Juste une nuit

By AllisonRiley67

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Juste une nuit. J'ai peur. Il me fait peur. Depuis bien longtemps, j'ai éradiqué tout sentiment quelconque à... More

Prologue: Cinq ans plus tôt
Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10

Chapitre 6

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By AllisonRiley67




Je ne sais pas qui il est. Je ne sais pas pourquoi il est là. Je ne sais pas ce qui l'a motivé à me défendre face à ce pervers au risque d'en subir des représailles. Tout ce que je sais, c'est que sans lui, je serais enfermée entre six planches au fond d'un trou à l'heure qu'il est.

Il est mon miracle.

Je ne l'ai pas revu depuis le jour où je l'ai aperçu par la fenêtre de ma chambre d'hôpital. Ca fait deux semaines. Son odeur reste ancrée dans mes narines, sa voix si sexy et envoûtante ne cesse de se répéter dans ma tête, son visage hante mes pensées, ce qui provoque en moi des sensations nouvelles... et interdites. Je trimballe ce poids de culpabilité depuis la nuit où j'ai croisé ses yeux hypnotiques. J'ai su à cet instant que rien ne sera plus jamais pareil dans ma vie.

- A quoi tu penses ?

Je me tourne vers Kelly et lui souris. Nous sommes sur la route pour l'emmener à l'aéroport. Kelly, ainsi que quatre de ses collègues rejoignent les troupes de Médecins Sans Frontières afin de s'occuper et rassurer des futures mamans, au Botswana. Pour être honnêtes, je suis dépitée. Je me fais agressée et je sors à peine du coma que ma fiancée est envoyé en Afrique. Mais en même temps, je ne peux pas l'empêcher de faire son métier. Les pays sous développés tels que l'Afrique du sud ont besoin de gens comme ma chérie. Quant à moi, je suis une grande fille.

- Tu vas terriblement me manquer.

- Oh non, ne commence pas, me rabroue-t-elle. On avait dit pas de larmes. Ce n'est pas un adieu, je ne pars que pour un mois et demi, je reviens très vite, d'accord ?

J'acquiesce mais je ne peux empêcher une larme de couler. Ca ne fait pas un an que nous sommes ensemble et pourtant j'ai l'impression d'être avec elle depuis des années. Kelly gare la voiture sur le parking et je lui prends sa valise avant d'entrer dans l'aéroport bondé. Je ne la lâche pas d'une semelle, même lorsqu'elle se fait enregistrée. Elle retrouve ses collègues et des MSF avec qui elle va faire le voyage. Je me sens un peu de trop, là. Il parle médecine, tout ce que je ne comprends absolument pas. L'avion n'est que dans une heure et je suis frustrée de ne pas pouvoir profiter pleinement des dernières minutes avec ma copine alors je décide de prendre congé. Je ne me sens vraiment pas à ma place au milieu de ces scientifiques.

- J'y vais bébé, lui chuchoté-je à l'oreille alors qu'elle parle d'une césarienne programmée.

Kelly se tourne vers moi et me regarde l'air inquiet. Elle me comprend sans même que j'aie besoin de formuler une phrase. C'est ça qui fait que nous sommes si bien ensemble. Elle se retourne vers ses amis et leur lance.

- Je reviens, les gars.

Puis elle me tire par le bras et m'entraîne dans un long couloir.

- Où tu m'emmènes ?

- Te détendre. Je te sens un peu trop sur les nerfs.

Elle ouvre la porte des toilettes pour femmes, regarde sous les portes et, avant que je ne puisse lui dire quoi que ce soit, elle me plaque contre le mur, ses lèvres soudées aux miennes. Sa langue pénètre ma bouche sans ménagement et ses mains m'empoignent les seins. Le désir s'allume en moi comme on craquerait une allumette et je tire sur ses cheveux tout en rapprochant mon corps du sien. Nous gémissons à l'unisson. Mon string est déjà trempé pour elle. Elle me le retire et m'incite à m'asseoir sur le plan vasque. Le froid du marbre contre mon cul contraste avec la chaleur de mon corps. Kelly repart à l'assaut de ma bouche et je glisse ma main dans son pantalon. Elle est aussi humide que moi, putain. Je taquine son clitoris avec mon majeur et elle bande les muscles en gémissant. Puis elle retire ma main pour me pousser vers l'arrière jusqu'à ce que mon dos rencontre le verre du miroir.

- Laisse- moi prendre soin de toi, bébé, me murmure-t-elle de sa voix rendue rauque par le désir.

Tellement sexy ! Elle retire les boutons de mon chemisier blanc et tire sur mon débardeur en dessous afin de libérer mon sein et le prendre à pleine bouche. Je renverse la tête en arrière tout en m'appuyant sur mes coudes et gémis. Un frisson s'empare de moi. Je ferme les yeux afin de savourer cette douce torture au maximum. Kelly fait tourner sa divine langue autour de mon téton et ma chatte se liquéfie un peu plus lorsqu'elle pose sa main dessus. Je griffe la vasque à défaut d'avoir des draps sous les doigts.

- Ah putain... Kelly...

Je sais qu'elle adore que je prononce son prénom quand on fait l'amour. Elle insère deux doigts en moi et je me cambre. Bordel, c'est trop bon ! Son pouce titille mon clitoris et je me contracte en me mordant la lèvre pour éviter de crier. Même si cette situation est très excitante et bourrée d'adrénaline, je n'ai pas envie que l'on nous surprenne. Je baisse la tête pour admirer ma copine faire descendre ses baisers sur mon ventre dont elle a soulevé le débardeur, tournant autour de mon piercing. Elle passe au-dessus de ma jupe crayon noire pour embrasser ma cuisse sans retirer ses doigts de mon antre pour autant. Au contraire, elle les fait tourner plus vite en moi au fur et à mesure que ses magnifiques lèvres s'approchent de ma chatte trempée de désir pour elle.

Soudain tout se complique. Ce n'est plus les yeux verts bouteille de Kelly qui me regardent tout en me léchant goulûment la praline. Non, je vois des yeux saphir. L'image se transforme dans ma tête et c'est son visage à lui que je m'imagine entre mes jambes, sa barbe de trois jours frottant l'intérieur de mes cuisses brûlantes...

NON ! Il ne faut pas que je pense à lui. Je n'ai pas le droit, putain de merde ! Je ferme les yeux et me répète le même mot dans ma tête, tel un mantra: Kelly, Kelly, Kelly. Je me ressasse cette litanie encore et encore. Rien que Kelly. Ma copine. La seule que j'aime. Je suis pathétique. Avant, je n'avais pas besoin de me dire tout ça pour penser à Kelly. Aujourd'hui, j'ai l'impression d'être quelqu'un d'autre et je n'aime pas ça.

Ou plutôt j'aime ça, mais je n'aime pas ne pas en avoir le droit. Putain c'est tellement compliqué ! Je continue de me repasser le prénom de ma fiancée une bonne dizaine de fois dans ma tête avant de jouir dans un cri que nous sommes les seules à entendre. Du moins je l'espère. Kelly se relève et me sert un grand sourire radieux que je lui rends, quoiqu'un peu forcé, le mien. Je regrette tellement d'avoir pensé à lui, même si ça n'a duré que dix secondes !

- Ca va mieux ?

- Beaucoup mieux, réponds-je en l'embrassant. Mais normalement c'était à toi d'être stressée et à moi de te rassurer.

Je m'empare d'un papier essuie-mains et l'humidifie avant de le passer sur mon vagin qui se remet tout juste de ce puissant orgasme. Kelly se lave les mains.

- Tu sais aussi bien que moi que nous ne sommes pas comme les autres. Je ne peux pas me passer du goût de ta jolie chatte, alors dès que j'en ai l'occasion, j'en profite.

Je souris franchement en remettant mon string.

- Tu n'imagine pas à quel point je t'aime toi, lui murmuré-je en lui caressant la joue. Je me rattraperai à ton retour, je te le promets.

- Il y a intérêt, sourit-elle avec cette petite lueur malicieuse qui anime ses prunelles. Allez viens, ils vont se demander où on est passées.

Elle ouvre la porte et je la suis non sans jeter un dernier regard à la vasque en marbre, à l'endroit même où elle m'a baisé avec sa bouche. Putain ce que j'aime cette nana. Elle a le don de me faire retomber la pression quand il m'arrive d'entrer en panique.



Une dernière embrassade et je regarde ma copine entrer dans le couloir d'embarquement pour prendre l'avion qui l'emmène à des milliers de kilomètres de moi. Je n'ai pas pu m'empêcher de pleurer et elle aussi a les larmes aux yeux. Quarante cinq jours... Ca va être l'enfer...

Je rentre chez moi à contrecœur. J'ai un dossier à étudier concernant un braquage à mains armées, mais là, tout de suite, je n'ai qu'une envie, c'est décompresser. Et la seule chose qui me fasse du bien dans ces moments là se trouve dans mon atelier, cette petite cabane attenante à ma villa.  Je me gare sous le porche et fais un petit détour vers la salle de bains pour m'octroyer une petite douche. Kelly me manque. En sortant de la cabine, je décide de lui envoyer un SMS même si je sais qu'elle est dans l'avion et qu'elle ne le verra pas tout de suite. Vive les forfait internationaux sinon j'en aurais eu pour une blinde juste avec un message.

La maison est vide sans toi. Je t'aime.

Je suis angoissée à l'idée de passer mes prochaines nuits seule dans cette grande villa à moitié finie qui est mienne. Mon agresseur a été arrêté et mis en cellule mais je ne peux m'empêcher de revivre cette horrible scène dans mes cauchemars. Comme si le souvenir de Max ne me suffisait pas déjà. Et pendant quarante-cinq jours, je n'aurais pas Kelly pour me rassurer et me câliner en me convainquant qu'il ne s'agit que d'un mauvais rêve.

Je serai livrée à moi-même.

Terriblement seule.

Je décide de ne plus penser à cela et enfile un top blanc, ma salopette que j'utilise toujours pour peindre et mon blouson avant d'allumer l'halogène du jardin et sortir dans la pénombre de la fin d'après-midi hivernale. J'attrape la clé sous le pot de fleurs à côté et déverrouille celle-ci. J'appuie sur l'interrupteur mais rien ne se passe. Et merde, l'ampoule a dû griller. L'angoisse me tord les tripes et une scène de film d'horreur s'immisce dans mon esprit déjà fragilisé. La nunuche de service s'avançant lentement dans le noir pour voir la personne – ou la chose, ce qui est encore plus flippant – qui vient de faire ce bruit avant que la caméra ne se tourne vers son visage et qu'on voit le tueur juste derrière elle.

Mon cœur bat à tout rompre tandis que j'avance. Je voudrais faire plus vite, courir, même pour chopper ma lampe de poche mais je pourrais trébucher et me gaufrer monumentalement, ce que je voudrais éviter. Alors je tâtonne, en espérant que ce que je vois dans les films d'horreur ne reste que dans les films. Je trouve mon plan de travail ou je range mes pinceaux, mes palettes et mes pots de peintures. Maintenant il faut que j'arrive au bout pour attraper ma lampe dans le tiroir. Sauf que quelque chose bouge à mes pieds et me fait tomber. Je sais aussitôt qu'il s'agit d'un corps et des bras s'enroulent autour de moi. L'angoisse s'empare de moi à la vitesse de la lumière et je me mets à hurler. Putain, c'est lui. C'est ce gros pervers, ils l'ont libéré et il va finir ce qu'il a commencé ! Non, non, non, ce n'est pas possible ! L'homme me retourne sur le dos, me plaque sa main sur la bouche pour m'empêcher de hurler comme une furie et il m'écrase de tout son poids pour me bloquer tandis que je gesticule comme une possédée.

- Hey, calmez-vous, je ne vais pas vous faire de mal.

Je cesse tout de suite de bouger. Cette voix. Je la reconnaîtrais entre mille. Je ne le vois pas mais je sais que c'est lui.

- Décidément, je vais commencer à croire que vous ne pouvez plus vous passer de moi.

Je comprends qu'il fait référence au fait que nous sommes dans la même position que la première nuit où je l'ai rencontré. Aussitôt, la chaleur qui commence à m'être familière envahit mon bas-ventre et les tétons. Je sens quelque chose de dur sur ma cuisse. Faites que ce soit son téléphone !

- Est-ce que vous arrêterez de me frapper si je vous lâche ?

Ne pouvant pas parler à cause de sa main sur mes lèvres, je me contente de hocher la tête et il sent le mouvement car il finit par me lâcher. Je le sens se lever et une seconde après, la lumière enveloppe ma cabane. Je me relève tant bien que mal et regarde mon sauveur avec des yeux ronds.

- Comment avez-vous fait ? Ca fait des lustres que cette lampe ne fonctionnait plus ! m'étonné-je en désignant l'objet posé sur mon établi.

Il se contente de hausser nonchalamment les épaules.

- Il paraît que j'ai un bon doigté.

Je rougis instantanément lorsque mes pensées dérivent vers un autre genre de doigté. Putain, Lana, ton esprit est sacrément déplacé, tu rouilles, ma fille ! Je crois qu'il vient de se rendre compte du double sens de sa phrase car il rit avant de se rattraper.

- Enfin, je bricole, quoi. Je m'appelle Alex, se présente-t-il en me tendant une main à l'apparence calleuse.

Je considère cette main avec suspicion. Je ne connais rien de ce mec, après tout, à part qu'il est chevalier servant à ses heures perdues. Mais, à en juger par son T-shirt blanc devenus noir par endroits, son jean troué, ses boots usées et sa veste en cuir déchirée, il n'a pas l'air du mec qui sort de chez lui. Sans compter que je viens de le surprendre en train de pioncer par terre, dans mon atelier.

- Qu'est-ce que vous me voulez ? bougonné-je.

Sa main retombe sur sa cuisse. Certes, il m'a sauvé des sales pattes d'un obsédé sexuel mais cela ne veut pas dire qu'il est net, lui aussi. Il a peut-être quelque chose derrière la tête. Il se frotte l'arrière du crâne en soupirant, l'air gêné. En dépit de son allure pas très fraîche, il est très beau. Ses cheveux bruns hirsutes lui donnent un petit côté rebelle que j'aime bien.

- J'ai besoin de vous, mademoiselle Jenkins.

Je me raidis.

- Comment... comment connaissez-vous mon nom ?

- Vous avez fait libérer un innocent de prison alors que vous n'étiez qu'une stagiaire encore en étude de droit. Ce mec, ça faisait quinze ans qu'il était enfermé pour un crime qu'il n'a pas commis et vous avez démasqué le vrai coupable. Vous êtes devenue célèbre dans le monde du droit pénal avec cette affaire. Votre expérience a fait le tour des journaux d'Indianapolis.

Je me souviens très bien de cette audience. Une famille massacrée et le jardinier accusé. L'affaire datait de 2000 mais j'ai réussi à convaincre mon mentor, Amanda Conwell, de ressortir le dossier car j'étais persuadée qu'il était innocent. Ca a mis trois mois mais j'ai finalement réussi à réunir toute les preuves qui innocentaient ce pauvre sexagénaire. Je risquais gros à l'époque, je n'étais qu'une étudiante. Mais Conwell m'a fait confiance et j'ai finalement démasqué le vrai tueur qui s'avérait être le demi-frère du père, amoureux de sa belle-sœur. Il n'a pas accepté qu'elle épouse son frère alors il les a tués dans leur sommeil avec leurs deux enfants. Une enquête qui m'a particulièrement bouleversée et dont je suis fière d'avoir résolu, néanmoins. Je suis devenue « l'avocate qui sauve des vies ». Aujourd'hui, j'ai mon propre cabinet et j'ai fait incarcérer plus d'une cinquantaine de criminels.

- Et pourquoi avez-vous besoin de moi ?

- Si je vous le dis maintenant, vous risqueriez de fuir, me répond-il. S'il vous plaît, Eleanore. Je vous ai sauvé la vie, l'autre soir.

Je serre les dents à ce souvenir douloureux. Mais il a raison. Sans lui je ne serais pas là. Et pour une raison que j'ignore, ça me fait plaisir de le voir en face de moi après deux semaines sans l'avoir croisé.

- Vous dormez ici depuis longtemps ?

Il hausse de nouveau les épaules.

- Quelques semaines. J'ai perdu ma maison et ma voiture n'est pas super spacieuse pour mes grandes jambes.

- Ok. Merci d'éviter de me renverser mes pots de peintures en dormant.

Puis je sors de l'atelier en espérant que mon corps finisse par se refroidir avec la brise glaciale de la soirée. Finalement, j'ai perdu toute envie de peindre. Je vais plutôt me pencher sur mon dossier en cours. Le procès de cette femme est dans une semaine.

Mais là encore je ne parviens pas à me concentrer sur mon affaire tout en dînant. Je pense à cet Alex. Un dilemme s'impose à moi. Il dort comme un chien dans mon atelier alors qu'il pourrait prendre un bon bain et dormir dans un grand lit d'une des quatre chambres d'amis. Mais en même temps, vu mon expérience avec les hommes, j'ai peur de lui. Je ne connais rien de lui et, d'après ce qu'il m'a dit, il a un lourd passé. Il aurait pu profiter de la situation, il y a deux semaines, me susurre la voix de ma conscience. C'est vrai. Il aurait pu participer au festin avec ce gros porc qui a tenté de me violer. Or, il m'a sauvé. Je lui dois une fière chandelle. Dans un élan de courage, j'enfile ma parka et m'aventure dehors pour rejoindre mon atelier. Je toque à la porte timidement en priant pour que cet homme soit vraiment honnête. La porte s'ouvre sur Alex. Il a l'air épuisé le pauvre.

- Vous avez un problème ? demande-t-il. J'espère que vous ne venez pas pour me mettre à la porte, je n'ai nulle part où...

- Vous avez dit que vous étiez bon bricoleur ? le coupé-je.

- Euh... je me débrouille. J'étais maçon.

- D'accord. Je vais vous aider parce que vous m'avez sauvé la vie. Et je peux vous offrir le gîte et le couvert si vous acceptez de finir cette foutue véranda qui prend la poussière depuis des semaines. J'ai le matériel mais pas la main d'œuvre.

Un sourire lumineux éclaire son beau visage. J'ai l'impression d'être le Père Noël et d'avoir offert le nouveau vaisseau spatial dernier cri à un gamin de dix ans.

- Je n'aurais pas rêvé mieux. Merci.

- C'est moi qui vous remercie de m'avoir sorti de cette... situation. Je vous dois au moins ça.

Au fond, je suis vraiment contente de lui venir en aide. J'ai toujours été altruiste et, de plus, ce mec a quelque chose. Il est... différent. Attirant, aussi. Putain si je n'étais pas autant dégoûtée de la gente masculine et si je n'étais pas avec Kelly, je lui sauterais dessus. Kelly. Elle doit sûrement avoir atterri et je lui ai promis de l'appeler.

- Suivez-moi, lui dis-je.

Il obtempère et je ferme l'atelier derrière moi.

- Au fait, comment avez-vous réussi à entrer si la porte était verrouillée ? m'enquiers-je tandis que nous marchons le long de l'allée pour entrer dans la maison.

- Hum... j'ai crocheté la serrure. Mais je ne vous ai rien volé, je vous jure, plaide-t-il en levant les mains. Je voulais seulement me mettre à l'abri.

Je le fais entrer dans ma demeure et il admire l'espace avec des étoiles plein les yeux. C'est vrai que je suis plutôt fière de cette maison. Mais je suis du genre modeste aussi je l'invite à aller jusqu'à la cuisine.

- Vous voulez boire quelque chose ?

- Je donnerais n'importe quoi pour une bière.

Je sors deux bouteilles du frigo et les décapsule. Il en boit la moitié comme s'il avait traversé le Sahara sans une goutte d'eau.

- Merci pour tout.

- Ecoutez, je vais vous avouer que j'ai une sainte horreur des hommes. Je pense que vous devez vous en douter après ce que vous avez vu l'autre jour dans ma chambre, dis-je et il se met à rougir.

- Oui, je suis désolé, je ne suis pas un voyeur mais je passais par là et...

- Je m'en fous, mens-je car en fait, je me sens excitée rien que d'y repenser. Tout ce que je veux dire, c'est que je ne fais ça que parce que vous m'avez sauvé la vie. Quand tout sera fini, nous reprendrons notre vie chacun de notre côté, pigé ? Je vous donnerai un salaire en plus pour que vous puissiez trouver un appartement et un autre job.

Nous buvons notre bière en silence. Son regard sur moi me donne des frissons. Je repense à cet après midi, dans les toilettes de l'aéroport avec Kelly. Au fait que j'ai pensé à lui en train de me baiser pendant un court instant. Mon ventre se contracte à cette idée et je la chasse de ma tête.

- A quoi pensez-vous pour rougir à ce point ?

- A rien. Venez je vais vous montrer votre chambre et vous installer des draps propres.

Il me suit jusqu'à l'étage et je sens son regard sur mon cul tandis que nous montons l'escalier en verre. Je l'emmène jusqu'à la chambre à l'autre bout de la mienne. Je n'ai pas encore assez confiance en lui pour l'installer dans la chambre attenante. Je m'arrête au placard dans le couloir pour y attraper des draps et une couverture avant de lui montrer son nouvel espace de vie.

- Voilà. Ce n'est pas le grand luxe mais...

- Ca l'est pour moi, m'interrompt-il. Merci encore.

- Si vous voulez vous rafraîchir, la salle de bains est là-bas, dis-je en montrant le milieu du couloir. Si vous avez faim, vous trouverez du poulet et des pommes de terre dans le frigo, vous n'aurez qu'à les réchauffer au micro-onde. Autre chose ?

- Pourquoi avez-vous peur des hommes ?

Sa question me désarçonne. J'ouvre la bouche pour lui répondre, la referme.

- Je... Ca ne vous regarde pas. Contentez-vous de me finir ma véranda. Et ne vous risquez pas à crocheter la serrure de ma chambre, je dors avec une batte de base-ball.

- J'ai encore des souvenirs de celle-là, rit-il. Je ne vous embêterai pas.

Puis je pars en direction de ma chambre afin d'appeler ma copine. Elle répond à la deuxième sonnerie.

- Tu sais que tu me manques ? Toi et ta délicieuse petite chatte ?

Je ris. C'est du Kelly tout craché, ça.

- Tu nous manque à nous aussi, réponds-je. Ton vol s'est bien passé ?

- Si on fait abstraction du vieux qui n'a pas arrêté de faire tomber sa tête sur mon épaule en ronflant comme un buffle à mon oreille, tout s'est bien passé. On vient de rentrer sur le camp. Et toi, est-ce que ça va ?

J'ouvre la bouche pour lui parler d'Alex et de notre marché mais je me ravise. Je n'ai pas envie qu'elle s'inquiète qu'un homme – un inconnu, de surcroît – squatte chez moi. Moi-même je n'arrive pas à y croire. Il y a encore deux semaines je baissais les yeux chaque fois que je croisais un porteur de pénis dans la rue.

- Tout baigne, réponds-je finalement.

Nous parlons de la pluie et du beau temps, établissons un projet de vacances en amoureuses puis il est l'heure pour moi de raccrocher.

- Bonne nuit, chérie. Je t'aime.

- Bonne nuit, bébé. Dors bien, je t'aime aussi, me dit-elle.

Je raccroche et m'asseois sur mon lit, pensive. Kelly me manque terriblement. Je regrette de ne pas avoir pu faire le voyage avec elle, mais en même temps, je ne peux m'empêcher d'être contente à l'idée qu'Alex passe la nuit chez moi. Aaargh, ce que je peux être bête ! Je m'en fous de ce mec. Je me fous de tous les mecs. Je retire ma salopette pour me mettre à l'aise dans mon pyjashort licorne – c'est tendance, les licornes en ce moment – et me coucher quand je me rends compte que j'ai oublié de prendre mon médicament pour dormir. Médicament qui se trouve dans l'armoire à pharmacie, dans la salle de bains... où Alex prend une douche... Je fais les cent pas dans ma chambre en attendant d'entendre la porte s'ouvrir pour pouvoir y aller. Mais après dix minutes, rien ne se passe. Il se branle ou quoi ? Oh et puis merde, les bites ne m'intéressent plus, après tout !

Je marche jusqu'à la porte de la salle de bains. Je n'entends rien à l'intérieur. Merde, il s'est endormi dans son bain ? Au moment où je m'apprête à frapper, la porte s'ouvre et ma mâchoire manque de se décrocher en découvrant Alex, tout juste sorti de la douche, encore humide et seulement vêtu d'une serviette nouée autour de ses hanches. Mes yeux parcourent ce corps à damner une sainte, descendant sur ses tablettes de chocolat qu'on voudrait lécher des heures entières, son V d'Apollon qui descend...

- Vous vouliez quelque chose ?

Je relève les yeux et rougis davantage comme si je venais de me faire prendre en flagrant délit. C'est le cas, ma chérie, se moque ma conscience. Un sourire ravageur étire sa bouche et je déglutis en tentant de calmer mon cœur fou.

- Non... enfin si, je... médicament... dormir...

Est-ce qu'on peut avoir l'air plus stupide que moi ? Non. Je me mets des gifles intérieurement. Putain, il va croire qu'il m'intéresse, ce qui n'est pas le cas. Pas du tout...

- Est-ce que je peux passer ? demandé-je, reprenant mon aplomb.

- Bien sûr, fait-il en se décalant de côté pour me laisser entrer. Je voulais vous demander si vous pouviez... enfin, laver mes affaires. Si ça ne vous dérange pas, bien évidemment, sinon je le fais. Mais je n'ai pu récupérer que ça et...

Je me précipite vers lui pour lui prendre ses vêtements des mains mais il me retient. Je me tourne face à lui, il a l'air perplexe et... inquiet ?

- Est-ce que ça va ?

Je laisse planer un silence pesant entre nous, hypnotisée par son regard bleu dans lequel on pourrait se noyer. Il y a encore un mois je ne savais même pas que cette couleur existait.

- Très bien.

Puis sans rien ajouter de plus, je sors de la salle de bains pour aller lancer une lessive au sous-sol. Puis je remonte pour regagner dans ma chambre. Dissimulée au fond de mon dressing, j'extirpe la grande boîte que je n'ai pas ouverte depuis des années. Je l'ouvre et retiens un sanglot en voyant la photo de mon frère jumeau et moi. Nous n'avions pas plus de quinze ans sur ce cliché. Quentin est mort en Irak en 2009. Nous avons perdu nos parents dans un accident de voiture peu de temps après mon mariage, en 2008. Il était tout ce qui me restait. Je m'empare de sa chemise à fleurs jaune orangée et la porte à mon nez. Elle n'a plus son odeur depuis le temps mais elle me rappelle des souvenirs.

- Il devrait être jeté en prison, lui ai-je dit tandis que nous marchions sur la plage sous un beau soleil d'été pendant un de ses permissions.

- Qui ça ?

- Le mec qui t'a vendu cette horrible chemise.

- Dans ce cas, ton coiffeur mérite la peine de mort.

Je ris en revenant à l'instant présent. Sacré Quentin, il trouvait toujours un moyen de me vanner sur mes cheveux blonds frisés de l'époque. Nelly Olsen, il m'appelait. Ma tante avait gardé quelques unes de ses affaires qu'il avait oubliées chez elle une fois. Aujourd'hui, je les ai récupérées. Je me lève après avoir pris un pantalon et un caleçon en plus et me dirige vers la salle de bains. Alex est toujours en serviette et je manque de défaillir.

- Tenez, dis-je en lui tendant les habits propres. Désolée, je n'ai que ça en fringues d'homme mais je pourrais aller vous chercher quelques trucs demain à la première heure.

Je lui pose les affaires sur la vasque et m'en vais aussi sec. Une fois dans ma chambre, en sécurité, je pose une main sur ma poitrine en tentant de faire ralentir mon cœur devenu dingue.

Je ne sais absolument rien de ce mec. Mais putain il me fait de l'effet !

Je ferme ma porte à clé avant d'éteindre ma lampe de chevet et de me coucher. Puis je fixe la porte en me souvenant qu'il sait crocheter les serrures. Je me relève et fais glisser la chaise de ma coiffeuse sous la poignée avant de me remettre sous ma couette.

Cet homme m'a peut-être sauvé la vie, mais on n'est jamais trop prudent. Puis je ferme les paupières, m'attendant à ce que mes éternels cauchemars reviennent me hanter, comme toutes les nuits depuis cinq ans.

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