L'homme de la montagne

By KoenDiri

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Il y avait bien des choses que Marc pouvait cataloguer comme de "mauvaises nouvelles". La disparition d'une e... More

Dédicace et Avant-propos
Chapitre 1 - le choix du fou
Chapitre 2 - l'impuissance du marcheur
Chapitre 3 - les difficultés de la montagne
Chapitre 4 - le domaine des chinchimottes
Chapitre 5 : le rugissement des flots
Chapitre 6 : les battements du cœur
Chapitre 7 : la vengeance du farfadet
Chapitre 8 : les larmes de l'enfant
Chapitre 9 : la cruauté dans la peau
Chapitre 10 : les cris du silence
Chapitre 11 : la colère des sages
Chapitre 12 : le poids des responsabilités
Chapitre 13 : la naissance des chinchimottes
Chapitre 14 : une mission impossible
Chapitre 15 : une course endiablée
Chapitre 16 : une interrogatoire déroutant
Chapitre 17 : accomplir la mission
Chapitre 18 : une vie commune
Chapitre 19 : une profusion de provision
Chapitre 20 : des changements notables
Chapitre 21 : un silence prévenant
Chapitre 22 : un cri déchirant
Chapitre 23 : une famille retrouvée
Chapitre 24 : le chant des papillons
Chapitre 25 : une autorité inébranlable
Chapitre 26 : une visite difficile
Chapitre 27 : une antre monstrueuse
Chapitre 28 : un niveau alarmant
Bonus : L'enfance de Hank
Chapitre 29 : la fin du voyage
Participations aux concours et résultats

Prologue

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By KoenDiri

Fou. C'était ce mot qui était généralement employé pour le désigner. Le fou. Le fou de la montagne. Le fou qui errait dans les bois. Attention, quand quelqu'un parlait de lui en ces termes, ce n'était pas pour le dévaloriser en soit. Tout le monde s'entendait en ville sur ce diagnostic somme toute rapide.

Il était fou, mais au-delà de ça, ce n'était pas un gentil gars souffrant d'un retard mental. Il n'était pas un peu gauche et inquiétant au premier abord puis si doux et délicat qu'il en devenait attachant. Non, lui, il était ce fou énigmatique et trop maigre, dont la rudesse se voyait moins dans les traits que dans l'air inquiétant.

Il était le genre de cinglé à sortir son fusil avant de parler. Il était l'un de ces dérangés qui peuvent peupler les histoires d'horreurs que les gens se racontaient autour des feux de camps. Si on le désignait sous le nom de "fou", c'était peut-être seulement pour se rassurer. Pour ne pas laisser sa présence inquiétante sortir du cadre du réel. Il n'avait rien de particulier. Il n'était pas plus affolant que n'importe quel autre fou ou en tout cas, c'était ce qu'il se disait ici et là. Les hommes qui le nommaient ainsi pour de telles raisons pouvaient également appeler, au petit bonheur la chance, les bruits de la forêt sombre "ours", "hibou", "sanglier" ou "chevreuil".

Contrairement à ces bruits fantômes dont les propriétaires ne seraient jamais pleinement identifiés, le fou, lui, pouvait être décrit. Il avait le regard noir. Les cheveux noirs. La peau claire et couverte de cicatrices. Il était toujours enfoncé dans plusieurs couches de vêtements, qu'il neige, qu'il vente ou que le temps soit clair. Comme s'il n'y avait pas de raison que les choses en soient autrement. Cela lui conférait un air intemporel. Il ne semblait pas tout à fait connecté au tic tac cosmique qui faisait pourtant dérouler les saisons autour de lui.

Parfois l'un des représentants de la loi, Marc Wechter, venait voir le fou. Il tentait de lui parler. De le raisonner, disait-il, comme si sa vie avait quelque chose de déraisonnable. D'inopportun. D'invraisemblable. De dingue.

Marc portait des jeans et des bottes. Des chemises et des blousons lâches. Il pouvait parfois ressembler à un baroudeur, aux yeux des gars de la ville, mais sous le regard du fou tout en lui criait qu'il venait de la civilisation. La ville ... Le fou la détestait. Ce n'était qu'un furoncle sur sa belle montagne, dans sa belle vallée, dans ce beau paysage. Un furoncle posé sur une veine qu'il aurait fallu arracher, tant elle était gonflée, purulente, malodorante et dangereuse. Une sale route qui déformait tout. Heureusement, il n'y avait pas grand-chose d'autres dans la région, si ce n'était des montagnes et encore d'autres montagnes.

Quand Marc venait, le fou se montrait. Quand les autres venaient, les imbéciles qui peuplaient ce furoncle de ville, ils ne trouvaient qu'un sentier tortueux. S'ils réussissaient à trouver sa cabane, ils devraient faire face aux coups de fusils. Le fou n'aimait pas être dérangé. En ville, on le savait, alors personne ne s'aventurait par ici et on envoyait Marc de temps à autres, pour essayer de le déloger. Était-ce bien normal que ce sauvage réside ici ? La question revenait assez souvent avec des relents de haine. 

Marc, lui, pensait que le fou était peut-être totalement dingue, mais il ne croyait pas qu'il pouvait être un tueur. Les rares coups de fusil qu'il tirait partaient en l'air. La première fois, il avait eu chaud, mais en restant calme et cohérent, l'autre se détendait vite. Par contre, il ne fallait pas céder à la panique face à lui.

Ce jour-là, Marc devait aller le voir et il n'était pas bien sûr de lui. Il savait que le fou n'allait pas aimer ce qu'il devait dire. Il savait aussi qu'il allait avoir besoin de sa coopération, à moins qu'il ne se mette à le suspecter. Alors, il avait pris la décision épineuse d'amener un adjoint avec lui. Cet homme, c'était Sam Cambry.

Sam était un bon gars et comme tous les bons gars, il n'aimait pas l'idée qu'un fou rode dans les bois. Ça en faisait presque l'ennemi naturel du fou, mais en ces heures sombres, il pouvait comprendre l'importance d'avoir sa coopération. Alors, Marc et Sam avançaient ensemble à travers le petit sentier. Ils s'étaient garés le plus près possible de chez le fou. Ça laissait une sacrée trotte depuis la route.

Marc alla jusqu'à un arbre tordu, avec deux branches lourdes, qui leur barrait le chemin. Autour de ses racines épaisses, il y avait deux sentiers légers. Marc les guida sur l'embranchement le moins large. On aurait pu croire à une piste souvent pratiquée par du petit gibier. Le sentier semblait presque disparaître par ici car le fou n'était pas bête. Il entretenait les fausses pistes, pendant que le chemin menant à sa cabane était bien planqué. La première fois, Marc y était arrivé par hasard d'ailleurs, comme tous ceux qui avait un jour trouvé l'emplacement en question.

Ils continuaient d'avancer d'un pas prudent. Marc avait toujours peur que le fou ne finisse par installer des pièges. Pour le moment, ce n'était pas le cas, mais il préférait ouvrir l'œil. Le long d'une pente qui se faisait de plus en plus brute, Sam crut qu'ils s'étaient perdus, mais il continua à suivre son collègue en qui il avait pleinement confiance. Ils longèrent cette pente qui paraissait impraticable. Là, ils se retrouvèrent face à plusieurs arbres très gros et pleins d'épines qui leur cachaient la vue, et pourtant la petite clairière était juste là derrière.

Marc s'arrêta une seconde et énonça d'une voix forte :

- Hank, c'est Marc. Je suis avec Sam. Nous ne venons pas chercher les ennuis, mais j'ai à te parler. Nous allons nous approcher. Nous parlerons. Puis nous repartirons.

Il attendit, quelques secondes de plus devant l'air médusé d'un Sam qui se demandait si la folie était communicatrice en ces bois. Il finit par décider que Marc savait sans doute mieux y faire que lui avec les cinglés alors préféra s'abstenir de tous commentaires. De toute façon, il avait trop de respect pour son supérieur et ami pour lui dire quoique ce soit.

N'entendant aucun coup de feu qui aurait été une réponse claire de son refus de parler, Marc reprit son chemin et se faufila entre les deux grands sapins. Les deux seuls arbres dont les épines ne leur déchireraient pas la peau. De l'autre côté, il observa la cabane rudimentaire de l'homme. Pas d'eau courante. Pas d'électricité non plus. La cabane semblait être faite de bric et de broc, mais elle tenait debout.

Parfois, Marc ramenait des choses pour la restaurer, c'était ces faveurs qui l'avaient partiellement mis dans les bonnes grâces du fou. Il payait régulièrement pour pouvoir lui parler, même si ce n'était que quelques mots. Même si ce n'était que pour vérifier que rien n'avait changé. Même si ce n'était que pour entretenir l'habitude de venir. Même si ce n'était que parce que l'hiver, plus rude que les précédents, risquait d'emporter la vie du fou. Il trouvait bien des occasions de lui ramener des choses et de faire du troc. Hank n'acceptait pas les cadeaux, il fallait trouver des parades.

- Pourquoi il est là lui !?, cria le fou depuis un coin de sa cabane.

Sam eut envie de reculer en apercevant le fusil entre ses mains ou au moins de saisir sa propre arme. Marc l'avait prévenu et lui avait demandé de ne pas le faire, alors il prit sur lui, le cœur battant à mille à l'heure. Il savait reconnaître le danger et là, il était en danger.

Marc, de son côté, eut presque envie de sourire. Il l'aurait peut-être fait si l'heure n'était pas aussi grave. L'idée d'être assez accepté par cet ermite pour qu'il tique davantage sur la présence de Sam, c'était plutôt gratifiant. Un peu cruel pour Sam qui devait énormément stresser, mais gratifiant quand même.

Doucement, il expliqua :

- Nous devons parler.

- J'ai rien à dire. Dégagez !

- D'accord. Nous allons partir. Mais si on fait ça, y'a du monde qui va venir de ce côté-ci de la montagne et ... je me suis dit que tu préférerais l'éviter.

Il y eut une seconde de silence, avant que la voix nouée par l'angoisse de Hank ne retentisse de nouveau.

- Des gens ?

- Ouais, pleins de gens.

- Mais pourquoi ?

Personne ne venait jamais par ici. C'était une règle presque immuable. Parfois un inconnu, un imbécile de la ville, franchissait ses arbres, mais c'était rare et le plus souvent il pouvait le chasser. Il y avait de rares exceptions comme Marc. Mais pourquoi pleins de gens viendraient-ils ? Ses bois, ils s'en foutaient !

- Y'a une gosse qui a disparu. Du côté de Norsfolk. Ca fait un bail, mais les enquêteurs pensent qu'elle a été enlevé et ... relâchée ... dans les bois. Ils la cherchent à travers toute la forêt.

Hank affirma, sans la moindre émotion :

- Elle est pas ici.

Dans sa tête, son affirmation suffisait. Dans sa tête, voilà qui venait conclure la conversation. Marc pourrait repartir, avec l'intrus qui l'accompagnait. Il pouvait repartir et dire aux gens que ça ne servait à rien de venir. Comme ça, personne ne viendrait et tout irait bien. C'était d'une logique imparable, mais le visage de Marc ne se tordit pas de soulagement. Il ne semblait pas prêt à partir. Hank vacilla légèrement sur ses pieds. Il ne voulait pas en parler d'avantage. Il voulait qu'ils partent à présent.

Il faillit leur dire que c'était le moment de partir, mais il se retint. Marc allait encore parler. Il n'allait pas aimer, mais il ne pouvait quand même pas tirer sur Marc ? Non. Non, ce ne serait pas bien. Sur l'autre, il pouvait, mais sur Marc ... Non. 

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