Simon - Tome 2 : mots-croisés

By LeonDeGriffes

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Après s'être débarrassés de leur encombrante amie, Simon et Louise sont enfin réunis. Leur relation semble dé... More

Chapitre 1 - Voyage
Chapitre 2 - Pris au piège
Chapitre 4 - Rétribution
Chapitre 5 - Providences
Chapitre 6 - Prunes, pêches et Myrtille
Chapitre 7 - Le souffle du passé
Chapitre 8 - Ça déménage
Chapitre 9 - Métamorphoses
Chapitre 10 - Un grain de sable au milieu du désert
Chapitre 11 - Le choix du prince
Chapitre 12 - Illuminations
Chapitre 13 - Un regard sur la vie
Chapitre 14 - Clair de lune
Chapitre 15 - Questions et réponses
Chapitre 16 - Au poil
Chapitre 17 - Un jour comme un autre
Chapitre 18 - Le sort en est jeté
Chapitre 19 : Dénouement
Chapitre 20 - Épilogue

Chapitre 3 - Retour aux réalités

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By LeonDeGriffes

Le retour sur Paris sembla à Simon plus rapide que l'aller. Il se sentait moins crispé, presque ravi de son week-end malgré quelques épisodes déconcertants et sentait en lui comme une plénitude. Il n'avait pas connu cela depuis des années, une décennie quasiment.

Il regarda d'un œil amoureux Louise qui conduisait et s'enfonça plus confortablement dans le siège en cuir du bolide. Il avait bien proposé de prendre le volant cette fois-ci, mais elle avait gentiment, mais fermement refusé. Il avait fait mine de paraître vexé, même s'il s'en moquait en réalité, pour obtenir une explication. Elle ne lui avait pas donné, il n'avait pas cherché plus loin. Conduire n'était pas une passion chez lui et il appréciait de n'avoir rien à penser et se contentait d'observer la belle blonde qui partageait ses pensées.

Louise lui retourna son regard, mais il n'y lut pas les mêmes sentiments. Il sourit inconsciemment et ne put s'empêcher de demander :

— Tu veux qu'on s'arrête dans un petit coin tranquille ?

Elle le regarda à nouveau sans rien dire, mais le mouvement de ses yeux trahit son envie. Simon rit.

— Ah ah, tu as l'air à cran. Je crois que je comprends ce que tu veux dire quand tu parles de mon « regard de pervers ». Je réitère ma proposition : on peut s'arrêter sur le côté.

— Sans façon, non. Dans l'herbe ou dans la voiture, il n'y a que dans les films que c'est agréable. Mais tu ne perds rien pour attendre, dès qu'on arrive à la maison je te mange tout cru.

Simon rit de bon cœur et sentit que ces mots-là éveillaient en lui sa propre envie. Pour tenter de faire redescendre la tension, il se lança dans un compte-rendu du week-end :

— J'ai bien aimé ta famille. Bon, avec ton père, je sens qu'il y a encore un peu de travail, mais ça s'est plutôt bien passé, non ?

— Oui, fit Louise, maman et les jumelles t'ont adoré. Et mamie aussi.

— Ah, pourtant, elle a dit qu'elle préférait Christophe.

— Ça, c'est mamie Jo, mon arrière-grand-mère, elle fait toujours ça, juste histoire d'emmerder le monde. Ma mamie Huguette t'a très bien apprécié, elle.

— Mince, je crois que j'ai confondu. Je pensais que ta grand-mère c'était la petite vieille. C'était laquelle, alors, ta mamie ?

— Simon ! Je te l'ai présentée quand on est arrivé ! Quelle mémoire...

— Celle qui portait un chapeau rigolo ?

— Oui, voilà, celle-là.

— Oh, pardon, mais elle ne fait pas si vieille, je pensais que c'était ta tante !

— C'est vrai qu'elle est en pleine forme.

— Et donc la petite vieille, c'est sa mère ?

— Oui. Elle fait sa ronchonne, mais elle est super gentille quand on la connaît. Bon et puis, elle n'est plus toute fraîche, on se demande encore comment elle tient debout parfois.

Simon acquiesça. Il demanda, taquin :

— Il y a d'autres frères ou sœurs dont tu ne m'as pas parlé ?

Louise haussa les épaules avant de répondre :

— Il n'y a que Martin que tu n'as pas vu. Il ne vient pas souvent.

— Il a quel âge ?

— Trente-huit ou trente-neuf, je ne sais plus trop. Il habite dans le Sud. Il a une famille, des enfants, une maison, enfin il est casé maintenant.

Simon avait réalisé durant ce week-end à quel point il avait encore beaucoup de choses à découvrir dans la vie de Louise. Il se trouvait à la fois un peu sot de ne jamais avoir été suffisamment curieux pour obtenir ces informations et ravi de se rapprocher toujours un peu plus de sa belle.

— Je te ferais remarquer, ajouta Louise, que tu ne me parles pas beaucoup de ta famille non plus.

— C'est vrai, admit Simon. Je n'ai pas grand-chose à dire en fait. Je n'ai aucun frère, aucune sœur, ma mère est décédée d'un cancer il y a maintenant trois ans, je crois, et mon père... c'est mon père.

— C'est-à-dire ?

— C'est-à-dire que je ne lui parle pas vraiment.

— Pourquoi ?

Simon secoua la tête. Il prit la moue contrite que Louise lui connaissait quand il voulait éviter un sujet. Au lieu d'insister, elle avait appris à laisser un silence s'installer. Parfois, il le brisait de lui-même. Pas cette fois-ci.

La route défila rapidement, les prés laissèrent place aux murs en briques, les maisons aux tours, les arbres aux panneaux. Simon se fit la remarque qu'elle conduisait si bien que le voyage en avait été des plus agréables. Même s'il avait eu tendance à enfoncer une pédale de frein imaginaire au début, il avait rapidement lâché prise, jusqu'à réussir à s'endormir par moments. Malheureusement pour lui, Louise le réveillait toujours dès qu'elle le voyait partir.

— Ne t'endors pas, je n'aime pas rouler seule.

— Je suis crevé, ma chérie, il reste encore beaucoup de route ?

— On dirait un gamin...

— Combien ? insista-t-il.

— Non, il reste à peine une demi-heure. Tiens, au fait, tu sais que j'ai encore croisé Marie-Lee et Christophe l'autre soir ?

— Non, je ne savais pas, ils t'ont vue ?

— Non, je ne pense pas. Je me suis vite esquivée.

— J'en ai marre de ses manigances, à celle-là. Ça doit bien faire plus d'un mois que je ne l'ai pas croisée et je m'en porte aussi bien.

— C'est clair !

Simon croisa les bras sur son torse et regarda la route défiler au ralenti. Depuis qu'ils avaient rencontré le couple au marché, ils se baladaient dans d'autres coins le dimanche matin. Puis ils avaient dû changer de piscine aussi, changer de supermarché. Marie-Lee prenait un malin plaisir à se trouver au même endroit, par hasard, et faire comme si de rien n'était, au bras du gringalet à lunettes de soleil qui n'avait d'yeux que pour Louise.

— Si on peut éviter de parler des sujets qui fâchent, ça m'arrangerait...

— Pourquoi qui fâchent ?

Simon se tourna un peu plus vers la porte et ferma les yeux :

— Parce que tu refuses de m'expliquer ce qui s'est passé avec Christophe et ça m'énerve vraiment.

Louise soupira.

— Ce n'est pas ça, c'est juste que c'était compliqué et que je n'ai pas envie d'en parler. Mais ça viendra, je te le promets.

— Hum hum, marmonna-t-il.

Il forçait un peu le trait, pour marquer le coup. Il savait qu'elle ne lui disait pas tout, mais il savait aussi qu'il ne devait pas trop insister et qu'un jour elle se déciderait à s'ouvrir à lui. Quatre mois de relation, c'était probablement trop peu pour parler de ce qui avait pu marquer une existence, de ces choses intimes qui nous construisaient. Lui-même ne s'était toujours pas épanché sur la mère de Mathilde par exemple. Il eut une idée et tenta le coup :

— Si je te parle de Julie, tu me parles de Christophe ?

— Qui est Julie ?

— La mère de Mathilde.

— Oh...

Louise tourna la tête vers lui. Il sentit qu'une brèche s'entrouvrait et qu'il pouvait s'y faufiler :

— Pas forcément maintenant, quand tu seras prête.

— Oui... oui... d'accord, pourquoi pas ? On... on en reparle, d'accord ?

Simon sourit et tenta à nouveau de s'endormir, en vain, vu que la porte du garage de la résidence de Louise le réveilla. Ils étaient arrivés.

À peine dans l'appartement, Louise fila à la salle de bain tandis que Simon s'orienta vers la cuisine. Il ne venait finalement pas si souvent que cela chez elle, mais il avait vite pris ses habitudes. Il tira sur les rideaux qui avaient laissé l'appartement dans une pénombre paisible et ouvrit le frigo. Contrairement au sien, celui de Louise sentait bon le frais et le marché. Il adorait les fruits et les légumes, il savait même les cuisiner s'il fallait, mais Mathilde ne les aimait pas et il devait avouer qu'il avait souvent la flemme de les préparer correctement. Quand il venait chez la jolie blonde, il était ravi de piocher dans les fraises juteuses, les tomates cerises ou même le bocal d'olives épicées. Mais cette fois-ci, c'est la demi-pastèque qui attira son attention. Il s'installa sur la petite table de la cuisine et entreprit d'en couper des parts respectables, servit deux verres de bière bien fraîche et entama les hostilités quand il entendit l'eau couler dans la salle de bain.

Lorsqu'il eut vidé son verre d'un trait, il s'installa sur le canapé et se mit à rêvasser au scénario de son futur roman. Les histoires romantiques n'étaient pas si simples à écrire, contrairement à ce qu'il avait pu présupposer et cela lui demandait un important effort de planification.

Il entendit derrière lui les pieds nus de Louise se faufiler jusqu'à la cuisine et lui lança :

— Je t'ai laissé des tranches de pastèques si tu en as envie et je t'ai lavé quelques radis.

Elle s'avança jusqu'à paraître dans son champ de vision et lui répondit :

— Ce n'est pas de ça que j'ai faim...

Simon déglutit alors qu'elle se tenait fièrement devant lui, entièrement nue, la peau encore légèrement ruisselante d'eau chaude.

Elle s'approcha doucement en murmurant :

— J'ai enfilé les sous-vêtements que tu préfères.

Il eut un petit sourire en coin. Elle était toujours aussi belle à se damner. Simon sentit son sexe se tendre et, pour une fois, n'eut pas honte de ce réflexe primaire. Il avait envie de se dévoiler à son tour, mais n'osa pas. Les seins de Louise l'hypnotisaient tant, qu'ils se retrouvèrent à quelques centimètres de lui sans qu'il comprît comment. Elle avait de larges mamelons roses et des petits tétons guimauves qu'il s'amusait chaque fois à faire sortir de leur cachette en les harcelant de sa langue et de ses dents. Mais cette fois-ci, ils étaient déjà bien dressés, bien tendus et la tentation fut grande d'y plonger la bouche pour les agacer de plaisir.

Sa longue crinière dégringolait sur ses épaules nues telles une cascade chatoyante aux reflets délicieux. Simon adorait cette chevelure enflammée qu'elle agençait savamment chaque matin pour se choisir une humeur. Le ton de la soirée était donné : sauvage et facétieux.

Elle était penchée sur lui, les bras de part et d'autre de la tête du beau blond, les seins ballants devant lui, les jambes nues frôlant ses cuisses. Les mains de Simon vinrent étreindre la taille fine et frissonnante de sa belle déesse et il la retint un instant pour se repaître de cette somptueuse vision. Louise prit une de ses mains et la dirigea sans équivoque entre ses cuisses, où Simon découvrit à quel point elle était excitée. Les lèvres glabres s'entrouvrirent pour accueillir ses doigts fureteurs et elle poussa un soupir de plaisir qu'il recueillit du bout des lèvres. Elle coula encore davantage sur sa main et elle posa un pied sur le canapé pour qu'il ait un meilleur accès à son plaisir.

Leurs langues se lancèrent dans une délicieuse mêlée. Puis, à bout de souffle, ils se retirèrent et se sourirent. Nez à nez, front contre front, ils appréciaient l'entièreté d'une relation saine et parfaitement complice. Louise murmura :

— Tu n'as pas pris de dessert, n'est-ce pas ?

Sans attendre sa réponse fiévreuse, elle grimpa debout sur le canapé, agrippa les cheveux courts de Simon et l'attira entre ses cuisses dans un mouvement torride. Il en ouvrit la bouche de surprise et fut accueilli par une gorgée suave et terriblement excitante. Ah oui, c'est comme ça que tu le veux ! Il enfonça sa langue entre les chairs appétissantes de la blonde affamée. C'était le jeu qu'il préférait entre tous. Celui où il faisait succomber Louise à sa guise, où elle était sous son emprise malgré sa position docile.

Il commença par boire en elle, comme pour absorber le trop-plein d'excitation. Quand il sentit qu'elle lâchait prise sur ses cheveux pour se retenir aux bords du canapé, il prit le relais en la tenant fermement par les fesses. Elle avait un cul si doux, si ferme, si rond que Simon était capable de s'exciter à sa seule pensée. Il la griffa légèrement, osant pour la première fois associer douleur et plaisir, si bien que Louise, surprise, frissonna. Il sentit ses jambes fléchir, mais la retint à bout de bras sans plus d'efforts.

Sa bouche s'ouvrit davantage, il engloba l'ensemble du sexe gourmand de Louise et l'embrassa délicatement. Il connaissait ses désirs, il savait ses faiblesses. Il tira la langue pour la remonter entre les lèvres torrides jusqu'à effleurer le petit bourgeon sensible. Louise se cabra et il l'entendit tenter d'exprimer quelque chose qui ne ressembla qu'à un gargouillis incompréhensible. Il commença alors une lente et lancinante danse autour de son clitoris gonflé. Il le débusqua, le salua, le taquina, le souffla, lui épela le mot « chaud » d'une dictée appuyée, le suçota, le couronna enfin d'une tiare de baisers endiablés.

Louise maintenant criait à perdre haleine. Ses jambes, tremblantes, reposaient dans les bras tendus et musclés de Simon qui lui martyrisait toujours le cul d'une poigne solide. Dans un moment de folie partagée, le bel écrivain pointa un doigt curieux au centre des deux lobes divins, jusqu'à atteindre la corolle irisée. La réaction fut surprenante : Louise hennit ! Puis dans une dernière ruade, elle se laissa retomber sur le doigt fureteur et succomba à un puissant orgasme.

Simon savait, à l'oreille, reconnaître l'orgasme de sa chérie. Il décida de jouer avec elle encore un peu. Il réactiva ses caresses sur le clitoris enflammé, mais cette fois-ci plus douces, plus espacées, juste ce qu'il fallait pour entretenir les braises d'une jouissance qui n'en finissait pas. Au bout d'un moment, elle clama sa défaite, implora qu'il mît un terme à ses souffrances, lui tira les cheveux, mais rien n'y fit : sa langue tournait doucement, mais sûrement au milieu des chairs brûlantes. Elle ne pouvait s'y soustraire, il la tenait fermement, et elle jouit encore une fois dans un râle délicieux.

Quand il la reposa sur le canapé près de lui, elle le regarda, le souffle court, les yeux exorbités et articula difficilement :

— Oh... mon... dieu...

Simon sourit sans dire un mot, mais reconnut intérieurement que c'était un second prénom qui lui allait plutôt bien.

Lorsqu'il reprit ses esprits, Louise était recroquevillée près de lui, nue, endormie, éreintée. Il se leva sans la réveiller, se nettoya les mains et le visage avec un sourire amusé, puis revint dans le salon.

Délicatement, il passa un bras sous les jambes repliées de Louise, un autre sous sa nuque et la souleva sans difficulté. Elle grogna légèrement, mais ses paupières restèrent closes. Simon l'emporta jusque dans sa chambre où il la déposa doucement avant de la couvrir de la lourde couette et d'y rajouter un plaid en polaire. Il fit le tour de la pièce et s'allongea de l'autre côté après s'être délesté de la plupart de ses vêtements.

Une fois installé là, il se rendit compte qu'il n'était pas du tout fatigué et passablement excité. Il souleva malicieusement les draps pour observer le corps nu de Louise et son boxer se tendit instantanément. Elle était tellement canon. Malgré la faible lumière, il se reput des courbes douces et sculpturales de la belle blonde. Ses seins lourds tombaient légèrement sur ses côtes. Elle n'aimait pas dormir entièrement nue, pour justement éviter de se présenter ainsi, les seins aplatis par leur propre poids. D'ordinaire, elle portait uniquement une nuisette, ce que Simon regrettait. Il n'y avait rien de honteux dans les courbes généreuses de sa poitrine et il en appréciait à cet instant toute la splendeur.

Le chapiteau qui déformait désormais le tissu de son boxer le fit grimacer et il se força à reposer la couette. Il n'osait pas allumer de peur de la réveiller et se trouva un instant seul et misérable devant son excitation. Il décida alors de se lever, il devait faire fructifier ces moments-là. Il se dirigea vers la table basse du salon et attrapa le portable de Louise, y brancha sa clef USB et s'arrêta devant la demande de mot de passe. Il attrapa son téléphone qui traînait sur le meuble d'entrée pour y chercher l'information que Louise lui avait confiée. Il nota qu'il avait un appel en absence et trois messages. Mathilde l'avait appelé sans succès et lui disait par texto qu'elle ne rentrerait pas ce soir à la maison. Il acquiesça sans répondre ; il était trop tard pour cela. L'autre message était de Léo qui demandait s'il pouvait passer dans la semaine. Simon fronça les sourcils : il connaissait suffisamment son ami pour savoir que ce genre de demande ne sonnait pas vraiment bien. Le dernier message lui fit plaisir : Véronique, son éditrice, lui annonçait avec force smileys que les premiers chiffres étaient tombés et que son roman cartonnait. Il lui répondit, cette fois malgré l'heure, avec un simple petit bonhomme jaune ravi.

Cela l'incita encore davantage à se mettre à écrire. Il avait déjà une trame intéressante en tête et une succession de rebondissements naissait dans son esprit. Il fallait encore affiner, longuement, savamment, avec délicatesse, mais il tenait quelque chose qui lui plaisait, et il savait que c'était déjà une étape primordiale. Dans son humeur du moment, il avait uniquement besoin d'écrire une scène de sexe. Pour cela, nul besoin du scénario précis, juste deux personnes, elle et lui, lui et elle, une situation excitante et la virtuosité de ses doigts sur le clavier. Encore fallait-il accéder à cet ordinateur pour le moment verrouillé. Il chercha dans ses notes le mot de passe et le rentra en bougonnant : « 07122509 ». C'était l'assemblage des dates d'anniversaire de Louise et du fameux Christophe. Elle lui avait expliqué ne pas l'avoir changé depuis des années et qu'elle le ferait dès qu'elle y penserait. Il avait marmonné comme il le faisait actuellement, mais n'avait pas poussé plus loin le questionnement.

Pourtant, à cet instant précis, il sentait poindre en lui la tortueuse sensation de la jalousie. Tout le week-end, on lui avait rappelé à quel point ce fameux Christophe était fabuleux, charismatique, poli, beau, si bien qu'il aurait aimé avoir une discussion approfondie sur le sujet avec Louise. Un abcès à crever. Et il se tenait là, seul, son ordinateur portable sur les genoux, une bonne partie de son intimité et de ses secrets à portée de clavier. Il pouvait fouiller les photos, les vidéos, les petits mots doux s'il y en avait. Les mails envoyés aussi. L'historique de ses pages internet consultées. Peut-être même des photos... coquines. Il n'était pas un grand habitué des écrans, mais il était capable d'obtenir ces informations. Mais était-ce juste ? Il aimait Louise et lui faisait confiance. Elle n'avait jamais démontré la moindre raison pour qu'il se méfiât. Et puis, n'avait-il pas, lui-même, des photos de ses anciennes petites amies dans son ordinateur ? Des photos de Julie, la mère de Mathilde, avant le drame ? Et même probablement quelques photos intimes qu'il n'avait jamais trouvé le temps ni le courage de supprimer ? Fouiller dans cet ordinateur était comme creuser l'intimité de Louise sans sa permission, comme une sorte de viol électronique. Il se sentit bête d'y avoir même pensé et repoussa cette idée loin dans son esprit.

Il ouvrit le dossier de sa clef qui contenait tous ses textes, œuvres, notes et idées et se lança dans la description d'une nuit torride entre ses deux nouveaux personnages...

***

Au petit matin, quand Simon ouvrit ses yeux embrumés, Louise était déjà prête, parfumée, apprêtée dans une très jolie robe noire serrée autour de ses courbes divines. Elle lui sourit tandis qu'elle finalisait sa coiffure devant la psyché de sa chambre.

— Déjà debout ?

— Je suis même en retard. Tu devrais te lever toi aussi !

— Oh... J'ai écrit une bonne partie de la nuit.

— Tu as eu de l'inspiration ? lui demanda-t-elle en lui lançant un sourire mutin dans le reflet du miroir.

Il fit le plus beau sourire qu'il pût avec la tête en vrac et grogna un « absolument » qui sortit de sa gorge avec difficulté. Il la regarda terminer de se préparer avec admiration. Elle se tourna ensuite vers lui et s'agenouilla près du lit. Malgré son haleine du matin, elle l'embrassa amoureusement avant d'ajouter :

— Après ce que tu m'as fait hier, je t'en dois une.

— Ah bon ? fit Simon, l'esprit beaucoup plus clair en un instant. Une quoi ?

— Une gâterie !

Joignant le geste à la parole elle glissa une main sous la couette et trouva ce qu'elle cherchait parfaitement tendu. Elle leva un sourcil d'étonnement puis sourit :

— La petite gaule du matin ?

— Entre autres. Observer la femme la plus sexy du monde en train de s'habiller n'aide pas non plus.

Elle secoua la tête, amusée, et caressa distraitement la hampe raidie qui palpitait sous ses doigts. Il demanda :

— Alors, c'est comme ça que ça marche ? On se « doit » des gâteries ?

Louise pencha la tête et se mit à réfléchir, tout en enserrant la queue de son petit ami.

— Non, pas vraiment, mais là il faut que je marque le coup, pour en avoir d'autres.

— Tu sais que je continuerai à te faire grimper aux rideaux quand même ?

— Quoi, tu ne veux pas ta récompense ?

Simon hésita un instant en souriant.

— Si je dis non, tu fais quoi ?

— Je te l'offrirai quand même, même si je dois te forcer ! De toute manière, tu ne vas pas dire non, n'est-ce pas ?

— En effet, je ne dis pas non !

Il lui sourit de toutes ses dents et elle l'embrassa une dernière fois, lâcha le paquet et se releva dans un mouvement de menton exagéré. D'une voix qui se voulait comtesse, elle lui lança :

— Alors à ce soir, beau gosse !

— Pourquoi tu ne restes pas travailler ici ?

Elle resta un moment interdite devant la question puis répondit simplement :

— Je ne fais pas que de la relecture, tu sais, je fais aussi du travail d'édition. J'ai besoin de contacts. Et puis, je n'aime pas bosser depuis chez moi, je ne sais pas comment tu fais...

— Moi, je ne sais pas comment tu fais pour bosser entourée de tous ces gens, justement...

— On n'est pas fait pareil, fit Louise amusée.

— Bonne journée alors, ma belle.

Elle lui lança un clin d'œil et quelques secondes plus tard il se retrouva seul dans le lit et dans l'appartement, avec à nouveau la béquille au garde à vous. Il se leva doucement et s'observa un instant dans la glace, la queue droite devant lui. C'était une sensation étrange, que de s'observer ainsi. Il n'aimait pas les miroirs et les avait toujours fuis. Mais là, nu, bandé, musclé, il était assez fier de l'image qu'il renvoyait.

Sous l'eau de la douche, il hésita un instant à se caresser pour se soulager, mais préféra laisser l'excitation retomber. Il désirait la préserver pour le soir.

Il adorait cet instant unique de la journée où, sous l'eau progressivement brûlante, il pouvait faire le point sur sa journée à venir et sur le scénario de son roman. C'était un moment très productif. Son esprit et son imagination travaillaient de concert pour lui révéler une nouvelle trame, de nouveaux rebondissements, une réplique percutante, un trait de personnalité amusant d'un de ses héros. Ce matin-là, il eut envie que son personnage principal fût d'un caractère très jaloux. Était-ce pour conjurer ou rire de sa propre jalousie ? Probablement. D'ailleurs, quand Louise était partie quelques minutes plus tôt, il avait senti à nouveau cette pointe tirailler ses tripes. Pourquoi partait-elle travailler dans un bureau alors qu'elle pouvait contractuellement tout faire d'ici ? Elle lui avait déjà dit que c'était un choix personnel, mais il ne pouvait s'empêcher de penser qu'elle pouvait tout aussi bien lui mentir sur ses intentions. Est-ce qu'il la connaissait assez pour savoir quand elle lui mentait ? Il n'aimait pas se poser ce genre de questions, mais il considérait qu'il était sain d'y réfléchir. Il se rinça longuement, sortit de la douche et s'ébroua. Il fallait qu'il rentrât chez lui.

Louise s'était décidée à lui laisser un jeu de clefs, celui qu'elle avait repris à Marie-Lee avant de la jeter dehors. Il était tout fier de l'avoir reçu, comme une preuve directe de leur engagement. Il rangea toutes traces de son passage et partit pour son appartement.

Il le trouva dans le même état qu'il l'avait laissé ; sa fille n'était pas passée du week-end. Ah, si, elle est bien passée ! Sur la table, un petit mot de la jolie écriture ronde de Mathilde :

« Coucou papa, je passe en coup de vent récupérer quelques affaires et on se voit vendredi soir. J'espère que ton week-end s'est bien passé. Bisous. »

Elle lui manquait déjà, mais il n'avait pas pu faire autrement. Instinctivement, il leva les yeux sur sa bibliothèque, comme attiré par une étrangeté : il manquait un livre. Là, sur l'étagère de ses propres romans ! Simon déglutit. Ce pouvait être Louise, mais ce pouvait être Mathilde aussi. Dans ce second cas, il se rappelait trop bien leur discussion à ce propos pour ne pas imaginer ce que cela pouvait sous-entendre. Avait-elle eu sa première relation ? C'était une question trop angoissante pour lui. Depuis qu'elle avait eu ses dix-sept ans le mois dernier, il l'avait trouvé changée. À vrai dire, ces derniers mois, elle changeait constamment. Dans un coin de son esprit, il se promit d'avoir une nouvelle discussion à ce sujet avec Mathilde, il le devait.

Il regarda quel livre avait été emprunté : c'était son avant-dernier. Pourtant, il lui avait bien spécifié de ne prendre que le premier, plus... romantique. Sa gorge se serra : il espérait vraiment que ce fut Louise et non sa fille qui l'avait. Il envoya un texto à la belle blonde pour confirmer, ce qu'elle nia avec un smiley moqueur, lui faisant comprendre par là qu'elle avait bien saisi les implications de sa réponse. Simon prit deux de ses livres, dans lesquels il y avait des passages beaucoup trop adultes pour sa fille et les emporta dans sa chambre. Au moins, elle ne lirait pas ceux-là.

La matinée avançait rapidement alors qu'il avait trop peu écrit à son goût. Il balançait entre des pensées salaces et des envies de frites. Il finit par se lever de son bureau et jeta un œil à son téléphone pour répondre enfin à Léo :

« Tu peux passer quand tu veux dans la semaine, je serai chez moi ».

Il reçut quasiment instantanément la réponse :

« Je peux passer dans un quart d'heure ? »

Simon s'inquiéta. Qu'est-ce qui pouvait justifier une telle précipitation ?

Quand Léo entra, Simon ne le reconnut pas. Il était décomposé. Il portait un jean délavé et une chemise débraillée. Aux pieds, des tongs d'un mauvais goût assumé et sur la tête une tignasse qui aurait bien eu besoin de quelques heures chez le meilleur coiffeur de la capitale. Ses yeux bruns habituellement rieurs étaient sombres et vides.

— Salut Léo ! Merde, ça va ?

Ce dernier haussa les épaules et entra dans la pièce sans attendre. Il attrapa la bière que Simon avait sortie pour lui et s'affala dans le canapé. Sans plus de préambule et après avoir englouti la moitié de la bouteille, il ajouta :

— C'est Sabrine. Elle me trompe.

Simon, dans son dos, eut un pincement au cœur pour lui. Il ne méritait pas ça. Il le rejoignit avec l'autre bouteille.

— Mince... Tu l'as appris comment ?

— Je l'ai vue. Avec un autre type. Du genre gros connard friqué. J'allais la rejoindre à son nouveau boulot pour lui faire la surprise et je les ai vus se bécoter. Il lui a mis la main au cul, c't'enfoiré !

— Aie... Elle sait que tu sais ?

— Non, je fais comme si, mais elle doit bien se douter. Je n'arrive pas à le cacher. Je ne sais pas si j'ai envie de pleurer ou de tout péter. Quatorze ans, putain ! Quatorze putains d'années ensemble et elle fout tout en l'air pour un bellâtre de fils à papa. Je... je sais pas, putain, pourquoi elle fait ça ?

La colère se mêlait aux larmes qui commençaient à couler sur les joues creusées de son ami. Il lâcha sa bouteille de dépit, elle se renversa sur la table basse et une partie sur le tapis gris. Simon la releva d'un mouvement de réflexe et fronça les sourcils. Il éleva la voix :

— Oh oh oh ! Doucement Léo !

Ce dernier haussa les épaules et baissa la tête, comme un enfant grondé par son professeur. De grosses gouttes d'amertume s'étiolèrent sur le tissu abîmé de son jean.

— OK, OK, alors écoute. Je sais que tu aimes aller droit au but avec moi, alors je vais en faire autant pour toi.

Simon prit une grande respiration et se lança dans une tirade qui allait lui faire mal, mais qui devait être dite :

— Ça ne sert à rien de se lamenter. OK, tu es sous le coup, tu es perdu, tu ne sais pas comment réagir, mais il va falloir que tu fasses des choix. Ils ne sont pas très nombreux.

— Tu veux que je fasse quoi ? demanda-t-il plaintivement.

— Je vais te dire déjà ce qui va se passer. De deux choses l'une : soit tu parviens à sauver ton couple et à vivre avec ça, soit vous vous séparez. C'est très con à dire, mais il n'y a pas d'autres choix. Tu peux lui dire que tu es au courant et la confronter directement, voir si vous pouvez en discuter entre adultes responsables. Ou alors tu ne dis rien et tu espères que ce n'est qu'une passade, tu vis avec, tu te dis que ça peut être bénéfique pour ton couple si ça peut redonner du piquant dans votre relation. Ou enfin tu la quittes, tout simplement.

Léo le regarda sans rien dire, incapable de prononcer le moindre mot. Simon continua.

— Tu sais, quatorze ans, comme tu l'as dit, c'est beaucoup. C'est ta première et unique femme, non ?

Il hocha la tête en signe de réponse.

— Ce n'est pas très étonnant, enchaîna Simon, elle a sûrement besoin de ça, de piment, de sensations, de se sentir femme. Peut-être qu'une fois que ce sera passé, vous serez encore plus soudés. Tu l'aimes toujours ?

— Évidemment ! Plus que tout !

— Est-ce que tu pourrais vivre avec son infidélité ?

— Je ne sais pas, franchement. Je n'ai jamais été jaloux, mais là, je ne comprends pas mes réactions, ça me tord le bide, je n'en dors pas de la nuit. Elle est là, juste à côté de moi, elle ne me laisse plus la toucher depuis des mois et je sais qu'un autre type profite de son cul, ça me fait tellement mal...

— Vous... vous ne faites plus rien depuis des mois ?

— Sept mois exactement. Mais je ne pense pas que ça ait un lien avec sa liaison, parce qu'elle a commencé ce boulot il y a seulement trois mois et c'est un de ses collègues apparemment.

— Mais... sept mois ? Pourquoi ?

— Je ne sais pas, on passe par une période creuse. Tu sais, en matière de sexe, on n'est pas aussi libérés que toi, ça a toujours été très classique, très sage, et de plus en plus espacé.

— Tu n'as jamais eu envie d'aller voir ailleurs, toi ?

Léo haussa les épaules :

— Je n'en sais rien, franchement. Je me suis posé la question. J'aurais presque envie d'avoir eu une maîtresse avant qu'elle ait vu ce mec, je me sentirais moins con.

— Tu sais, l'interrompit Simon, Sabrine a passé la trentaine, elle a aussi des besoins et si un homme lui a fait ressentir qu'il la désirait, c'est tout à fait... normal qu'elle ait craqué.

Léo grogna.

— Mais moi aussi, je la désire, putain ! Je lui dis tout le temps. Mais quand c'est moi, rien à faire, elle me balance une vacherie et va se coucher.

— Écoute, elle a peut-être simplement besoin de nouveautés. Et toi aussi.

— Tu proposes quoi ? Que j'aille me taper des filles pour essayer de l'oublier ? Mais c'est elle, que je veux, c'est la femme de ma vie, ça l'a toujours été !

Simon se pinça les lèvres. Il enfonça le clou :

— Ça l'était, jusqu'à maintenant, mais ça ne le sera peut-être pas toujours.

Léo se rembrunit et s'enfonça davantage dans le fauteuil.

— Voilà ce que je te propose, fit Simon. Tu rentres chez toi, tu lui dis ce que tu as sur le cœur, que tu sais pour l'autre type, que tu ne peux pas le supporter, que tu l'aimes, mais que tu ne peux pas accepter d'être près d'elle quand tu sais que ses propres pensées ne sont pas avec toi, que tu vas partir le temps d'une pause. Tu laisses bien entendre que cette pause peut-être longue et, si ça se fait, sans retour. C'est important. Il faut qu'elle prenne conscience qu'elle peut te perdre.

Léo l'écoutait avec attention. Il avait foi en son analyse. Simon espérait ne pas se tromper et continua :

— Tu viens habiter chez moi quelque temps. On te fera une place sur le canapé. Et puis moi je suis souvent chez Louise, donc ça devrait aller. Et tu profites de cette pause pour te libérer l'esprit, draguer, reprendre confiance en toi, te changer aussi, redonner des couleurs à tes plumes parce que là, désolé, mais tu ne ressembles vraiment à rien.

Léo sourit instinctivement et baissa le regard en secouant la tête. Il avait besoin d'entendre des paroles vraies et sans détour.

— Un mois, pas plus, au bout d'un mois, je pense qu'on verra si Sabrine veut revenir avec toi ou pas. Tu ne dois pas partir dans l'idée qu'elle reviendra, sinon tu vas te faire du mal, il se peut qu'elle trouve cette séparation arrangeante et qu'elle réalise qu'elle ne t'aimait plus.

Le sourire de Léo s'évapora. Simon savait qu'il lui faisait mal, mais il fallait extraire de suite la balle de la blessure sinon elle risquait de s'infecter. S'il lui laissait entendre que c'était une solution miracle et qu'il allait la retrouver, il savait qu'il courait un risque trop grand. Léo comprit et hocha la tête.

Quand son ami repartit, Simon se sentait fatigué, éreinté, peiné, mais aussi vidé d'une partie de son optimisme. Léo et Sabrine représentaient à ses yeux le couple parfait, l'exemple à suivre, et en quelques minutes, son idéal de vie commune s'était effondré. S'il connaissait un minimum leur couple, il savait qu'il ne survivrait pas à cette épreuve, mais il devait y croire. Tout en ne donnant pas de faux espoirs à Léo.

Et merde...

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