Le premier mois de cohabitation avec Evie n'a pas été de tout repos. Elle semble décidée à se venger que je tienne à l'enfermer chez moi, et ne se gêne pas pour m'ignorer lorsque je vais à sa rencontre.
Elle a tout tenté pour m'embêter et elle continue à essayer de me frapper à chaque fois qu'elle me voit. Je dois avouer qu'elle est très futée. Elle arrive souvent à me surprendre.
Ce soir, j'ai décidé de faire sortir le fauve de sa cage, mais seulement si elle le mérite et je compte lui expliquer maintenant.
Je me rends dans la chambre, mais ne la trouve pas. Je regarde au rez-de-chaussée, mais toujours aucune trace d'elle, ni dans la cour. Vous connaissez ce sentiment, quand les enfants sont tellement calmes que vous êtes sûr qu'ils font une bêtise ? J'ai exactement cette impression avec Evie. Je suis toujours sur mes gardes en ce moment, parce qu'elle me surprend toujours.
J'appelle après elle, mais aucune réponse ne me parvient. Je décide d'aller dans le petit studio de Kenna, et trouve Evie en train de faire des essayages. Kenna est face à elle, les lunettes sur le bout du nez et son appareil photo à la main. Elle aime faire essayer ses tenues non terminées pour voir ce qu'il faudrait ajouter. Son cobaye est à domicile alors ça l'arrange énormément.
Je frappe contre le mur, et Kenna se tourne dans ma direction pendant qu'Evie dirige son regard mauvais vers moi.
-Je devais te parler un instant Evie, mais puisque tu es ici, j'en profite pour vous en parler à vous deux.
J'avance dans la pièce pendant que Kenna lève les yeux au ciel, n'aimant pas être dérangée pendant son travail.
-J'ai des invités ce soir, de gros acheteurs potentiels, et je veux que vous restiez en dehors de ça. Je ne veux voir aucune de vous en bas, ou dans le jardin. Si vous respectez ça, Evie pourra ressortir d'ici.
-Le chantage Lazaro ? Crache Evie en me regardant mal.
-Agis en enfant, et j'agirai de la même manière. C'est bon pour vous deux ?
-On sera là à travailler une fois qu'on aura dîné, confirme Kenna. Evie voulait voir le site internet en exclusivité.
-Parfait.
Je retourne dans mon bureau et mes bras droits me rejoignent rapidement. Kenna prépare le repas avec Evie et nous appelle pour manger. Après le dîner, elles repartent directement à l'étage sans un mot. Les garçons mettent tout en place à table, en particulier toutes les nouvelles drogues que j'ai à proposer.
Les hommes commencent à arriver et les discussions à propos de drogues commencent. Ils m'expliquent ce qu'ils ont l'habitude d'acheter, et ce qu'ils aimeraient bien acheter.
Je leur donne des documents réalisés par Alejandro, qui ont pour but de récapituler tous mes stocks. J'ai bien évidemment étudié les dossiers de chacun des hommes à table avant de les convier à cette soirée de commandes. Kenna adore appeler ces soirées des "soirées Tupperware".
-D'où proviennent ces drogues ? M'interroge l'un des hommes.
-Eh bien elles viennent d'ici ou de pays voisins, expliqué-je en montrant tout sur la table. D'Amérique du Nord, mais surtout d'Amérique du Sud. Seules les drogues de laboratoire viennent du Nord comme l'exstasy ou le LSD. Vous pouvez essayer ce que vous voulez sur cette table. Rio, Alejandro, servez ces messieurs.
L'un d'entre-eux, qui a l'habitude de vendre énormément de cannabis, roule un joint à l'aide de Rio qui lui allume. On ne laisse pas le feu, parce que je veux trouver ma villa en un seul morceau. Plusieurs hommes commencent à tester ce que j'ai à proposer en discutant, et j'écoute attentivement toutes leurs remarques.
-Mais cette liste, enchaîne un autre, ce sont les produits que l'on peut directement obtenir si on fait affaire avec vous ? Ou on peut...
Des talons retentissent sur le carrelage et je passe une main sur ma barbe en redoutant de me retourner. Rio me fait les grands yeux, signal d'alerte, et je tourne la tête pour apercevoir Evie et son sourire narquois.
Le pire problème, ce n'est pas qu'elle soit là. Le pire, c'est sa tenue. Elle porte des jartelles, tenues par des porte-jartelle et elle a un body noir fait de dentelle et presque transparent, qui dévoile une bonne partie de ses seins.
Je fulmine qu'elle ait osé me désobéir de cette manière pour me provoquer. Je redirige mon attention vers les hommes à table et tape du poing sur la table.
-Je crèverai les deux yeux au premier qui osera poser son regard sur ce qui m'appartient. Et je ne parle pas de drogue.
Elle passe à côté de moi pour rejoindre le bout de la table et prend le joint dans la main d'un homme. Elle s'installe sur la table et prend une taffe en me regardant dans les yeux, avec son sourire de défi.
-Evie, je te laisse une minute pour rendre ce joint et rejoindre Kenna en haut avant que je ne me lève.
Elle ricane et continue à fumer. Merde, je ne peux pas la laisser se droguer sous mes yeux de cette manière. Je lance un regard à Rio et il part récupérer le joint de la main d'Evie et je me lève pour la rejoindre. Je la bascule par-dessus mon épaule en m'excusant auprès des hommes et monte à l'étage. Je la repose sur ses jambes et la regarde fermement.
-C'était quoi ça ?
-Tu ne peux pas diriger ma vie Lazaro, je suis ton égale, tu l'as dit toi-même.
-Alors ne me met pas au défi de cette manière ! Va te changer, et ne redescend pas si tu n'as pas une tenue convenable.
-Tu vas me faire croire que ma tenue ne te plais pas ?
-Si, mais elle plaît également à d'autres hommes qui ne devraient même pas poser le regard sur toi. Je ne savais même pas que tu avais ce genre de tenue.
-Moi ? Non je n'ai pas ce genre de tenue, c'est Kenna qui m'a passé ça.
Elle éclate de rire et s'éloigne pour courir vers l'étage. Dios mío si ma petite sœur entre dans son jeu, je suis loin d'en avoir fini avec elle.
Je soupire longuement et repars en bas pour vider mon verre d'eau. Les discussions sur la drogue ont repris, puisque Rio et Alejandro les ont visiblement relancés là-dessus.
-Et si on achète, on peut en recommander à notre guise ?
-Je peux récupérer ce que je veux, ça se fera à votre demande.
Lorsque j'entends une nouvelle fois des talons, une goutte de sueur perle sur mon front. Si elle a encore la même tenue, je ne le supporterai pas. Au moins, les autres hommes n'osent plus la regarder. C'est déjà un bon point.
Je me lève, prêt à raccompagner Evie à l'étage et à l'attacher dans le lit, mais sa tenue est plus convenable. Qu'est-ce qu'elle fait ici ? Elle porte une robe à sequins avec un immense décolleté, et également très courte. Je suis sûre qu'on verrait son dessous si elle se penchait.
Elle sort des shooter dans le placard et en propose à mes clients. Elle veut les tuer, ce n'est pas possible autrement. Elle saisit du Kahlúa et en sert aux hommes, avant de venir vers moi. Elle pose un shooter face à moi et se penche pour le remplir en me regardant dans les yeux. Mon regard dérive, et je constate qu'elle ne possède aucun sous-vêtement.
Je serre les mâchoires et la tire sur mes genoux en regardant mes futurs acheteurs vraiment emballés face à ma drogue.
-Messieurs, je vous présente ma femme, Evie. J'attendrai de vous qu'aucun ne tente de la toucher parce que...
-Parce que même si vous arrivez à lui passer sur le corps, poursuit-elle en se servant un shooter, il faudra réussir à me passer sur le corps à moi.
Les hommes se mettent à rire et nous trinquons à cette soirée. Pourtant, je suis presque sûr qu'Evie n'aime pas cette boisson. Elle l'avait dit au bar lorsque je l'ai laissée avec tous les hommes dans le bar.
Curieuse, Evie saisit une fiche et se met à lire la liste de mes drogues ainsi que les prix au kilo.
-Des prix raisonnables pour le marché, et des drogues qui vont bien emmerder les autorités.
-La demoiselle s'y connaît ? L'interroge un des clients avec intérêt.
-J'ai travaillé pour l'armée. Il est normal qu'au Mexique je sois calée sur la drogue. Ce qui embête le plus les autorités, ce sont les drogues de synthèse.
-Et vous avez déjà arrêté un trafic ?
-Oui, il y a quelques années, j'avais trouvé de la méthamphétamine sous toutes ses formes dans des doudous pour enfants qui passaient la frontière.
Tiens donc, ça me rappelle mes débuts. J'ai trouvé celle qui m'a fait perdre un beau petit pactole, mais je ne lui ferai pas l'honneur de lui dire.
Evie s'occupe d'amuser la galerie pendant des dizaines de minutes, et ils finissent par commander tout mon stock disponible auprès de Rio et Alejandro. Ils me saluent et repartent tous, pendant que les garçons rangent les consommations.
-T'as un peu vu tes prix ? Lance Evie en se tournant pour me regarder.
-Tu es une jolie menteuse Evie, réponds-je en riant.
-Ces incapables n'auraient jamais payé si je ne t'avais pas aidé.
-Aidé ? Je n'ai pas besoin de ton aide pour faire des affaires.
-Je ferais une très bonne femme d'affaires, tu ne trouves pas ?
-Femme d'affaires peut-être, mais pas femme de mes affaires.
-C'est ce qu'on verra.
Elle se lève de son siège et fonce à l'étage en riant. Evie rit beaucoup plus en ma présence désormais. Ça fait plaisir de la voire autant pleine de joie de vivre, loin de ce qu'on a vu quand je l'ai rencontrée.