Vendredi 3 novembre 2021
Mexico, 14h40
PDV de Charles
Si il y a bien une chose qui est caractéristique du circuit de Mexico, à part les centaines de drapeaux à l'effigie de Checo, c'est bien la chaleur. L'asphalte frôle les 50 degrés, et ça tout le week-end, pour chacune des séances. Pourtant, quand en face de moi, je croise le regard sérieux de mon physio, je ne suis plus sûre que ce soit la chaleur qui me donne des sueurs.
Moi : Qu'est-ce qui se passe ? Je comprends à son visage fermé que c'est vraiment sérieux.
Andrea : Il y est entrain d'avoir un mouvement de foule dans les paddocks, mon sang ne fait qu'un tour, je comprends très rapidement ce qu'il s'apprête à me dire. Juste à la sortie des terrasses Ferrari, je viens d'envoyer la sécurité. Ça serait autour de Julia et ton fils, il y a Joris avec eux
J'arrache mon casque de ma tête, le balance au fond des stands et me sépare le plus rapidement possible de mes gants. Mon rythme cardiaque s'est accéléré, ma respiration est plus lourde. Je ne peux m'empêcher de penser à autre chose que ce qui est en train de se passer de l'autre côté de ce mur.
Les agents de sécurité arrivent en courant vers moi, ce qui m'agace déjà, sachant qu'ils devraient être là-bas. Je traverse les stands en courant suivie de Andrea et des agents. Mais je ne tarde pas à percevoir l'énorme rat de marée humain à quelques mètres de là.
Mes muscles sont congestionnés et je sens un mélange de peur et de colère créé quelque chose de mauvais à l'intérieur de mes tripes. Les agents de sécurité bousculent les nombreux journalistes sur notre chemin alors que je tente tant bien que mal de garder le silence.
Je finis par entendre la voix de Joris, qui semble hurler sur les journalistes, même si je n'arrive pas trop encore à entendre ce qu'il dit. J'ai l'impression que mon cœur va exploser dans ma poitrine. Je déteste ça. Je sais que Julia doit être paniquée et que Jules doit être terrorisé. Et je me déteste à ce moment-là pour ne pas avoir été là.
Charles : Écartez-vous y a rien à voir
Ma voix attire l'attention des derniers journalistes qui semblent se trouver au cœur de l'action. Ces derniers se retournent pour braquer leurs caméras sur moi, et les agents de sécurité ont le réflexe de directement les bousculer pour les éloigner. En quelques minutes ou peut-être secondes, la foule commence à se dissiper grâce aux nombreux agents de sécurité de toutes les écuries qui se sont regroupés pour nous venir en aide.
La foule s'éparpille, mais mes yeux sont bien trop occupés à chercher la source de mon angoisse. À cet instant, la seule chose que je veux, c'est croiser ce regard azur qui est devenu le plus important dans ma vie. Mais je ne le vois pas.
Par contre, je finis par apercevoir celui de Joris. Je perds tout mon sang-froid et bouscule toutes les personnes devant moi, sans attendre que les agents de sécurité s'en occupent. Mon regard s'assombrit, mes muscles sont au bord de la crampe et mes nerfs à vifs. Ma colère ne fait que redoubler lorsque je perçois les pleurs paniqués de mon fils.
Je récupère un second souffle lorsque j'aperçois finalement Jules dans les bras de mon ami. Ce dernier camoufle sa tête, comme je lui avais demandé. Cependant, de l'autre côté, il retient ma copine à bout de bras qui semble avoir perdu connaissance sous le stress de la situation.
Joris : Ah putain bah t'es là
J'emprisonne de mes bras la taille de ma monégasque et sers son menton entre mes doigts. Je secoue légèrement sa tête en répétant son prénom pour qu'elle revienne à elle. Au bout de quelques secondes, ses yeux se rouvrent, même si c'est pupilles sont complètement dilatées.
Moi : C'est fini mon ange, je lui chuchote au creux de l'oreille avant de passer son bras autour de mon cou. Putain, mais c'était quoi ça ?
Joris : J'en sais rien mec j'ai pas compris. C'est aller super vite. En quelques secondes, on pouvait même plus avancer
Je ne relève pas sa réponse, trop occupé à m'assurer que les yeux de Julia restent ouverts. L'équipe médicale de la Scuderia s'agite à l'entrée du motor-home et prend le relais en emmenant Julia dans la salle de soins. J'ai surtout peur pour son cœur, elle est beaucoup trop fragile, et ça, personne ne le sait, c'est ce qui me rend fou.
Je récupère mon fils dans les bras de mon ami et le berce pour calmer ses pleurs. Ma colère n'est toujours pas redescendue, même si en temps normal, l'innocence de mon fils fait un bon travail. Je suis tellement révolté par ce qui vient de se passer. Ça aurait jamais dû arriver et je n'en veux pas du tout à Joris pour ça, il est vraiment pour rien.
Moi : Ça va mon bébé c'est terminé, je chuchote à l'oreille de mon fils en le berçant dans mes bras qui commence peu à peu à se calmer. Je suis là maintenant
J'embrasse à nombreuses reprises le front de Jules. Mais au final c'est peut-être plus pour me rassurer moi que lui. Mon rythme cardiaque ne s'est toujours pas ralenti, continuant à affluer une quantité trop importante de sang dans mon corps. Je suis tellement en colère.
Joris : Vraiment je sais pas où me mettre, Charles, je suis vraiment désolé. Je sais que tu m'as fait confiance et vraiment je suis désolé je sais pas comment ça a pu se passer.
Moi : Je t'en veux pas Jo, vraiment, je baisse la tête pour admirer l'innocent visage de mon fils qui commence à tomber dans les bras de Morphée. C'est juste que, avec tout ce qui se passe en ce moment, je suis entrain de devenir parano.
Joris : Ouais je comprends et c'est normal. Tu veux protéger ta famille
J'hoche la tête, l'esprit déjà dans la pièce d'à côté. J'ai soudain un moment de réalisation, où j'ai peur de ce qu'il pourrait se passer de l'autre côté de ce mur. Déjà que rien tout ça n'aurait dû arriver.
Je garde mon fils, serré contre mon torse, et traverse le motor-home jusqu'à la salle de soins. J'ouvre la porte sans toquer, je n'ai pas de temps à perdre.
Lorsque j'abaisse la poignée et que la porte s'ouvre, pendant quelques secondes, je regrette de l'avoir fait. Au fond, je sais que Julia n'a rien de grave, pourtant, j'ai parfois l'impression d'être tombé amoureux d'une bombe à retardement. Elle n'est pas en parfaite, santé, ce n'est pas nouveau , mais je suis tombé bien trop amoureux de cette femme pour en avoir quelque chose à faire.
Je prends soin de refermer la porte derrière moi, conscient que ma brune ne serait pas au fait de divulguer ces informations à toute l'équipe. La main posée dans le dos de mon fils pour le maintenir, mes yeux sont eux suspendus à ce regard azur, à peine revenu à la réalité.
Moi : Elle a un syndrome du QT court. Elle a une grosse insuffisance cardiaque, ne lui donnez pas n'importe quoi.
Fabrizio, le médecin de l'équipe qui me connaît depuis mes débuts, m'adresse regard qui me fait très bien comprendre que je peux avoir confiance en lui. Ses yeux me montrent aussi que je me suis trahi, je suis certain qu'il sait pour Julia et moi. Mais mon secret est bien gardé avec lui, il partira bientôt à la retraite après des dizaines d'années de bons et loyaux services dans l'écurie.
Une fois mon information expédiée, je ressors de cette salle bien trop oppressante pour moi. Je déteste la voir dans cet état, même si je sais que ce n'est rien.
La tête des infirmiers et du médecin en charge de ma copine se sont complètement décomposés. Ils ne peuvent rien dire évidemment, mais mon information était bien loin de ce qu'ils pouvait imaginer. Forcément.
Le sang toujours ébouillanté par la rage, je me dirige vers les agents de sécurité. En temps normal, j'en ai seulement un avec moi qui me suis pendant les grands prix. Là, j'en ai embauché deux de plus, qui sont uniquement censés s'assurer de la sécurité de Julia et Jules. Mais visiblement ça n'a pas marché.
Moi : Je crois que j'ai pas été assez clair , je marque une pause pour replacer mon fils dans mes bras. Je vous ai engagé comme agent de sécurité, vous êtes pas là pour papillonner
toute la journée. L'erreur est humaine OK, je vous laisse le bénéfice du doute. Si jamais quelqu'un s'approche à nouveau, ne serait-ce d'un seul cheveux de mon fils ou Julia vous êtes virés.
Pierre: Qu'est ce qu'il s'est passé ?
Le français entre en trombe dans le motorhome Ferrari ignorant complètement son physio qui lui court après. Il porte encore sa combinaison, tout comme moi, et son souffle est frénétique. Il regarde chaque recoin de la pièce affolé et il finit par s'approcher de moi quand les agents disparaissent. Son expression devient tout de suite moins inquiète quand il voit Jules dans mes bras.
Pierre: C'est quoi ce bordel ? Elle est où Julia ?
Moi: Il y a eu un attroupement, je réponds simplement pas encore assez calme pour refaire l'histoire
Pierre: Mais t'étais pas avec elle ? Il se tourne vers Joris
Joris: Si si j'étais là, les journalistes nous sont tombés dessus d'un coup, on a été piégé en 3 secondes
Pierre: Et Ju ? Il continue de chercher sa meilleure amie
Moi: Elle va bien, elle a juste fait un petit malaise t'inquiètes. Je reviens, j'ai 2 mots à toucher à la FIA
À contre coeur, je tends mon fils à Joris, que je fais promettre de ne pas mettre un seul pied dehors. Et je ressors en furie du motorhome Ferrari talonné par mon meilleur ami français.
Rien de tout ce qui s'est passé n'aurait jamais dû se produire, et encore moins sur un circuit. Je suis extrêmement remonté et je compte bien le faire savoir à la FIA et à tous les organisateurs de ce GP de près de loin.
J'en profite pour arracher les scratches de ma combinaison et la nouer à ma taille sur le chemin. Nous fonçons directement vers notre objectif, sans faire attention aux quelques journalistes maintenant mal à l'aise sur les bords du paddock.
Les muscles toujours compressés par la colère, je déboule en furie dans les bureaux de la FIA et me dirige directement vers le seul élu présent sur le circuit, Robert Reid. Je frappe 2 fois puis entre sans me gêner.
Moi: Je vous dis pas bonjour je vous ai déjà vu
Je m'accorde moi-même le droit de rentrer et pose directement mes mains sur son bureau. L'anglais semble visiblement surpris de ma présence car il pose rapidement son stylo et arrête toute autre activité.
Robert: Charles, Pierre, il hoche la tête pour le saluer, que me vaut votre visite aujourd'hui ?
Pierre: Une visite ? On a des têtes de touristes ? Si j'avais pu j'aurai enfoncé votre porte avec un bélier
Robert: Alors, les garçons, on se calme, asseyez vous on va discuter
Moi: Je suis pas là pour discuter. Je suis là pour remettre les choses au clair.
Robert: Et bien dit moi, il croise les bras en attente de mes explications
Moi: Ce qui vient de se passer en bas, c'est une honte, je pointe le doigt vers ma fenêtre en haussant la voix. Votre métier c'est de veiller à la sécurité de tout le monde et que ce genre d'incidents n'arrivent pas
Robert: Oh oui, ca. On m'a prévenu, je suis désolé que ton petit ait été mêlé à tout ça. Mais je ne...
Moi: Non non, pas de mais. Votre métier c'est de vous assurer des week end confortables, que ce soit sur la piste ou dans les paddocks. Alors j'en ai rien a foutre de vos excuses à 2 balles. Vous me reglez ce problème, peu importe comment, mais vous le faites
Pierre: Il y avait un putain de bébé dans cet attroupement. Vous attendez qu'il y ait quelqu'un qui crève pour faire quelque chose dans cette association de clown ?
Robert: Je comprends votre colère et j'aurai réagis comme vous. Je ne sais pas comment c'est arrivé, mais je vais m'assurer que jamais ça ne recommencera
Moi: Y a intérêt. Je suis bien assez gentil pour pas aller me plaindre aux décisionnaires au dessus de vous
Le député de la FIA nous regarde, ne sachant pas quoi nous dire de plus. J'espère pour lui que ça n'arrivera plus. J'aurai aucune pitié avec lui si ça venait à se reproduire. Après un regard échangé avec mon ami, nous tournons les talons et sortons de son bureau.
Pierre: Oh et j'oubliais, il se retourne, oubliez pas d'ouvrir vos fenêtres ça sent les chiottes publics dans votre bureau. Ça vous aidera peut être à nettoyer la merde que vous avez devant les yeux après tout
Le français claque la porte et je reste de marbre. Lui poursuit son chemin comme si rien de c'était passé.
Moi: Pas nécessaire
Pierre: Mais très thérapeutique. Tu devrais essayer
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