Déméter, Hadès et Perséphone

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De son côté, Déméter était rouge de colère. Sa fille avait disparu depuis plus d'une semaine et toujours aucune trace ou messages de celle-ci. Après avoir questionné tout les paysans mortels qui habitaient près du lieu de son enlèvement sans résultats, elle ne vit pas d'autre choix que de se rendre au seul endroit où elle aurait des réponses.

Et cela ne lui faisait vraiment pas plaisir.

Car cet endroit était aussi celui qu'elle détestait le plus au monde : l'Olympe.

Cet endroit fait d'artifices et de faux-semblants. Tout ce qui plaisait aux Dieux normalement mais aussi tout ce qui révulsait profondément Déméter. Cette dernière préférait de loin la compagnie des mortels mais surtout le calme de sa campagne.

Mais elle était bien décidé à mener l'enquête. Son frère Zeus savait tout, il lui dirait qui avait enlevé sa fille.

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Malheureusement une fois sur l'Olympe, elle se rendit compte que ce ne serait pas si simple. Elle avait croisé de nombreux dieux et déesses et aucun d'entre eux ne lui révéla ne serait-ce qu'une petite information quant à l'enlèvement de sa fille. Furieuse, elle ne savait comment réprimer les nombreuses émotions négatives qui se bousculaient en elle. Même Hestia qui savait l'importance de la famille n'avait rien voulu lui dire. Zeus quant à lui n'avait même pas daigné la recevoir.

En fixant la Terre, une larme coula sur sa joue. Comment les Dieux pouvaient-ils être aussi lâches ? Eux, ces gens qu'elle considérait comme sa famille.

Alors qu'elle s'apprêtait à retourner sur Terre, Athéna surgit devant elle. La déesse de la sagesse attrapa la larme qui coulait sur la joue de Déméter et lui révéla que c'est Zeus lui-même qui avait ordonné à tous de garder le silence face à Déméter. Athéna disparut la seconde qui suivit ses révélations, comme un mirage.

Déméter remercia silencieusement la déesse de la sagesse et comprit que si Zeus était celui qui faisait obstacle, Perséphone était sans doute en danger. Zeus ne protège pas n'importe qui. Et les autres Dieux doivent craindre soit Zeus soit l'auteur de ce sournois kidnapping.

Si son frère et ancien amant ne souhaitait rien lui dire, elle savait ce qu'il restait à faire.

Car Déméter n'était pas faible. Elle n'allait pas se faire marcher sur les pieds. Elle allait retrouver sa fille, son unique fille. Et ce, même si elle allait sacrifier quelques vies.

C'était décidé.

La grande Déméter qui faisait vivre les mortels faisait la grève du grain. Jusqu'à ce qu'on lui rende ce qui lui avait été volé, rien ne pousserait, ni plantes, ni arbres, ni fruits, ni céréales. Elle cessait d'assumer ses fonctions divines.

Zeus voulait jouer ? Elle allait le détruire.

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Les semaines passèrent. Puis les mois. La famine engendrée par Déméter avait causé bien des morts chez les mortels. Tout les Dieux de l'Olympe assistaient impuissants à ce spectacle macabre. Zeus était bien embêté. Les humains affaiblis mais surtout pauvres ne faisaient plus aucunes offrandes. Les autres Dieux s'en plaignait. Lui même était fort chagriné par ce problème de taille. Il savait qu'il se trouvait dans de beaux draps. D'un côté, il y avait son frère, puissant mais surtout important. Il ne voulait pas d'un conflit avec Hadès, ce serait pire que tout. Mais de l'autre il y avait Déméter et la famine qu'elle ne semblait pas vouloir stopper. Comment gérer cela ? Il n'en avait pas la moindre idée. Il avait eu tort de sous-estimer Déméter. Il ne la pensait pas aussi déterminée.

Zeus avait bien compris qu'il était face à un des plus gros conflit de l'Olympe. Car si il n'y a plus de mortels pour les aduler ou pour leur faire offrande, que restera t-il des Dieux de l'Olympe ? Un dieu qui n'est pas admiré ou craint, est-il encore un Dieu ? La peur de l'oubli, voilà ce dont Zeus avait peur.

Il savait déjà ce que pensait Athéna, sa fille, de toute cette histoire. C'est dans ce genre de moment qu'elle s'avérait essentielle. Elle avait la sagesse innée et savait apaiser les conflits. Néanmoins, elle était complétement opposée aux décisions de son père sur ce coup-là. En effet, si il y en a bien un qui se fiche complétement des offrandes des mortels c'est bien Hadès. Les vivants sont les cadets de ses soucis. Si tant est qu'il en est. Il est si impulsif qu'il n'a pas du réfléchir une seconde avant d'enlever la fille de Déméter. Il réagit comme un enfant capricieux. Athéna avait eu beau tenter de raisonner son père, Zeus ne voulait pas se mettre Hadès à dos.

La situation semblait sans issue.

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Un mois était passé. La situation sur Terre était catastrophique. Les sols étaient craquelés, les bêtes mourraient de faim, les granges des Hommes à sec. La famine avait engendré une atmosphère pesante, la mort était présente à chaque coin de rues. Même les plus riches ne semblaient plus protéger. Les implorations des Hommes pour Déméter n'ont rien pu faire. Déméter n'avait pas bronché. Pour échapper aux Dieux de l'Olympe, elle s'était déguisé en vieille femme et déambulait dans les villages sans but et profondément seule. Elle n'avait jamais autant souffert que ce long mois sans sa fille. Qu'il fut long. Elle avait beaucoup pleuré. Que fallait-il faire pour faire réagir les Dieux ?

Désespérée et à court d'idées, elle se refugia dans la ville d'Eleusis, elle se laissa tomber sous un olivier et ne put retenir ses larmes de couler, encore et encore. Le temps semblait s'arrêter quand la belle Déméter pleurait. Ce fut dans ce moment de tristesse profond qu'une troupe de jeunes filles passa devant elle. Toutes tentèrent de lui faire retrouver le sourire ou de savoir ce qui rendait cette vieille dame aussi triste. Une d'entre elle réussit à faire rire Déméter. Un rire franc qui rassura les jeunes femmes. Déméter remercia la jeune fille de l'avoir fait oublié l'espace d'un instant sa tristesse.

Cette même jeune fille lui proposa alors un marché. Elle demanda à Déméter de se rendre avec elle au palais du roi Céléos et de la reine Métanire. Quelle aubaine! Le couple royal cherchait une nourrice pour leurs deux fils.

L'apparence sage et vénérable de Déméter sous son costume de vieille femme avait décidé les jeunes filles à lui faire confiance. Déméter en fut sincèrement touché. Les mortels la surprendront toujours.

C'est ainsi que si Déméter avait perdu sa fille, elle avait en outre gagné deux fils adorables, Triptolème et Démophon. Bien qu'ils ne lui firent pas oublier l'absence de sa fille, ils lui avaient permis d'adoucir son chagrin et il arrivait même des instants où elle ne pensait plus du tout à sa fille bien-aimée.

Un jour ordinaire où elle s'amusait avec Démophon tandis que Triptolème dormait à poings fermés, une immense lumière pénétra la grande pièce du palais royal. Démophon se plaça devant Déméter comme pour la protéger d'un danger. Déméter sourit mais décala le jeune garçon derrière elle.

Elle fut extrêmement surprise de voir Hélios, le Dieu du Soleil. Hélios était un bon ami à elle, ils travaillaient main dans la main auprès des mortels. Hélios lui sourit bienveillamment.

-Ma chère Déméter, que j'ai eu du mal à te trouver. Très bon déguisement d'ailleurs! Mais si je suis ici c'est que je tenais à te faire part de toutes mes excuses. J'ai été bien long à venir te voir et crois-moi je m'en sens terriblement honteux.

-Viens-en aux faits Hélios, que veux tu me dire ? S'enquit Déméter pleine d'espoir.

-Je sais qui a enlevé la belle Perséphone, ta fille.

-Qui ? Hélios, qui a enlevé Perséphone ? S'exclama Déméter.

Un long silence suivit cette question. Démophon serra un peu plus fort la robe de sa nourrice. Déméter, quant à elle, serrait son poing et Hélios soupira, sachant qu'il s'apprêtait à lâcher une bombe.

-C'est Hadès, roi des Enfers, avoua Hélios d'une faible voix.

Les pensées de Déméter fusèrent et elle ne put cacher sa surprise. Elle ne s'attendait pas à cela. C'était donc pour ça que personne n'avait rien voulu lui dire. Aussitôt, elle pensa à sa pauvre Perséphone. Comment arrivait-elle à survivre dans cet endroit ? Et avec cet homme ?

-... Avec l'assentiment de Zeus, continua Hélios.

Ce fut la goutte de trop.

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