Cela fait maintenant trois mois que j'ai déménagé à Los Angeles et deux mois que je suis dans mon nouveau lycée.
J'ai l'impression d'avoir un peu abandonné mes amis dans mon ancien chez moi. Mais on s'appelle régulièrement pour avoir des nouvelles. Ils me manquent énormément.
J'habite à quelques rues de la mer, l'endroit parfait. Mes parents ayant beaucoup d'argent, nous vivons dans une grande et belle maison. Elle a des faux airs de villa.
Je suis en terminale. Terminale scientifique précisément. La dernière ligne droite avant le bac.
Je suis actuellement en espagnol. Il reste cinq minutes et bon sang qu'est-ce qu'elles sont longues ces minutes ! La sonnerie retentit enfin. Je rassemble mes affaires, enfile mon manteau et me précipite vers la sortie. Je dois retrouver Lola, ma meilleure amie, pour le cours d'allemand. Les élèves de toute les classes de terminale ont été regroupé en une seule. Ce qui fait un total de treize élèves. Quatre élèves sont partis depuis la rentrée. Ils trouvaient cette langue compliquée et puis c'est une matière de plus dans l'année. Trois heures de plus dans la semaine. Des treize élèves nous sommes seulement six à être resté depuis deux ans. Et oui ! C'est ma troisième année d'allemand et j'en suis pas du tout mécontente.
Lors de mes vœux en fin d'année de troisième, je me suis sentie obligé d'essayer quelques cours d'allemand. Pour ma tante. Elle était originaire d'Allemagne. Elle ne parlait pas un mot français. On communiquait que par internet seulement. On utilisait l'anglais pour se comprendre. Je savais qu'elle avait beaucoup de mal alors j'ai décidé d'apprendre cette langue pour elle. Mais voilà maintenant deux ans et demi qu'elle est morte. À cause de ce fichu cancer. Cette maladie est juste horrible. Elle te consume à petit feu et le pire c'est que tu t'en rends compte. Et quand tu as l'impression d'aller mieux, tout s'écroule et tu es encore plus mal qu'avant. J'essayais de l'appeler le plus souvent possible mais entre les cours et mes parents, j'avais très peu de temps à lui consacrer. Je m'en veux maintenant. Je m'en veux de ne pas avoir été là pour elle. De ne pas avoir été là pour la soutenir, la rassurer pendant cette épreuve.
Elle avait plus que moi, ma sœur et mes parents.
Enfin surtout moi.
Mes parents ne voulaient plus entendre parler d'elle. Avec ma sœur on a dû se résoudre à accepter de ne plus lui parler. Mais elle se sentait tellement mal après la mort de son fils. Il a eu un accident de voiture à l'âge de vingt et un ans. Trop jeune pour mourir. Elle était complètement désorientée. Je n'ai pu me résigner à la laisser seule. Alors je l'ai contacté par émail. On ne se parlait pas très souvent au début. Mais après je lui ai proposé de faire des webcams sur skype. Et tous les soirs on se contactait pour quelques minutes seulement. Chaque fois elle était souriante. Elle ne montrait rien. Elle était forte. Très forte. J'aimerai être comme elle.
J'ouvre la porte du bâtiment et sors. J'inspire une grosse bouffée d'air frais qui me refroidi les poumons. Je serre mes bras contre ma poitrine. Au loin, j'aperçois Lola et Dylan quasi collé l'un à l'autre. Je suis certaine que ces deux-là finiront ensemble. Ils se dévorent littéralement des yeux. Tout le monde s'en ai aperçu sauf les deux concernés. Ils se regardent tellement qu'ils ne me voient pas arriver.
« Salut vous deux. Bien ou bien ? demandai-je.
– Tiens justement on parlait de toi, répond Dylan.
– Ah oui ? Qu'est-ce que j'ai fait encore ?
– Tu es ailleurs depuis plusieurs jours, tu as des ennuis ?
– Bah non. Enfin si, c'est encore mes parents, ils m'engueulent H24.
– T'as fait quoi cette fois-ci ? fait Lola.
– Bah rien justement ! La seule faute que j'ai fait c'est d'avoir cramé les popcorns. »
Ils me regardent et éclatent de rire.
« Eh ! C'est pas drôle !
– T'as réussi à cramer des popcorns ! T'es tellement pas douée ! Sérieux comment tu as fait ? s'esclaffe Dylan.
– Bonne question. Je t'avoue que j'en sais absolument rien. Et d'ailleurs, t'as pas autre chose à faire que te moquer de moi ?
– Si ! Mais c'est moins intéressant que tes histoires, dit-il en rigolant de plus belle. Bon, du coup je vous laisse les filles. »
Il fait un bisou sur la joue de Lola et s'éloigne en riant. Quelques mètres après, il se retourne et me regarde.
« T'es hilarante Emmy ! Surtout ne change pas ! cri-t-il.
– Oui c'est ça ! Rend toi utile, vas bosser, ça changera », criai-je à mon tour.
Il me tire la langue et rentre dans le bâtiment où je suis sorti quelques minutes plus tôt.
Lola se tourne et me souris.
« Tu viens, on va être en retard », souffle-t-elle.
Nous nous dirigeons donc vers notre salle d'allemand.
* * * * * * * *
Je suis dehors avec Lola. On attend impatiemment Dylan pour aller manger.
Le téléphone de Lola se met à sonner et elle répond.
« Coucou. ... Je suis avec Emmy, on t'attend devant le self. ... T'es sérieux ? T'aurais pas pu nous le dire plus tôt ? ... Bon, ben, on arrive alors ! »
Elle raccroche.
« Cet idiot est déjà à l'intérieur avec ses potes. On attend depuis tout à l'heure pour rien ! » dit-elle énervée.
Je ne réponds pas et nous nous dirigeons côte à côte vers l'entrée du self. Pensive, je ne m'aperçois même pas que ma meilleure amie continue à parler.
« ... et il m'a répondu quoi ? Je veux que..., elle fait une pause. Emmy, tout va bien ? »
Je sors soudainement de mes pensées et l'observe.
« Hein ? Quoi ? Tu me parlais ?
– Oui. Tu veux bien me dire ce qui ne va pas ?
– Euh..., je souffle bruyamment. Tu te rappelles du mec dont je t'ai parlé la dernière fois ? Quand on était dans le hall. »
Elle fronce les sourcils et active son cerveau.
« Le mec grave beau qui fait du rugby et qui te matte H24 ? »
Je rougie face à sa question.
« Quoi ? N'importe quoi ! Il ne sait même pas que j'existe !
– Pfff... toi tu es aveugle mais certainement pas lui ! dit-elle en faisant un clin d'œil. En plus il est pas dans la classe à Dylan ?
– Si.
– Mais c'est trop cool ! dit-elle en sautillant. Vous allez pouvoir faire connaissance.
– Lola tu me connais j'y arriverai jamais ! »
Je suis extrêmement timide. Surtout lorsqu'il s'agit du garçon qui me plaît.
Lola s'arrête devant moi et pose ses mains sur mes épaules.
« Prends confiance en toi. Inspire et expire puis tu parles. Ça va venir tout seul. Et surtout règle fondamentale : rester naturelle !
– Mais je vais lui dire quoi ? Je sais pas comment m'y prendre avec les mecs !
– Écoute, te prend pas la tête. Tu lui dis que tu veux faire sa connaissance », explique-t-elle.
Non mais rien que de m'avancer vers lui va être un calvaire !
« En tant que spécialiste de la drague, je vais t'aider », poursuit-elle.
Elle a pas tort. C'est une pro de chez pro. Le mec qui a su résister le plus longtemps était Cameron. Ils sont sortis ensemble une semaine après leur rencontre. Mais quand Lola veut quelque chose ou plutôt quelqu'un, elle arrive toujours à l'obtenir.
Moi, c'est une autre histoire.
« Et s'il part ? Comme à fait Justin ? »
Elle fronce les sourcils.
« Arrête avec lui ! C'est un pauvre con qui n'a rien compris. Il avait juste le feu au cul. Sauf que toi tu n'es pas comme ça et c'est d'ailleurs la seule chose qu'il a compris ! Sérieux Emmy, penses plus à lui. »
Elle retire ses mains de mes épaules pour ouvrir la porte. Une fois rentrée, je cherche Dylan des yeux. Il est au fond du self. Ses trois potes aussi.
Puis je le vois lui.
Il rigole. Bordel ce sourire. À chaque fois que je le vois, mon cœur se réchauffe instantanément et bât plus vite. J'imagine même pas ce qu'il fera si on se parle.
Si on se parle un jour.
Je rejoins Lola. Elle pose sa main dans le digicode et passe la barrière dès que le bouton vert s'allume. Je fais de même. Après avoir pris nos plats, nous nous dirigeons vers la table de Dylan. Nous saluons les garçons à notre arrivée et on s'installe face à face au bout de la table. Dylan nous salue à son tour et nous présente.
« Les gars, voici mes deux meilleures amies, Emmy et Lola. Les plus belles filles que je connaisse », s'exclame-t-il en fixant Lola.
Lola baisse les yeux et rougit tandis que je fais un petit coucou de la main en souriant.
« Salut ! Moi c'est Bryan, dit le garçon en face de Dylan.
– Matys, fait un blond à ma gauche, ravi de vous rencontrer.
– Nathaniel mais vous pouvez m'appeler Natt, fait ce pur beau gosse. »
On se regarde une milliseconde et il détourne le regard pour commencer à couper sa viande. Je m'attaque sans attendre à ma salade.
* * * * * * * *
Dylan, Bryan, Matys, Nathaniel, Lola et moi sommes réunis à l'arrière d'un bâtiment. Il y a que de l'herbe et deux bancs qui se battent en duel. On se croirai pas au lycée en voyant cette espèce de jardin secret.
Nous sommes donc assis en cercle, collé au mur de la structure. Les garçons parlent de leur futur match de rugby qui aura lieu Samedi.
« C'est sûr qu'on va les battre ! On est les plus fort de la région ! se vante Bryan. En plus y'a les pompon girls qui seront là ! Les Chamonix seront tellement subjugués par ses belles femelles qu'on va gagner tranquille. »
J'éclate de rire comme tout le reste du groupe. Pfff... celui-là ! Je le connais depuis à peine une heure et je l'adore déjà. Il est spontané et drôle.
« Tu crois sérieusement qu'ils vont rater leur match à cause de pompon girls ? dis-je en rigolant. Ils s'appellent pas tous Bryan.
– Alors si les pompon girls ne marchent pas, on va montrer nos muscles et ils seront tellement impressionnés qu'ils vont partir aussi vite qu'ils seront venus, s'écrie-t-il.
– C'est plutôt toi qui vas courir quand tu verras que tu les a trop sous-estimés ! intervient Nathaniel.
– D'ailleurs, vous viendrez nous voir les filles ? demande Matys.
– Bien sûr ! s'exclame ma meilleure amie. Hein Emmy ? »
Elle me fait un clin d'œil. Je sais ce que ça veut dire : "c'est l'occasion de pouvoir parler avec ton Apollon".
« Heu... faut que je vois avec mes parents, balbutiai-je. Ils sont super stricts et c'est la merde dès qu'il faut que j'aille quelque part. »
C'est vrai, ce n'est pas une excuse. Mes parents m'interdisent tout. Je vie un enfer chez moi et c'est certainement pas une blague.
Il va falloir que j'invente un truc pour sortir.
* * * * * * * *
C'est la fin de la journée. Je descends de la voiture, referme la portière et cours à la porte d'entrée. Ma mère est venue me chercher au lycée et elle a réussi à gâcher ma journée, encore une fois. Elle m'a engeulé à cause de la disparition de son sèche-cheveux. Une histoire débile, soi-disant je l'aurai caché dans ma chambre vu "qu'apparemment" c'est le gros bordel et que j'aime voler ses affaires.
Comme si j'avais que ça à faire...
Dès que j'entre dans la maison, j'enlève rapidement mes chaussures et mon manteau pour me précipiter vers ma chambre.
Il me reste que demain pour parler à mes parents du match des garçons et donc réfléchir à ce que je vais leur dire.
Après avoir fermé ma porte, je déballe mon sac et ouvre mon agenda. Deux exercices de maths et un d'anglais.
« L'anglais c'est mort je le fais pas, je comprends rien », murmurai-je à moi-même.
Je m'assoie sur ma chaise de bureau et m'attèle aux maths.
Une dizaine de minutes plus tard, je range mon cahier et ouvre la petite cage de Hamtaro, mon hamster, qui se trouve à la gauche de mon bureau. Je le prends dans ma main et le dépose délicatement sur mon lit avant de m'y allonger.
Je repense à Nathaniel. On a beaucoup parlé cet après-midi.
En plus d'être beau, il fait énormément de choses en dehors du lycée comme le rugby, de la guitare et du piano. Il adore les animaux tout autant que moi. Ce mec est juste génial !
Mais ça, je le savais déjà.
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