La période "M": un amour à sens unique

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Je me rappellerai toujours le week-end scout du 3-4-5 novembre. C'est à partir de ce moment-là que j'entrai en plein cauchemar. J'étais parti en week-end avec les scouts à Tournai. Nous logions au même endroit que les guides, car nous ne savions pas nous rendre à notre lieu de camp à cause d'une grève de trains. Nous prîmes le car à Ottignies et les chefs avaient mis un film vraiment stupide, dont je ne me rappelle plus le nom.

Le week-end en lui-même se passa très bien et à vrai dire, je me suis bien amusé. À la veillée, que nous avions faite avec les guides, je me suis assis à côté d'une fille. C'était elle, la fille pour qui j'ai écrit tant de poèmes, la plus belle de toutes, la plus douce, la plus charmante, la plus chouette fille qui puisse exister. M., si tu savais comme ton sourire m'a hanté jour et nuit, je sentais ton parfum à chaque instant de ma vie. Si je devais la décrire, je ne ferais que me répéter, car elle ressemble beaucoup à Caroline. M. a la peau plus bronzée, mais elles ont vraiment beaucoup de points communs entre elles : un visage doux, et des yeux magnifiques qui ont fait fondre mon petit cœur si sensible à chaque fois qu'ils se posaient sur moi.

Nous ne nous sommes échangés que quelques mots pendant cette soirée, et déjà je me sentais devenir amoureux. Je me rappellerai toujours la première phrase qu'elle m'a dite : « T'aimes bien Marianne ? » Cette phrase restera gravée à jamais dans mon esprit. M. était dans la classe de Marianne, je la connaissais de vue, mais jamais auparavant je ne m'étais intéressé à elle. Au début, je pensais que ce n'était qu'un amour volage, qui s'effacerait en quelques jours, mais le surlendemain je compris que j'étais vraiment amoureux.

Le 6 novembre, le jour de mon anniversaire. Jour qui aurait dû être heureux, jour où j'ai commencé à être malheureux. C'était le jour de la rentrée des vacances de Toussaint, et presque toutes les Troisièmes partaient en journée écologique, au moulin de Chevalier, dans le cadre du cours de Sciences. J'étais assis dans le car, n'ayant personne à côté de moi et pris dans mes pensées, quand je sentis quelqu'un se poster devant moi. Je levai la tête. C'était M. Elle demanda si la place était prise et si elle pouvait s'asseoir, j'acceptai tout de suite.

Nous avons parlé beaucoup du week-end, on se parlait comme si on se connaissait depuis toujours. Moi qui ne suis pas quelqu'un de très loquace, j'avais toujours quelque chose à lui dire pendant que nous étions ensemble. Nous avons passé toute la journée à deux, et le soir, chez moi, je n'arrivai plus à arrêter de penser à elle. Je fus victime du coup de foudre, mais d'un coup de foudre non réciproque. C'était infernal, à chaque seconde, le mot M. résonnait dans ma tête, à chaque instant, je la voyais devant moi, à chaque moment, je pensais à elle. J'étais trop fou d'elle, je voulais lui dire combien elle était belle, que j'étais accro à elle.

Finalement, trois jours plus tard, je décidai de tout lui avouer par l'intermédiaire d'un poème, qui fut le premier d'une longue série. Je le lui envoyai directement, mais j'avais horriblement peur : Qu'allait-elle penser de moi ? Le poème qu'elle reçut était sans signature, j'avais volontairement oublié de le signer. Mais le lendemain, en croisant M. dans les couloirs, elle me dit : « Merci pour ta lettre. » Comme le ton de sa voix était un peu spécial, je rédigeai le soir même un démenti, disant que ce n'était pas moi qui avais écrit cette lettre (eh oui je suis un peu couillon), mais un de mes copains. Pourquoi ? Je ne la connaissais pas du tout, je ne savais rien d'elle à part son nom et qu'elle était belle, et j'avais peur de sa réaction. Pour finir, cette histoire tomba à l'eau pendant quelques mois, mais mon amour, lui, restait toujours là, mais j'avais de moins en moins d'espoir de sortir avec elle. Or, un vendredi soir de décembre, je dus rentrer d'urgence à l'hôpital.

Le dimanche, il y avait réunion scoute. Mon père, en tant que chef d'unité devait aussi s'y rendre, mais comme moi j'étais sur mon lit d'hôpital, il ne put lui non plus y être. Un chef, je ne sais toujours pas qui, annonça à l'assemblée de la messe que j'étais rentré d'urgence en clinique et que pour cette raison mon père ne pouvait pas venir. Et le mercredi qui suivit mon hospitalisation, je reçus une carte de bon rétablissement à la maison, signée de M. Mon espoir se revigora d'énergie, mais ça ne servit à rien. J'étais malheureux, je voulais tant qu'elle m'aime. Mais ces petites souffrances n'étaient en rien comparables à celles que j'allais vivre au fil des mois suivants.

En ces temps-là, j'avais encore tous mes esprits, je savais encore discerner le bien du mal, je savais tout ce que je faisais, je savais les conséquences de mes actes. Je commençais à fumer de plus en plus, c'est à cette période que j'ai commencé à rouler mes cigarettes. Je ne savais plus m'en passer : j'en avais besoin pour combattre mon stress, qui commençait à s'accroître. Mais mon obsession restait toujours aussi forte, j'aimais trop M., je la désirais plus que tout. Je voulais me dévouer à elle corps et âme. C'était mon dernier but dans la vie.

Je ne trouvais plus de réconfort que dans la musique, certains textes exprimant bien ma mélancolie. Je n'avais aucune inspiration pour écrire, je restais des heures assis à essayer de sortir quelque chose, mais soit c'était mauvais, soit ma feuille restait blanche. Mon cousin passa le nouvel an chez moi et je lui ai raconté toutes mes mésaventures. Il essaya de me rassurer en me disant qu'on sortirait bientôt ensemble. À l'heure où j'écris ces lignes, plus d'un an et demi après, j'attends toujours. Je l'attends toujours, M. aux beaux cheveux noirs. Je l'attends toujours, M. au doux sourire. Je l'attends toujours, M. aux merveilleux yeux bruns. Je l'attends toujours.

Salut, moi c'est Greg [édité chez Atramenta]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant