Un Pari Audacieux

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Dehors, il faisait nuit noire. Depuis quelques heures, Londres avait sombré dans les ténèbres. Les fenêtres s'éteignaient une à une, à la manière des étoiles qui mourraient après avoir brillé si longtemps. Les seules touches lumineuses qui perçaient dans ce décor obscur étaient les lampadaires sur les trottoirs, les phares des voitures peu nombreuses qui roulaient encore, et, oh ! ici, rue de Baker Street, une dernière fenêtre éclairée !

John avait bien du mal à dormir, comme toujours. Pourtant ce n'était pas la fatigue qui manquait, ça, c'était certain. Il avait toute la journée crapahuté à droite à gauche avec son détective, à la poursuite d'un meurtrier empoisonneur. L'idiot avait décidé de mettre fin aux jours de la cantatrice la plus en vogue du pays. Seulement voilà, il n'avait pas prévu qu'elle serait bien protégée, et ne goûterait pas elle-même à tous les plats qu'on lui présenterait durant son voyage en Angleterre. Il avait alors par mégarde, tué un de ses gardes du corps avant de s'enfuir, le gredin. Sherlock n'avait pas mis longtemps avant de deviner qu'il s'agissait d'un membre de l'ancien groupe de musique de la demoiselle, jaloux qu'elle réussisse une carrière en solo, qui n'avait rien trouvé de plus original que de l'assassiner. Malheureusement pour lui, avec un enquêteur pareil aux trousses, il n'aurait pas pu aller bien loin.

Pour les remercier, la chanteuse renommée les avait invités ce soir là à venir assister à son concert. Évidemment, le détective avait accepté, lui qui était si friand de musique classique, et évidemment, John avait accepté de l'accompagner. Imaginez, près de 3h l'un à côté de l'autre, à pouvoir se tenir la main et se murmurer des mots doux à l'oreille tout en écoutant de la musique, que rêver de mieux !

Après avoir mangé ensemble chez Angelo, John était rentré épuisé et ils n'avaient pas pu continuer la soirée bien longtemps. Sherlock lui, avait promis qu'il le rejoindrait vite, qu'il avait besoin de se retrouver seul avant d'aller au lit. Mais cela faisait maintenant presque une heure que son partenaire d'enquête attendait sous la couette, sans personne à serrer contre lui. Et s'il s'était remis à consommer de la drogue et ne voulait pas inquiéter son amant ? Si c'était le cas, c'était raté, John s'inquiétait toujours quand il s'agissait de l'homme qu'il aimait. Il avait aidé Sherlock à se passer petit à petit de cette substance qui le tuait un peu plus chaque jour, et il avait tenu le choc, il était clean maintenant. Enfin, normalement...

John décida d'aller jeter un simple coup d'œil au salon, histoire d'être sûr que son enquêteur ne faisait pas de bêtises. Il se leva doucement, pour éviter de faire craquer le parquet, et à l'instant où il s'empara de la poignée, une douce mélodie arriva jusqu'à ses oreilles. C'était lent, mais pas ennuyeux. Les notes s'enchaînant les unes après les autres avaient quelque chose de chaleureux, de nostalgique même. C'était son violoniste, son musicien rien qu'à lui. Il n'y avait que Sherlock pour jouer si tard dans la nuit sans mettre en colère son colocataire, qui oubliait bien vite la raison de son énervement quand celui-ci rencontrait la beauté de sa musique.

Il s'assied finalement tout contre la porte, et resta là à l'écouter, ses yeux se fermant tout doucement, malgré son envie de rester maintenant éveillé. Sa tête glissait lentement, ne tenait plus sur ses épaules. La musique de son amant avait sur lui le même effet qu'une berceuse sur un bébé. Elle le calmait, le rassurait, et l'aidait à s'endormir. Ne manquait plus qu'un doudou à câliner, et ce serait parfait. Malheureusement, Sherlock n'était pas prêt de le rejoindre, concentré qu'il était sur son nouveau morceau.

John n'entendit pas la musique s'arrêter, ne sentit pas son corps s'affaiser sur le sol, et ne vit pas la porte de leur chambre s'ouvrir délicatement. Sherlock releva tendrement le visage de l'homme qu'il aimait entre ses mains, et déposa sur son nez un baiser tout léger, juste parce qu'il en avait envie (et préférais le réveiller plutôt que de le porter jusqu'à leur lit). Les yeux du plus petit papillonèrent en douceur, avant de croiser le regard de son amoureux. Ils se sourirent affectueusement, comme au premier jour, puis John enlaça ce si grand détective qu'il aimait plus que tout.

Un peu de musique ?Where stories live. Discover now