Chapitre 38.1

732 71 29
                                    

Un matin de janvier, Salvatore ne rentra pas de son jogging. Astrid, malgré le ressentiment qu'elle avait toujours envers lui, s'inquiéta et décida d'aller à San Gennaro pour voir si elle le trouvait. Le ciel était gris et il faisait frais : pourtant, elle le découvrit sur la plage. Allongé sur le dos, les mains sur le ventre, il s'était endormi.

Astrid s'approcha prudemment et s'accroupit à côté de lui. Elle devait faire quelque chose.

Du bout du doigt, elle traça dans le sable mouillé un cœur et ajouta un « je t'aime » en dessous. J'ai fait la même chose sur un dessin, il y a dix-huit ans. Il le verra en se réveillant.

Astrid se redressa, et regagna la Villa d'un pas léger. Il ne restait plus que nous à réunir.

***

La jeune femme reçut, quelques jours plus tard, une lettre. Elle l'ouvrit en se demandant ce que Simon Solovine avait bien pu trouver comme nouvelle persécution. Mais elle provenait de Malte. L'écriture était un peu tremblante, mais élégante, comme celle d'une personne âgée.

Un certain Charles Massaba voulait la rencontrer, et donnait une adresse dans un petit village au sud de l'île.

- Bon dieu, mais c'est la Maison des Morts ! s'écria Madeleine qui lisait par-dessus son épaule.

- La quoi ? répéta Astrid, interloquée.

- Tu te souviens de l'homme brun avec qui j'ai discuté en Écosse ?

- Oui. Il était plutôt beau.

- C'est Arnaud Saliba. On l'appelle le Fossoyeur. Il tient un établissement où vivent des gens qui veulent se faire passer pour mort. J'ai pensé m'y installer après ma... sortie de la P.I.H.S.

- Tu connais ce Charles Massaba ?

- Bah non, puisqu'il est mort, rit Madeleine.

Astrid alla en parler à Salvatore, qui fronça les sourcils.

- Je connais Charles Massaba. C'était un des partenaires de Bianca Manfredi.

- Tu veux dire un de ceux...du Pacte ?

- Oui, mais il est mort il y a vingt ans !

- Officiellement, précisa Madeleine.

- Mon dieu, mais il doit avoir près de cent ans !

- Je pars ce soir, annonça Astrid.

Un des signataires du Pacte de Manfredi voulait lui parler ! Elle se sentait étrangement stressée. C'était forcément un grand homme, qui avait vu Bianca Manfredi de ses propres yeux. Astrid jeta au hasard quelques affaires dans un sac, le cerveau en ébullition.

La Maison des Morts se trouvait un peu à l'écart d'un village couleur sable aux allures orientales. Quelques barques bleues flottaient doucement, attachées à un ponton. Astrid se recoiffa et rajusta sa chemise. Elle voulait paraître digne et sérieuse.

Arnaud Saliba en personne la fit entrer.

- Chambre vingt-six, dit-il en indiquant l'escalier.

Dans un grand fauteuil en rotin tourné vers la fenêtre, se trouvait un très vieil homme africain. Le temps avait blanchi ses prunelles et ses rares cheveux, mais quand il vit Astrid, Charles Massaba parût rajeunir de cinquante ans.

- Mon dieu, comme vous lui ressemblez ! lâcha-t-il en anglais, avec un accent sud-africain.

- Bonjour, monsieur Massaba. À qui est-ce que je ressemble ?

- À Bianca.

Il se leva avec difficulté et, très doucement, passa une main rugueuse sur la joue d'Astrid.

La Villa Gialla : Tome 1Where stories live. Discover now