Divine Darkness, Tome 1 : Une...

By AnnaTriss

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Une offrande de chair et de sang destinée au plus dangereux des dieux... Danaé est la fougueuse princesse reb... More

Avant-propos et présentation de l'univers
Partie I : Le baiser du soleil
Prologue : Humeur massacrante 2/2
Chapitre 1 : Le Renard 1/2
Chapitre 1 : Le Renard 2/2
Chapitre 2 : Ténèbres intrusives
Chapitre 3 : Un souffle en perdition
Annonce importante : contrat d'édition
Cover reveal Divine Darkness + dates de sortie + résumé

Prologue : Humeur massacrante 1/2

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By AnnaTriss

Note de l'auteure : Le prologue étant long, je l'ai scindé en 2 parties. Je les publie en même temps pour démarrer Divine Darkness. Je ferai pareil pour le chapitre 1, long aussi. Bonne lecture !

***************************

Autant vous annoncer la couleur noire, ce n'est pas moi le héros de cette histoire.

Je ne suis que l'humble chroniqueur aux oreilles pointues plébiscité par son seigneur pour ouvrir le bal des ténèbres. Ainsi, je narrerai les évènements qui resteront gravés dans les mémoires des trois ethnies de notre monde, les Faedras, les Polytres et les Éphémères. En tant qu'historien, je ne serai guère le protagoniste du trépidant récit auquel je vais initier les témoins privilégiés élus par la providence...

Autrement dit, vous, bande de petits veinards.

Oubliez les légendes atrophiées qui gravitent autour des Contrées Faedriques. Tout ce qui émergera de ma bouche sera criant de vérité... y compris les mensonges qui vibreront dans ma gorge, mais que je m'engage à vous rapporter avec une scrupuleuse authenticité.

Mon nom est Elynrid. Je suis un elfe de nuit qui œuvre à la cour du Royaume Obscur, au service de Night depuis des siècles. Je l'assiste dans des tâches quotidiennes à la moralité discutable, lorsqu'elle n'est pas inexistante. Mais ce n'est là qu'un détail insignifiant.

Ici, nous connaissons tous le nom du dieu qui provoque une avalanche de frissons chez pléthore de guerriers vétérans. En effet, Night est le Faedra Diessenciel de la Nuit et des Ténèbres, l'être le plus craint et dangereux de l'Anversé.

C'est lui le héros de cette épopée, que l'on pourrait apparenter à un sombre conte de fées... bien que les Polytres d'autres royaumes le qualifieraient d'antihéros. Toutefois, je vous conseille de vous méfier des rumeurs. Quelquefois, elles s'avèrent traîtresses, voire illusoires, surtout lorsqu'elles sont proférées par nos sempiternels détracteurs, les sbires de Sun, surnommés les Solaires.

Je ne suis qu'un personnage secondaire, même si mon rôle au sein de cet ensemble n'est pas anodin. Cependant, ma ponctualité est irréprochable. A contrario, malgré sa position centrale, mon maître adore arriver bien après tout le monde pour susciter le désir et soigner ses entrées spectaculaires. Vous allez le constater vous-mêmes dans la scène introductive que je vais aborder pour vous mettre en condition... ou vous terroriser, au choix.

Puis la véritable histoire – non le mythe – de la femme Éphémère dont le nom est incisé sur toutes les lèvres des Polytres, car elle est étroitement liée aux Faedras, vous sera racontée.

Mais avant d'inaugurer le bal des dieux, une précision...

La Cour Obscure gouvernée par Night n'est pas faite pour les âmes sensibles, encore moins pour les esprits faibles.

Seules les créatures les plus fortes des Contrées peuvent survivre et prospérer sur ces terres perpétuellement plongées dans les ténèbres nocturnes.

***

La soirée de prestige que j'avais organisée à la demande du propriétaire des lieux battait son plein au cœur des Palais Suspendus qui dominaient la nuit éternelle.

Le Sanctuaire des Étoiles était le théâtre d'une célébration qui aurait fait rougir les adeptes de Sun. Je n'y participais pas, puisque j'en étais le maître d'œuvre, mais cela ne m'empêchait pas de me rincer l'œil. J'aimais regarder, analyser, spéculer, anticiper, prédire, calculer. Je personnifiais l'œil et la main de Night, qui se fiait plus à moi qu'à son propre frère. Voilà pourquoi j'étais si bien placé pour relater cette palpitante aventure dont je présentais les balbutiements jouissifs.

Du haut de ma loge, même sans contribuer activement à la fête, je m'amusais comme un bambin à son anniversaire. Accoudé à la balustrade, je laissais mes yeux de lynx inquisiteur parcourir les convives en bas avec une avidité impatiente qui ne se reflétait pas sur mes traits marmoréens.

La Fontaine de Nuit flattait ma vue de sa myriade de splendeurs, éclairée par le croissant de lune nacré, les étoiles scintillantes et les cierges disposés aux quatre coins du sanctuaire. Des roses rouge sang grimpaient le long des colonnes ivoirines qui délimitaient l'espace à ciel ouvert. L'ouvrage architectural se composait d'un immense bassin hexagonal doté de cuves circulaires à ses angles, surmontées de dômes en verre et fer forgé, mais également de dizaines de sculptures en marbre noir veiné d'argent érigées au bord.

Ces magnifiques femmes de pierre dénudées, agenouillées dans une posture de vénération, brandissaient des amphores en or incrustées d'onyx et de rubis en forme d'étoiles qui déversaient des jets d'eau translucide dans le bassin. Leurs traits délicats et leurs courbes parfaites inspiraient la luxure à tout Polytre normalement constitué. Une légende du Royaume Obscur prétendait que ce monument emblématique avait été conçu par une Faedra aujourd'hui disparue avant d'être offert à Night en cadeau diplomatique. Mon maître n'avait jamais confirmé ou infirmé la théorie devant moi. S'il s'agissait de la vérité, cette déesse tombée dans les limbes avait été familière de ses goûts.

Une quarantaine de Polytres, mâles et femelles des espèces associées à notre royaume, avaient répondu présents à l'invitation que je leur avais envoyée par l'intermédiaire de sylphides renégates. Les scènes de dépravation ne me causaient aucun émoi. Les couples, trios ou quatuors s'adonnaient à des actes érotiques sulfureux dans la Fontaine de Nuit, contre les colonnes, sur des coussins disséminés au sol ou des méridiennes qui croulaient sous les étoffes chatoyantes jetées avec négligence. Certains arboraient des tenues légères comme des déshabillés en dentelle, des robes de voiles ou des pagnes en soie, d'autres étaient entièrement nus, mais tous portaient un masque en tissu noir serti de perles argentées, typique des orgies du Royaume Obscur.

Ils copulaient, s'avinaient, s'empiffraient et se baignaient. Parfois en même temps, ce qui incarnait une prouesse notable. Les corps se contorsionnaient, les peaux se frottaient, les bassins se percutaient, les doigts vagabondaient et les lèvres s'unissaient dans une danse lascive rythmée par des vapeurs de magie. D'ailleurs, des éclats iridescents crépitaient autour des Polytres les plus puissants lorsqu'ils tutoyaient l'extase.

Un élément différait des parties fines habituelles : le personnel. J'embauchais des trouvères, des serveurs et des gardes, en règle générale. Aujourd'hui, ils manquaient à l'appel. Ce n'était pas un oubli de ma part. Les convives devaient aller se servir à boire et à manger au buffet. Cela avait fait grincer des dents une poignée d'aristocrates oisifs sur le coup, mais ils n'y pensaient plus, à présent. Les gémissements de béatitude, les ahans rauques et les claquements de chair remplaçaient la musique. La nourriture était devenue secondaire, même si l'alcool continuait à couler à flots, ainsi qu'un autre breuvage. Les vampyres conjuguaient souvent sexe et sang. Avec un enthousiasme ostensible, leurs partenaires offraient gorges, poignets et cuisses à leurs canines insatiables.

— Bonsoir, Elynrid, salua une voix chantante et sensuelle dans mon dos. Félicitations pour cette fête réussie qui réjouit tant nos invités. J'ai ouï-dire que tu t'étais beaucoup investi ces dernières semaines pour la planifier. Ton implication transparaît partout ici : la perfection réside dans les détails.

— Ravi qu'elle te plaise, répondis-je sans me retourner, tandis qu'une main gracile me tendait une coupe en cristal sur ma gauche. J'espère qu'il en sera de même pour Night lorsqu'il daignera nous honorer de sa ténébreuse présence. Son niveau d'exigence est plus élevé que son ego divin.

— Notre seigneur savoure-t-il encore ton sens du sarcasme ou élimes-tu sa patience au fil des siècles ? minauda mon amie en se campant à mes côtés.

— Les deux, j'imagine. Du reste, mon second degré se rapproche assez du sien, selon sa sœur. Elle m'a affirmé que les vieux couples finissaient par développer un mimétisme. N'est-il pas usant à s'inspirer de mes qualités pour parfaire les siennes ?

— Tu es le seul Polytre qui peut se permettre de verbaliser de telles bravades à son sujet, même devant lui. Il a déjà écorché d'autres insolents pour moins que cela.

En sirotant une gorgée de vin noir sucré, je lançai un coup d'œil caustique au profil de la vampyre qui servait Night depuis presque aussi longtemps que moi. Bien que nous n'appartenions pas à la même race, Amberly et moi nous entendions à merveille. Nous étions deux chats sauvages et indépendants d'horizons opposés qui ne se soumettaient qu'à l'homme qui les avait recueillis.

— Je bénéficie de son estime car il est conscient que je suis son âme damnée la plus fidèle, la taquinai-je en agitant ma coupe pour faire clapoter mon breuvage alcoolisé.

— La deuxième plus fidèle après moi, à n'en point douter, contesta-t-elle placidement.

— Cela reste à prouver.

— Il me préfère à toi pour deux raisons. (J'avisai ses seins plus appétissants que les mets du buffet raffiné.) Pour ta gouverne, il leur a attribué à chacun un nom.

— « Pince-moi » et « mords-moi » ?

— Non, me détrompa-t-elle, l'œil pétillant. « Cyanure » et « Ricine ».

— Je peux encore envisager de me coller une paire de demi-pommes empoisonnées sur le torse, s'il ne faut que cela pour lui complaire. La dignité est chose surfaite.

— Tu es en forme ce soir, Elynrid...

— Et toi, très en beauté, Amberly. Nouvelle robe ?

— Assurément, ronronna-t-elle, lissant son bustier en satin écarlate qui rehaussait l'ébène de sa cascade capillaire ainsi que son teint diaphane. Tu remarques toujours mes changements de coiffure, de parure ou de toilette.

Et pour cause : Amberly était l'un des bijoux les plus prisés de notre royaume. Ses cheveux d'un brun chaud bouclaient le long de son dos cambré jusqu'à une paire de fesses aussi rondes que des fruits mûrs, que bien des hommes rêvaient de cueillir. Sa crinière lustrée était piquetée d'une orchidée noire, fleur qui ne poussait que sur nos terres à la faveur de la nuit et de la lune, et se fanait d'emblée si on l'exposait au soleil. Ses gemmes pourpres m'évoquaient des grenats frangés de cils interminables. Sa peau laiteuse était enduite d'une huile pailletée qui la faisait briller comme si une pluie de poussière de diamants l'avait arrosée.

Pour moi, Amberly Delargento aurait pu concurrencer Rose, Faedra de la Beauté.

— Ne te méprends pas sur mes intentions. La galanterie ne fait pas partie de mes penchants honteux. Ce ne sont que des prétextes visant à admirer tes formes sans passer pour un irrécupérable pervers, soulignai-je d'un timbre chafouin.

La femme fatale éclata d'un rire cristallin, ses canines pointues étincelant sous la lueur des flammes, puis déposa un baiser attendri sur le bas de ma mâchoire glabre. Le contact de ses lèvres douces et fraîches m'extirpa un léger frisson de volupté. Peut-être m'accorderait-elle ses faveurs charnelles après la fête... si Night ne la convoquait pas pour ce délicieux office, du moins. Amberly était sa courtisane favorite, un choix des plus légitimes. Même s'il n'était exclusif avec aucune de ses maîtresses Polytres, qu'elles soient de passage, occasionnelles ou régulières, le Faedra conservait la priorité sur la sublime créature à mes côtés.

— Toi aussi, tu es beau, me complimenta-t-elle en caressant ma nuque de ses griffes laquées d'argent. J'ai été appâtée en sentant ton parfum de bois de cèdre dans le couloir. J'ai eu envie de toi dès que je t'ai aperçu sur ce balcon, drapé dans ton orgueil régalien et surplombant le commun des mortels.

Une ombre de sourire ourla mes lèvres pendant que je sondais la fourmilière grouillante aux mille pattes entremêlées.

Bien que je ne fusse pas indifférent à ses charmes vénéneux, je n'étais pas un des stupides Polytres priapiques capables d'assassiner père et mère pour passer une nuit de débauche avec elle. La vampyre susurrait aussi ce style de phrase aguicheuse à l'oreille de Night. Lui non plus n'était pas dupe. Pourtant, elle le pensait dans les deux cas. Amber ne nous mentait jamais, j'en convenais, mais elle était très... généreuse. Autant physiquement que spirituellement, en l'occurrence.

Je savais qu'elle jetterait son dévolu volage sur notre maître dès qu'elle le flairerait et le verrait dans le Sanctuaire des Étoiles. Je n'en éprouvais ni jalousie ni aigreur. La vie était ainsi faite. Je m'estimais déjà chanceux de pouvoir coucher de temps en temps avec une telle amante, dont les coups de bassin experts imprimaient de nouvelles étoiles polychromes sur ma rétine.

— Pourquoi ne te joindrais-tu pas à eux pour combler tes appétits, ma petite saigneuse ? demandai-je avec ironie en désignant les Polytres qui s'ébattaient bruyamment en bas.

— Ces fades substituts ne suffiraient pas à me rassasier, répartit-elle en griffant mon cuir chevelu à m'en faire mal au crâne. Mes meilleurs amants ne sont pas là-bas. Aucun d'eux ne peut rivaliser avec notre maître et toi, chacun à votre manière.

Moi, à travers la douceur languide. Lui, par la sauvagerie bestiale. Elle avait besoin des deux pour s'épanouir dans le fleuron de notre obscurité commune.

— Mmmh, tu as raison, Amber. Mieux vaut éviter la Fontaine de Nuit, ce soir...

Ses doigts se refermèrent sur mes mèches et me tirèrent la tête en arrière. La courtisane vampyre se rapprocha jusqu'à coller ses seins volumineux contre mon bras tendu.

— Toi, tu sais quelque chose que j'ignore, devina-t-elle dans un murmure excité. Dis-moi !

— Patience. Tu vas le découvrir d'ici quelques minutes, répliquai-je sans broncher, cultivant savamment le mystère.

J'avais réveillé la prédatrice en elle. Amberly humecta la pointe de ses canines en reportant son attention vorace sur le bassin. Sa paume dévala mon crâne pour venir se poser sur mon épaule dans un geste amical et non plus érotique. J'avalai une nouvelle lampée de vin à la mûre, dont les elfes de nuit étaient friands. Les vampyres ne buvaient qu'un liquide : celui qui gorgeait nos veines. Heureusement pour toutes les autres créatures, la plupart des suceurs de sang du Royaume Obscur pouvaient contrôler leur soif vitale. Leur consommation était régie par des règles strictes instituées par Night en personne. S'ils les transgressaient, ils perdaient la tête... littéralement. La décapitation était une méthode d'exécution qu'il affectionnait particulièrement. Mais il se distinguait du commun des mortels en la pratiquant à mains nues ou grâce à sa magie, rarement avec des armes classiques.

Par son statut de favorite, la belle Amberly détenait des privilèges dont ses congénères ne disposaient pas. Par exemple, elle était autorisée à titre exceptionnel à échanger son sang avec notre ombrageux seigneur. Les autres donnaient le leur à Night... mais il n'offrait le sien qu'à elle, en privé ou en public. Les vampyres enviaient mon amie à profusion. Cela nourrissait autant sa vanité féminine que les regards débordant de désir qui se dardaient sur elle.

Les narines de ma petite saigneuse se dilatèrent, ainsi que ses pupilles et, certainement, la chair entre ses cuisses. Notre maître exerçait couramment cet effet sur les femmes Polytres. Voilà un aspect de la nuit avec lequel il aimait jouer : la séduction. Il maîtrisait cet art ancestral sur le bout des doigts, sans mauvais jeu de mots.

Elle inspira profondément pour s'imprégner des prémices de sa fragrance. Dans la foule, plusieurs vampyres et lycanthropes levèrent le nez pour humer la variation de l'atmosphère ; leurs yeux se révulsèrent et certains se pourléchèrent les babines. Une chair de poule se propagea sur la peau nue des elfes de nuit, qui paraissaient enivrés.

Ma foi, Night nous dégainait le grand jeu, ce soir...

— Il approche, chuchota Amberly d'une voix chaude et fébrile.

Je devais être le seul à ne pas être impacté par le phénomène, semblable à un raz de marée olfactif. Qui était son préféré, hum ? Tout affriolants étaient-ils, ces seins pailletés ne faisaient pas le poids face à moi. Du balai, Cyanure et Ricine !

Elyn, m'apostropha une voix rocailleuse et puissante dans mon esprit. Sont-ils tous présents?

— Hum hum. Je les ai comptés. Ce fut fastidieux, vu combien ils sont collés-serrés.

Amberly ne réagit pas à mon marmonnement, accoutumée à ce que je communique avec notre maître en pensée. Un privilège exclusif, soit dit en passant.

Ne descendez pas pour l'instant, intima Night, qui avait aussi perçu la présence de sa courtisane favorite à mon bras. Dis à Amber que je la veux ensuite dans ma couche, avec seulement ses bijoux.

Avec un soupir blasé, je roulai des yeux. Diantre ! J'allais encore passer en second... s'il ne l'épuisait pas. La dernière fois, elle manquait de vigueur. Ce goinfre rustre avait trop prélevé de son sang sans lui fournir le sien. Il s'était évaporé en l'abandonnant ainsi pour se rendre à une entrevue avec la Faedra Blade dans le Royaume d'Acier.

— Amber, il te veut dans sa couche après moi, avec seulement tes bijoux. Tu pourras laisser ta robe et ta lingerie dans ma chambre.

La vampyre gloussa en rajustant ses frisettes sur son épaule. Seigneur, je ne songeais qu'à la prendre ! L'ambiance luxurieuse devait amplifier ma libido, car j'étais tempéré comparé à la majorité des autres Obscuris.

— Quel fieffé menteur ! Mais je raffole que tu sois possessif avec moi, roucoula-t-elle avant de positionner ma paume sur ses fesses bombées, que je ne me privai pas de presser.

La matérialisation progressive de Night au milieu du Sanctuaire des Étoiles suspendit mon pelotage. À l'affût, Amberly et moi nous penchâmes par-dessus le parapet.

Pareils à des rubans de soie en train de se dérouler, des serpents de ténèbres sinuaient au-dessus des corps imbriqués. Les Polytres relevèrent la tête, haletants et transpirants. En psalmodiant le nom de notre maître avec adoration, ils brandirent leurs mains pour frôler sa noirceur éthérée du bout des doigts. Or, les nappes de brume se dissipaient en partie avant qu'ils ne les touchent, comme si ces brebis lubriques étaient indignes de sa bénédiction divine.

Les tentacules sombres s'amalgamèrent au bord du bassin, à proximité du trône en obsidienne de Night, que les serviteurs avaient ramené pour l'occasion. Ils formèrent une silhouette masculine massive, dont les ailes et les cornes se rétractèrent. Des acclamations résonnèrent autour de lui lorsqu'il apparut sous son apparence usuelle. Deux longues mèches de jais torsadées zébraient son visage dépourvu de masque. Les Polytres cessèrent de forniquer pour le contempler, y compris ceux qui étaient sur le point de jouir. Ils lui dédièrent des courbettes, des gestes de la main en guise de salut et, pour les plus audacieux, des invitations à venir les baiser selon son bon vouloir. Toujours silencieux, le Faedra promena son regard flambant sur eux avec une lenteur prédatrice. Le bruit des jets d'eau ponctuait son examen méthodique et pénétrant. Des femmes énamourées soupirèrent alors qu'il les balayait de ses yeux aussi argentés que la lune et les étoiles au-dessus de nous. Ils ne dérivèrent pas vers leurs jolies courbes voilées de sueur. Son expression demeurait imperturbable, comme s'il établissait un inventaire de marchandises banales.

Ces idiotes ne se rendaient pas compte qu'elles étaient sous l'emprise de la Magie de Chair qui brouillait leurs pensées et attisait leurs sens. Elle s'était infiltrée dans chacun de leurs pores. Le charisme magnétique du dieu de la Nuit crevait déjà les sommets en temps normal, mais lorsqu'il employait ce sortilège, impossible de lui résister. S'il l'avait souhaité, il aurait pu ordonner à tous ses disciples de se noyer... et ils auraient obtempéré avec une joie niaise.

Néanmoins, son projet pour eux était tout autre, ce soir.

Il ne s'était pas non plus déplacé pour participer à l'orgie. Il escomptait la mener là où il le désirait.

D'un petit signe du menton, le seigneur les exhorta à reprendre leurs activités charnelles. Ils s'exécutèrent aussitôt, même si la plupart d'entre eux gardaient un œil enfiévré sur le Diessenciel pour décupler leurs ardeurs. Il marcha vers son grand trône dentelé d'un pas félin, plein d'assurance et d'arrogance, que nulle créature au monde n'était capable de reproduire. En effet, un sillage ténébreux constellé de minuscules étincelles argentées s'étirait derrière lui telle une majestueuse cape de brume.

Comme je l'avais allégué précédemment, mon maître aimait soigner ses entrées et capter l'attention de chaque être qui respirait le même air que lui. Non pour renforcer son aura ou son amour-propre, mais parce que rivaliser avec le jour éclatant ainsi que la lumière aveuglante était indissociable de sa nature.

Tous s'accordaient sur le fait que Night brillait de mille feux nocturnes à travers ses ombres.

Enveloppé dans ses tentacules fluctuants, il s'installa avec une élégance décontractée sur son trône rutilant. Incliné sur la droite, en appui sur un accoudoir, deux doigts sur la tempe, une jambe tendue devant lui, l'autre repliée... Il ne fallait jamais se fier à sa nonchalance. Ce n'était qu'une apparence destinée à endormir la méfiance des sots et des ennemis du royaume. Je savais qu'il était sur le qui-vive derrière son insouciance. Il observait ses proies vulnérables avec minutie, à l'image d'une panthère noire tapie dans un amas de ronces qui la griffaient sans la blesser.

— Elyn, souffla Amberly, troublée.

— Quoi donc ? fis-je distraitement.

Elle pointa l'index vers le croissant de lune. La couleur argentée était en train de s'altérer et de foncer. Ce n'était pas un présage. Il s'agissait d'un signe céleste de la mauvaise humeur de Night qui influençait en temps réel la mentalité de sa demi-sœur, Sélénie.

Cette teinte rouge témoignait que notre maître Faedra...

Était en colère.

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