Adossé contre le mur aux pieds des escaliers, bras croisés, mon petit frère les descends rapidement tandis que ma mère ouvre la porte et rentre dans la maison.
« Maman !! » crit Elliot en sautant dans les bras de celle-ci.
Ma mère le dépose au sol après un gros câlin puis pose son sac et ses clés sur la petite table devant l'entrée. Elle s'avance jusqu'à moi et dépose un baiser sur mon front.
« Alors cette journée ? me demande-t-elle.
– Tu savais que papa te trompait ? » lançé-je du tac-au-tac.
Elle me fixe, surprise par ma question sèche avant de froncer les sourcils.
« Quoi ?
– Ah oui ! Évidemment il ne t'en avait pas parlé. »
Je m'avance dans le salon, ma mère sur les talons.
« D'où tu sors un truc pareil ?
– Demande-lui », fais-je en montrant mon père du doigt qui sifflote dans la cuisine.
Ma mère fronce de nouveau les sourcils.
« C'est pas drôle Nathaniel, là je rigole pas.
– Est-ce que j'ai vraiment l'air de rigoler là ? »
Alors que ma mère croise les bras devant elle, mon père arrive dans le salon, un plat dans la main.
« Le repas est prêt. À table. »
Ma mère s'avance vers la table et s'assoit sur sa chaise tandis que je reste figé comme un piquet.
« Comment tu fais pour rester zen après ce que tu nous a fait ? » m'adressé-je à mon père.
Lentement, il tourne la tête vers moi.
« Je pense pas que ça soit le moment d'en parler, réplique-t-il.
– Au contraire, je pense que c'est le moment parfait pour en parler.
– Vous pouvez m'expliquer ce qu'il vous prends tous les deux ? Interrompt ma mère.
– Vas-y, dis-lui. »
Mon père se tourne vers son assiette avant de se servir un morceau de steak haché. Il le coupe et avale un morceau, m'ignorant complètement.
« Maman, je t'ai dis la vérité. Et le pire c'est qu'il te trompe pas avec n'importe qui. Non ! Il te trompe avec la voisine. La mère de la fille dont j'étais amoureux et avec laquelle je suis sorti. Et derniere nouvelle. Il vont s'installer ensemble. En gros, prépare toi à ce qu'il te quitte. »
Je m'apprête à partir de la pièce mais je reviens finalement sur mes pas.
« Je suis désolé maman, mais si je te le disais pas, jamais il l'aurai dit. C'est un lâche. Et je le déteste. »
Ça m'est complètement égal qu'il est tout entendu. Il voit la vérité en face et jamais, ô grand jamais, je ne lui pardonnerai.
* * * * * * * *
Mes parents ont divorcé peu de temps après la grande révélation, il y a environ trois semaines et actuellement j'habite avec ma mère et mon frère dans un petit appartement en ville. C'est petit mais suffisant.
Notre vie n'est plus la même. Ma mère est partie dans une phase de dépression. Elle ne travaille plus. Elle reste affalée dans le canapé toute la journée soit à regarder la television, soit à dormir. Puis le soir, elle sort. Elle sort dans des bars pour picoler encore et encore en esperant se noyer dans son chagrin.
Ma père, lui, a emménager recemment avec sa nouvelle compagne. Et il se porte au mieux de sa forme.
Mais clairement, je m'en fou.
Lors du divorce, mes parents ont opté pour une garde alternée. Cependant, je ne vais jamais chez lui. Tout simplement parce que je veux pas y aller. Puis je suis majeur donc j'ai choisi de pas y aller.
Dans la famille d'Emmy, ses parents ont également divorcés. Elle s'était réfugiée chez Lola mais celle-ci a dû quitter la Californie à cause de son père qui a reçu une offre pour son travail. C'était inconcevable pour lui de refuser une telle offre qui pourrait qu'améliorer son parcours professionnel, alors lui et Lola sont parti dans un quartier de New-York.
C'était une nouvelle épreuve pour Emmy qui, en plus de voir sa famille se déchirer, voyait perdre sa meilleure amie de toujours. Elle a dû finalement se résoudre à revenir habiter chez sa mère. Puis, déménager dans une nouvelle demeure où mon père réside également.
Je sais pas comment se passe sa vie maintenant. Depuis ce fameux repas au restaurant je ne lui ai pas reparlé. Je la croisais quelque fois quand j'étais toujours son voisin, ou alors dans la cours du lycée mais c'était tout.
Bref, aucune nouvelle d'elle depuis plusieurs semaines. Déjà que nos relations étaient compliquées avant, maintenant c'est pire à cause de nos parents.
* *
Alors que je finis de faire mon problème de maths, le cri strident de la sonnette résonne dans tout l'appartement. Mon frère traverse précipitamment le couloir qui reli toute les pièces pour ouvrir la porte d'entrée.
Je regarde le réveil qui affiche 22h38 en me demandant qui peut bien venir sonner à la porte à une heure aussi tardive.
Curieux de le savoir, je quitte ma chambre, tenant mon crayon à papier dans les mains sans m'en appercevoir, et me dirige vers mon frère.
En arrivant, je constate que les nouveaux arrivants sont pas n'importe qui : la police. Alors que je leur demande la raison de leur venue, un troisième policier apparait aux côtés de ses collègues.
« Bonsoir, dit le premier. Vous êtes bien les enfants de Nathalie Taylor ?
– Euh, oui.
– Nous sommes dans le regret de vous annoncer que votre mère a eu un accident et qu'elle n'a pas résister au choc. Je suis désolé », finit-il par dire sous le regard peiné de ses deux associés.
Sous le choc, je laisse tomber mon crayon qui séjournait toujours dans ma main, laissant mon visage sans émotions comme réponse.
« J'ai pas compris » répond soudainement Elliot, brisant le silence.
Les trois policiers se regardent, puis la femme s'avance vers mon frère et se mets à genoux devant lui. Cherchant ses mots, elle fixe Elliot pendant quelques petites secondes avant de lui répondre que sa maman est partie dans le ciel et qu'elle ne pourra jamais revenir le voir.
Pendant que la policière explique à mon frère pourquoi sa mère ne peut pas revenir, un des homme vient s'adresser à moi.
« Vous viviez seul avec votre mere ici ?
– Oui, répondé-je la voix tremblante. Pourquoi ?
– Est-ce que vous avez de la famille présente dans le secteur ?
– Oui, mon père.
– Est-ce que je pourrai avoir son numéro ? »
Étant bouleversé par les derniers événements, je ne cherche pas midi à quatorze heures et pars dans ma chambre pour attraper mon téléphone posé sur mon bureau avant de retourner le donner au policier. Après l'avoir pris, il appelle mon père en s'écartant plus loin dans le couloir de l'étage.
Une demie-heure après, mon père débarque dans l'appartement complètement désorienté. Dès qu'il rentre dans le salon, il regarde rapidement la pièce puis quand il pose les yeux sur mon frère et moi, il s'avance immédiatement vers nous. Il nous enlace en nous demandant comment on va puis essaie de nous rassurer du mieux qu'il peut. Un policier vient finalement interrompre mon père pour lui parler seul à seul.
Quand ils reviennent vers nous, mon père me fait comprendre que mon frère et moi allons le suivre jusqu'à chez lui puisque maintenant, il est notre seul famille, le seul parent qu'il nous reste. Et nous le suivons parce que je n'ai pas la force de résister à mon père, même après tout ce qu'il nous a fait subir.
___________________________________