Yerine (Mélusine HS.1)

By dredre_iga

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- Cette histoire est un hors-série de la trilogie « Melusine ». Il est grandement conseillé d'avoir lu la tri... More

Prologue.
Chapitre 1.
Chapitre 2.
Chapitre 3.
Chapitre 4.
Chapitre 5
Chapitre 6.
Chapitre 8.
Chapitre 9.
Chapitre 10.
Chapitre 11.
Chapitre 12.
Chapitre 13.
Chapitre 14.
Chapitre 15.
Chapitre 16.
Chapitre 17.
Chapitre 18.
Chapitre 19.
Chapitre 20.
Chapitre 21.
Chapitre 22.
Chapitre 23.
Chapitre 24.
Chapitre 25.
Chapitre 26
Chapitre 27.
Chapitre 28.
Chapitre 29.
Chapitre 30.
Epilogue.
Mot de la Fin.
Bonus.

Chapitre 7.

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By dredre_iga

Je flâne dans l'immense manoir, jouant nonchalamment avec le pendentif autour de mon cou. Faire rouler l'espèce de rubis entre mes doigts m'apaise d'une certaine manière. Je me suis perdue jusqu'à trouver un escalier. Ma curiosité m'a poussée à l'emprunter. En chemin, j'ai croisé certaines femmes dont la beauté ne cessait de rivaliser. Toutes m'ont lancé des regards intrigués mais malgré le danger que dégageait leurs auras, aucune ne s'est réellement approchée de moi. À ma grande surprise. Au moins, je ne servirai pas de dessert à ces sirènes.

Poussée par mon instinct, je me dirige vers une petite pièce. J'y trouve Orphée assis par terre dans une chambre, un air si triste sur le visage que mon cœur s'en brise. Je suis là, ne t'en fais pas... Avec douceur, je m'approche de lui et m'assoit à ses côtés. Mon regard se pose sur ce qu'il tient dans ses mains. Une belle lyre, paraissant être faite de nacre et dont les cordes semblent être des fils d'or. Je lève mes yeux vers le héro dont les prunelles émeraude se sont fixées sur ma personne. Si cela ne me paraissait pas improbable, je pourrais croire qu'une larme y brille. Sans que je n'aie à poser ma question, il entreprend de m'expliquer d'une voix si basse qu'elle semble venir d'un autre temps :

« C'est ma lyre... Lorsque je suis venue m'occuper de toi, je l'ai confiée à Bel, qu'il la garde en sécurité. Il l'a ensuite envoyé à Mel. Je ne m'en étais pas séparé depuis... depuis qu'Apollon m'en a fait don. Bien avant que ce même dieu me tue dans une autre ligne de temps.

- Pourquoi t'en être séparé ? j'interroge, tentant de me focaliser sur les seules choses que je parviens à comprendre, abandonnant cette histoire de ligne de temps.

Mon ami avait tenté de m'expliquer plus en détail les récentes aventures de Mélusine mais je n'en avais pas compris un traître mot. Ses explications avaient rencontré un plus grand succès lorsqu'il avait s'agit de définir ce qu'étaient réellement les nymphes. J'avais ainsi appris que mes « semblables » se cachaient depuis des siècles et qu'il était d'une extrême rareté d'en croiser une. Créatures de la nature, elles pouvaient être affiliées à un élément particulier : les plantes, les eaux, la mer, les montagnes, le vent... et pléthore d'autres choses. Si elles pouvaient paraître fragiles au premier abord, Orphée m'a mise en garde : mes supposés pouvoirs sont d'autant plus puissants que je tirerais cette puissance de la nature elle-même. Mais en attendant, rien ne s'est montré jusque-là et je doute sincèrement d'être dotée de la moindre capacité.

- Je ne pouvais pas et prendre soin de toi tout en gardant un œil sur cet objet mythique.

- Je suis une grande fille, j'ai vingt ans Orphée. Je n'ai plus besoin que tu me chaperonnes comme lorsque j'avais seize ans. Tu aurais pu la récupérer depuis deux années déjà.

Il hausse des épaules. Son regard me fend réellement la poitrine. C'est comme si retrouver cet instrument, réellement célèbre dans la mythologie, revenait à retrouver une part de lui-même. Une part qu'il aimerait, qu'il souffrirait.

- Tu me joues quelque chose ?

Je ne sais pas ce qu'il m'a pris. Les mots m'ont échappé. Mais Orphée me sourit avec tendresse et s'exécute. Aussitôt, les premières notes d'une douce mélopée s'envolent de son instrument que ses doigts effleurent.

- Ce soir, Nix est tombée,
D'un coup fatal à sa beauté,
La lune s'est levée.

Sous ses pales rayons,
En reine, tu t'es avancée,
Guidée par ma chanson.

La douceur du chant m'emporte, les paroles m'envoûtent et j'ai l'impression d'être enfin en paix. Je crois qu'à cet instant, mon amour grandit jusqu'à m'en étouffer, tout comme ma fascination. La voix d'Orphée caresse mon âme et j'ai l'impression que celle-ci est enfin complète. Quelque chose dans ce chant m'est familier.

Toi nymphe que rien n'afflige,
Toi que la nature érige
En une déesse plus belle encore
Que celles qui ne craignent la mort.

Dryade au cœur pur,
Sauras-tu m'aimer ?
Seras-tu mon f...

Soudain une silhouette fait son apparition à nos côtés, brisant l'enchantement et interrompant le chanteur. Longiligne, sublime, Mélusine, les poings sur les hanches nous toise, un rictus amer sur les lèvres. Son regard meurtrier se pose sur le héro tandis qu'elle siffle :

- Debout !

Je me fige face à la violence que contient cet ordre. Orphée obtempère, ne pouvant désobéir à l'étrange influence magique qu'exerce ses paroles, mais ses muscles se crispent tandis qu'il surplombe à présent d'une tête la sirène. Sa voix n'est qu'un grognement lorsqu'il s'insurge :

- Qu'est-ce qui te prend ?

- C'est à toi qu'il faudrait poser la question ! À quoi est-ce que tu joues ?

- Mais de quoi parles-tu ?

La sublime brune me désigne d'un geste du menton alors que je me relève avec méfiance. Mon instinct me hurle que tout s'apprête à dégénérer et que rien ne peut plus arrêter le court des choses.

- J'ai tout compris Orphée. Je suis entrée dans ta tête tellement de fois que je n'avais même pas fait attention à la ressemblance. Mais je m'en suis rendue compte à force de ruminer toute cette histoire dans ma tête !

- De quoi est-ce qu'elle parle ? m'enquièré-je.

- Tu devrais arrêter de nous mentir, que ce soit à moi ou à ta petite protégée. Ça finira par se retourner contre toi.

Orphée me fixe. La peine sur son visage se change peu à peu en colère. Considérant qu'il reste mutique, la sirène pousse un soupir d'exaspération et crache :

- Puisque tu t'obstines à ne rien dire...

- Mel...

La menace sous-jacente dans sa voix est perceptible et me fait frémir. Seulement, cette fois-ci, cela n'arrête pas Mélusine. Se tournant vers moi, elle lâche :

- Tu es la réincarnation d'Eurydice.

Je fronce des sourcils. À en croire son rictus cela me semble être une chose bien grave et je sens que ma réaction devrait être bien plus forte que celle que j'ai. Seulement je n'en comprends pas le sens.

- La quoi ?

Face à mon air perplexe, elle s'explique :

- Cela signifie, jolie petite nymphe, que ton âme si joliment chérie a vécue pour la première fois il y a trois millénaires et qu'aujourd'hui, elle a fait sa réapparition sous la forme de... toi. Tu es la réincarnation d'Eurydice ce qui fait que... tu es Eurydice elle-même.

À l'entente de ce nom, l'atmosphère se refroidit drastiquement et Orphée semble habité par une rage soudaine. Furieux, il se jette sur la sirène qui l'esquive habilement se déportant sur la droite.

- Et bien Orphée chéri, qu'y-a-t-il ? Tu aurais préféré que tout cela reste secret ?

Avec un grognement qui me terrifie, il s'avance vers elle, ses yeux lançant des éclairs. L'aura de dangerosité qui émane de lui me coupe le souffle et je recule d'un pas. Mais Mélusine ne s'arrête pas là. Sans aucune considération pour la colère de celui qui est pourtant son ami ou pour ma peur face à la tension violente qu'ils dégagent, alors que tout s'apprête à dégénérer, elle renchérit :

- Ne nie rien, petit héro. Jamais tu ne m'attaquerais de la sorte si je n'avais pas touché une corde sensible.

Le rire moqueur de la sublime brune me tord le cœur. Elle cherche à le blesser, elle cherche à le mettre en hors de lui. La situation l'amuse. Lorsqu'il la repousse avec tant de violence qu'elle se retrouve plaquée contre un des murs de la chambre qui en vient à se fissurer sous la force de l'impact, Orphée n'est plus que rage. Mon cœur bat à s'en rompre dans ma poitrine tandis que je suis tétanisée. J'ai l'impression d'être impuissante, de ne rien pouvoir faire. Malgré la grimace qui déforme ses magnifiques traits, Mélusine persiffle :

- Voilà qu'on commence à s'amuser.

- Il n'y a que toi qui t'amuse Mel. Arrête tes conneries sur le champ !

Elle penche la tête sur le côté tandis que je me mords la langue pour éviter de lui hurler dessus. Écoute le bon sang, arrête de le provoquer ! Mais elle se contente de sourire d'une étrange manière. Avant que quiconque ne puisse agir, elle se retrouve brusquement face au héro et lui décoche un tel coup de poing dans le ventre que celui-ci se plie de douleur. Il se redresse, le visage défiguré par la douleur et s'apprête à répliquer sur le coup. Brusquement il se fige, son regard posé sur son bras, son expression se peignant d'horreur. En observant la sirène de qui émane la puissance, je comprends. Elle m'a dit posséder le pouvoir de contrôler les esprits. Nul besoin d'être un expert pour comprendre que mon ami est victime d'une illusion. Que peut-il voir ? La mâchoire serrée celui-ci grogne :

- Mélusine arrête ça tout de suite.

- Sinon quoi ?

- Vous pourriez peut-être vous expliquer calmement et pacifiquement ? je m'interpose, hésitante.

- Navrée de briser ta petite bulle Yerine, mais la paix n'existe pas dans ce monde. Tu vas devoir l'apprendre.

La haine dans le regard du héro semble l'embraser. S'arrachant à l'illusion, il se jette sur la jeune femme. Les coups s'enchaînent alors trop vite pour que je comprenne quoique ce soit. En fait, je ne comprends pas ce déferlement de violence. Mon corps commence à me brûler, des fourmillements parcourent mon bras. L'air se raréfie, je peine à respirer et ma vision se rétrécie. Mon front commence à me picoter. Rien de désagréable, si bien que je finis par me laisser porter par cet étrange vague qui s'empare de moi. Je veux qu'ils arrêtent. Brutalement, celle-ci explose et je hurle :

- Arrêtez de vous battre !

Un souffle puissant balaye la pièce et les deux combattants sont projetés contre les murs. Le regard transperçant de la sirène se pose sur mon front alors qu'elle se redresse et elle blêmit.

- Merde... Ta copine est loin d'être une simple nymphe... jure-t-elle, reculant de quelques pas, ses yeux exorbités.

Orphée aussi m'observe, figé. Le calme semble l'avoir regagné. Ce qui n'est pas mon cas. En deux pas, je m'approche de lui pour le toiser. J'en profite pour siffler, tant aveuglée par mon agacement que je ne fais pas attention à mon geste précédent :

- Orphée, explique-toi s'il te plait... Je ne comprends rien. Ni ce qu'implique cette réincarnation, ni ta soudaine fureur. Ça fait peur. Et puis cessez de me regarder comme si un troisième œil venait de me pousser sur le front.

- C'est tout comme... s'étrangle mon ancien colocataire.

Fronçant des sourcils je me tourne vers la fenêtre. Mon reflet me renvoie l'image de mon visage baigné d'incompréhension. Mais il me renvoie surtout cet étrange symbole indéchiffrable qui scintille doucement au-dessus de mes deux yeux. Stupéfaite, je n'entends que difficilement la voix du blond m'expliquer :

- Eurydice était mon grand amour. La femme que j'aimais le plus au monde. Et elle est morte. Son âme s'est retrouvée en Enfer dans les Champs Elysées. Mais il y a plus de vingt ans, la secte a voulu la récupérer pour une obscure raison. Alors ils l'ont ramené sur terre et elle s'est réincarnée en un bébé. Toi, Yerine. Bellérophon est intervenu à temps et t'a mise en lieu sûr. Ce n'est qu'à la mort de tes parents adoptifs qu'il m'a mis au courent. Il pensait que je saurais mieux te protéger. J'ai échoué lors de la première ligne de temps. La secte t'a retrouvée et tu es morte. Puis les dieux m'ont tué. Lorsque Mélusine a remonté le temps pour me sauver, elle m'a redonné une chance de te retrouver et j'ai réussi à te protéger cette fois-ci.

- Je ne suis pas sûre d'avoir tout compris...

Ou plutôt, j'en ai peur. Peur d'avoir réellement saisit l'ampleur de la situation. Peur de réaliser que les choses sont bien plus graves que je ne le pensais. Je baisse les yeux, soudain prise de fascination pour le tapis à mes pieds. Orphée fait un pas dans ma direction avant de soupirer :

- Je sais, c'est une histoire de fou... Riri regarde-moi s'il te plait.

J'obéis à sa supplication et reste foudroyée par l'intensité de son regard. Tout mon corps est paralysé, la moindre de mes terminaisons nerveuses électrisée par un sentiment qui me poignarde la poitrine. Cela fait mal mais c'est doux, c'est puissant et surtout c'est enivrant. Je pourrais me perdre dans le vert de ses yeux. Puis il lâche les quelques mots qui finissent de briser pour de bon mon cœur :

- Je suis désolé. Pour tout.

Moi aussi... Je suis désolée d'exister, de causer tant de soucis... Mes parents sont morts par ma faute et je suis le fruit d'une incantation prononcée par des cinglés. Et mes yeux restent désespérément secs alors que je meurs d'envie de pleurer.

Soudain, la voix rauque de Mélusine vient rompre le silence terrible qui s'était imposé. Nous en avions oublié sa présence tant elle est restée muette.

- Tu es plus, bien plus qu'une simple nymphe ou qu'une réincarnation.

Je me tourne vers elle. Son regard me transperce. Il ne contient pas la moindre trace de haine. Juste de l'inquiétude. Pour moi.

- Que suis-je ?

Mon instinct me hurle qu'elle le sait. Pourtant, elle secoue la tête, sa chevelure sombre suivant le mouvement. Son regard est si sombre que l'océan de ses yeux semble agités par une tempête qui menace de m'emporter...

- Je ne peux pas te le dire.

- Comment ça vous ne pouvez pas ? Mais je dois savoir !

- Alors il te faut mourir.

- Hors de question ! rugit Orphée qui percute plus rapidement le danger qui me guète soudain après le ton sans appel de la sirène.

- Elle n'a pas le choix. J'ai beau tourner et retourner la question dans ma tête, je ne trouve aucune autre solution.

Une détermination sans faille a remplacé la stupéfaction sur son visage. Le héro le comprend en même temps que moi, tandis qu'une nouvelle peur me gagne.

- Mel... Tu ne peux pas !

- Si... Il le faut.

La lueur meurtrière dans son regard me terrorise. Alors qu'elle fait un pas dans ma direction, mon ami se dresse en travers de son chemin. Elle le projette sur le côté et avant que je ne puisse réagir, elle se retrouve face à moi. Nos regards se croisent un instant. Je ne peux rien face à elle...

- Désolée Yerine... »

La douleur qui me foudroie par la suite est telle que mes jambes cèdent tandis qu'elle retire la dague d'argent qu'elle venait de planter dans mon cœur. Son visage se marque par la souffrance tandis que je m'effondre au sol. Mon souffle se coupe, le froid me gagne et la douleur s'amplifie jusqu'à qu'elle ne soit plus que la seule chose qui reste. Juste avant de sombrer pour de bon dans les ténèbres, j'ai le temps de voir Orphée se jeter sur Mélusine, empli de rage alors que celle-ci s'écroule. Un éclair bleu s'interpose entre eux tandis que la souffrance atteint son paroxysme.

Puis le noir, le froid, la mort.

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