient cherché à le changer ? Lui demander pire encore ? Et si sa mère revenait, et ne le reconnaissait pas. Non, il ne pouvait pas se prêter à ce jeu.

Il sauta de la chaise et des genoux de Zayn, où il se trouvait, manifestant un premier regain d'énergie, et de volonté. Il était enfin déterminé. Déterminé à ne pas les laisser faire.

A ChanceWhere stories live. Discover now