Jeudi 27 aout 2021
Spa Francorchamps, 10h30
PDV de Julia
Moi: Salut l'ami, je dis dans l'encadrement de la porte de mon meilleur ami
Pierre: Salut toi, t'as fait bonne route ?
Moi: Plutôt ouais, je m'avachis sur le canapé dans le coin de sa loge. Juju est là ce week end
Pierre: Oh c'est vrai ? il tourne son visage dans ma direction, un grand sourire aux lèvres alors que je hoche la tête.
Je ne surenchéris pas. Je connais Pierre par coeur. Je le connais comme mon frère, comme si il était devenu une extension de ma personnalité. Alors bien qu'il soit à l'autre bout de la pièce, j'ai senti dès l'instant où mon pied s'est posé dans sa loge l'atmosphère s'alourdir. Je sais à quel point c'est spécial pour lui d'être ici.
Un silence s'installe dans la pièce, indiquant au français que j'ai très bien compris ce qu'il se passait. Comment ne pas y penser ? Pierre a perdu un de ses amis les plus chères ce jour-là, un pilote talentueux qui aurait finit dans une formule 1 avec lui.
Je me souviendrai toute ma vie de ce jour là. De la façon avec laquelle Pierre avait fondu dans mes bras pour la première fois. La première fois que j'ai ressenti autant d'empathie et de tristesse pour un ami, mon meilleur ami. Ses mains sont posées sur une petite table, qu'il fixe, l'esprit ailleurs.
Moi: Il est fière de toi, je brise le silence. Il n'aurait pas pu rêver mieux pour toi
Pierre: Est ce que tu veux venir avec moi ? il me demande en prenant le bouquet dans ses mains
Mon coeur se compresse dans ma poitrine. Je sais à quel point c'est un moment important pour lui. Il retourne à l'endroit de l'accident d'Anthoine et y dépose des fleurs tous les ans. Un geste simple qui permet de faire rappeler à tout le monde cette affreuse journée.
Moi: Je... Je sais pas, c'est ton moment, je veux pas...
Pierre: Je te le demande
Ses yeux bleus me font comprendre qu'il est sérieux. Il n'y est jamais allé avec quelqu'un. Je ne sais pas comment je pourrai me sentir plus honorée qu'en l'accompagnant rendre son hommage annuel à son meilleur ami. Il a tellement été là pour moi.
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2 mois auparavant...
Samedi 12 juin 2021
Monaco, 22h30
La fête battait son plein. Charlotte avait organisé une petite fête à Monaco, pour l'anniversaire de sa cousine. Elle avait décidé de m'inviter avec Pierre. Mon meilleur ami était surpris de cette attention, mais j'ai trouvé ça adorable. Alors même si je n'étais autorisée à reprendre le travail que dans 1 semaine et que mes agrafes tenaient encore ma chaire en dessous de mon sein, j'ai tenu à venir.
Pierre, en bon papa poule, a tenté de m'en dissuader des dizaines de fois. Mais l'invitation de Charlotte était si bienveillante qu'il était hors de question que je ne vienne pas au moins quelques heures.
Pierre: T'es que t'es pas fatiguée ? Tu veux pas rentrer ?
Moi: Non ça va, je te promets que je te le dirai si ça va pas
Le français hoche la tête et reprend sa discussion avec un homme sur la gauche. Je me mets alors à observer la pièce. Tous ces gens ont l'air tellement heureux, ça fait plaisir à voir.
Mais mon regard s'arrête davantage sur le couple de monégasques. Charles tient Charlotte par la taille et elle rayonne. Cette fille est vraiment magnifique. Cette vision me réchauffe un peu le coeur. Charles mérite d'être heureux, c'est tout ce que je lui souhaite. Et je suis contente qu'il soit tombé sur Charlotte.
Alors que mon regard se perdait, Pierre se met soudainement juste devant moi. Il me cache complètement la vue et je ne suis plus capable de les voir. Il semble toujours discuter avec cet homme mais il me regarde du coin de l'œil. Alors quand sa discussion se termine il se contente de me dire.
Pierre: Tu te fais du mal pour rien à les regarder. Viens on rentre
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Le circuit de Spa en début de week end a toujours un atmosphere special. Les virages semblent d'une grandeur démesurée et la piste d'une longueur interminable. Mais tout est tellement différent quand les voitures s'élancent.
L'ambiance est lourde. Mais pourtant, même la chaleur de l'asphalte ne parvient pas à briser la glace de ce moment poignant. Lorsque nous arrivons en haut de ce tristement connu virage dont je n'ose même plus prononcé le nom, une immense vague de frissons envahissent mes avant-bras.
Je reste éloignée, sur le côté, par peur de leur voler leur moment. Pierre s'avance, s'accroupie et dépose le bouquet de fleurs sur le sol, contre la barrière. Il doit tellement lui manquer. C'est sa bonne étoile, il l'a aidé à gagner sa première course. Il est fière de toi, c'est certain.
Vendredi 29 août 2021
Spa Francorchamps, 20h30
PDV de Julia
Les yeux rivés sur les pages de mon livre, je laisse mon esprit divaguer sur les mots. J'adore lire. J'adore ces moments de plénitude, où il n'y plus que moi et les mots soigneusement choisis de cet auteur qui comptent. Un moyen de laisser échapper le temps d'un instant toutes les pensées de la vie bien réelle, pour laisser de la place aux imaginaires. Celles qui peuvent se contrôler.
Mon chapitre se finit, le soleil commence à donner sa dernière révérence. Je me suis assise sur le rebord d'un petit balcon, les pieds dans le vide, uniquement au dessus de quelques mètres. J'ai une vue sur la fôret, ce grand parc rempli de verdure qui me fascinent. Qu'est ce que la nature me fascine.
Charles: Tu lis quoi ? j'entends derrière moi alors qu'il s'assoit à côté de moi
Moi: Petit pays
Charles: Oh c'est vrai ? J'ai regardé le film dans l'avion l'autre jour
Moi: Et bah lis le livre, ils sont toujours bien mieux que les films. Et puis ça te ferait pas de mal hein, je dis sarcastiquement
Charles: Toujours aussi aimable toi, il me pousse légèrement l'épaule
Le silence reprend sa place, alors que je croise mes jambes en tailleur devant moi. Les siennes se balancent dans le vide. Le soleil danse une dernière fois avec l'ombre des arbres avant de céder sa place à la Lune.
Charles: J'ai lu un livre il y a quelques semaines
Moi: Super, je ris
Charles: C'est l'histoire d'un homme qui passe sa vie amoureux d'une femme, qui l'aimait, mais qui ne lui a jamais rien avoué parce qu'il avait fait un promesse à quelqu'un d'autre
Moi: Ça a l'air triste
Charles: Un peu ouais, il hoche les épaules
Moi: Comment il s'appelle ?
Charles: Ce que le jour doit à la nuit. Tu devrais le lire, il me tend le livre qu'il tient dans sa main. Dis moi quand tu l'auras fini
Après sa dernière phrase, il se relève et rebrousse chemin afin de disparaitre dans les chemins de l'hotel. Il l'a lu il y a quelques semaines, il ne l'avait pas par hasard sur lui. Il l'avait préparé, il voulait que je le lise. Mes yeux vérifient l'heure une dernière fois avec l'espoir d'avoir assez de temps pour le commencer. Mais je suis même en retard de quelques minutes sur la promesse que j'avais faite à Pierre.
Je me lève d'un bond et marche rapidement en direction de la chambre du français. Je sais que c'est très compliqué pour lui d'être ici. Alors je lui ai promis que je serai là tous les soirs, qu'on parlerait de tout et de rien, pour lui éviter de trop penser.
Moi: Je suis là ! je crie en rentrant dans sa chambre
Contrairement à son habitude, il ne me crie pas dessus en retour. Mes sourcils se froncent alors que je continue d'avancer dans la pièce. Je finis par l'apercevoir, assit sur une chaise sur le balcon, les yeux rivés vers l'horizon. C'est presque dramatique. Je m'avance, sans un mot, et m'assoit sur la chaise à ses côtés.
Moi: Tu veux en parler ? je finis par dire simplement
Pierre: Jules est pas avec toi ? il semble le chercher des yeux
Moi: Il est dans ma chambre avec Leo, tu veux que j'aille le chercher ?
Le français hoche la tête. Avec un petit pincement au coeur, je me retourne et pars en direction de ma chambre. Sans une grande surprise, je trouve Leo et Charles en train de regarder un match à la télé. Je les ignore et récupère mon fils pour retourner auprès de mon meilleur ami.
Ce dernier tend directement les bras dans ma direction quand il me voit arriver, mon coeur se réchauffe un petit peu de voir un léger sourire s'afficher sur son visage. Les bébés ont un effet exceptionnellement apaisant. Alors même si Jules grandit et qu'il a 1 an maintenant, il a toujours ce don d'apaiser les maux.
Pierre a été là depuis la naissance de Jules, il compte autant que Léo, il est son tonton au même titre que lui. Il est son parrain, la personne qui a assuré une figure masculine à mon fils quand son père n'était pas là. Ils auront toujours un lien spécial tous les deux, certainement influencé par le lien particulier que j'ai avec mon meilleur ami.
Moi: Tu trouves que les essais se sont mal passés ?
Pierre: Non, ça va, il répond en caressant le visage de son neveu qui s'endort dans ses bras
Moi: Il aimerait pas te voir dans cet état, même si je comprends comment tu te sens
Pierre hoche la tête et me redonne Jules délicatement pour ne pas le réveiller. Pierre n'est pas du genre à parler de lui, encore moins de ce qu'il ressent. Mais je pense qu'il a plus de facilités à le faire avec moi, parce que tristement, je suis passée par là, plusieurs fois, et je peux le comprendre mieux que personne.
Pierre: Je sais bien, c'est pour ça que je suis plus trop triste quand je pense à Anthoine
Moi: Bah alors qu'est ce qui t'arrive ?
Le français commence à ouvrir la bouche puis la referme, l'air penseur. Il a envie de me dire quelque chose mais il hésite, pour je ne sais quelle raison. Ses yeux croisent les miens et je comprends bien que quelque chose ne va pas. Il rabaisse les yeux sur Jules, comme pour se rassurer encore une fois.
Pierre: J'ai l'impression, enfin, je sais pas, mais je crois que j'ai trompé Katerina
Ma respiration se coupe et ma mâchoire se décroche. Il ne me regarde pas, il baisse les yeux, rongé par la honte. Je n'arrive pas à bien assimiler l'information. Mais je comprends à ce moment là qu'il m'a demandé de ramener Jules pour qu'il me calme et qu'il m'empêche de lui hurler dessus.
Moi: Attends, je marque une pause pour remettre mes idées aux clairs. J'ai pas compris là. Comment ça tu as l'impression ? Vous vous étiez remis ensemble ? Tu as fais quoi ?
Pierre: Ça allait un peu mieux entre nous, on s'était un peu plus rapproché ces derniers temps. Mais je sais pas ça fait des mois que je rame, que je l'attends, mais j'en peux plus. J'ai l'impression de faire tout ça pour rien et ça me bouffe
Moi: Tu as fait quoi ? je redis une seconde fois
Pierre: J'ai couché avec une fille hier soir
Ma main se resserre légèrement autour de mon fils, comme pour essayer d'évacuer la colère qui est entrain de faire bouillir mon sang. Une énorme vague de chaleur s'empare de mon corps et, pendant un instant, je le déteste. Parce que Kat est mon amie, certainement ma meilleure amie, qu'elle a toujours tout fait pour lui.
Moi: Donne moi 5 min, que j'évite de dire quelque chose que je regretterai
Mon ton est sec, froid, sans même le faire exprès en réalité. Mes expressions retransmettent toute seule la colère qui m'a pris il y a quelques minutes. Je me lève, sors de la chambre pour re déposer Jules dans la mienne. Charles et Leo m'adressent des regards interrogateurs que je mine de ne pas remarquer avant de retourner vers Pierre.
Moi: D'accord, je m'assois. Je vais essayer d'être objective, je me rassois et prends une grande inspiration pour tenter de faire cesser ma jambe de trembler. Pourquoi ? C'était qui ? Tu la connais ?
Pierre: Je ne la connaissais pas. Je l'ai croisé au bar de l'hôtel hier, elle vient voir le Grand Prix. Et je sais pas, elle était belle, elle était là, elle était drôle, interessante et j'ai craqué, je sais pas pourquoi. Je sais juste que c'est une mannequin portugaise
Ma main gratte nerveusement mon visage. Je laisse le silence peser sur la conversation. Il sait que je suis en colère, ils avait très bien ce que j'allais lui dire avant même qu'on en parle. Je ne sais pas envie de l'enfoncer, je le sens qu'il est perdu, mais je suis tellement remontée pour ma copine.
Je les ai toujours vu ensemble, ils ont toujours tout fait pour sauver leur couple. L'année dernière a été très compliqué pour eux aussi, et en partie à cause de moi. Kat ne savait rien de s'était qu'il s'est passé, de pourquoi j'avais disparu et pourquoi il ne pouvait jamais être là pour elle. Pourtant, elle ne s'est jamais remise avec quelqu'un d'autres, elle a toujours été amoureuse de lui. Et lui... Je ne sais plus quoi dire.
Moi: Tu regrettes ?
Pierre: J'en sais rien, ma mâchoire se décroche encore plus. Je sais pas ce que je suis entrain de faire Ju, il cache son visage entre ses mains.
Moi: Sois honnête avec Kat, s'il te plait. Elle ne mérite pas que tu lui mentes. Dit lui que c'est terminé. Elle mérite pas que tu la laisses dans le doute comme ça, elle est trop bien pour ça
En temps normal, j'aurai pris Pierre dans mes bras. Je l'aurai réconforté, je l'aurai conseillé. Je le ferai, mais une fois que je me serai calmer. Je suis trop en colère contre lui. Ce qui me rend le plus folle c'est qu'il n'a pas l'air de tant regretter que ça.
Si je ne connaissais pas Kat, je lui aurai très certainement passer un savon, mais j'aurai pu l'aider. Là je suis bien trop subjective pour le faire. J'ai besoin de temps, tout comme il en a besoin.
Pierre: Je suis désolé, sa voix se brise ce qui me fait encore plus mal au coeur
Moi: C'est pas auprès de moi que tu dois l'être Pierre
Pierre: Si, je t'ai déçu. Je vais lui faire du mal et je sais que ça te met en colère. Je suis désolé de t'avoir déçu Ju, c'était la dernière chose que je voulais
Je ne réponds rien, pas besoin de le faire, il le sait très bien. Au fond, il me fait de la peine. C'est la personne qui m'a le plus soutenue, le plus épaulé avec mon frère. Il est le grand frère que je n'ai jamais eu, un frère d'une autre mère. La sienne est d'ailleurs devenue comme celle que je n'ai jamais eu.
Le voir dans cet état. Le savoir perdu au point de faire des choses qui ne lui ressemblent pas me brisent le coeur. Il est complètement perdu, son regard le montre bien suffisamment. Ses yeux bleus sont glacials, à en donner des frissons. J'aime pas le voir comme ça malgré tout.
Pierre: Dit moi quelque chose s'il te plait
Moi: Tu es la dernière personne à pouvoir faire souffrir quelqu'un que tu aimes. Si tu as fait ça c'est qu'inconsciemment tu n'aimes plus Kat. En tout cas, plus assez. Laisse la partir, laisse la se reconstruire et, par pitié, ne reviens plus vers elle. Et toi tu prends du temps pour toi. Tu n'es pas obligé d'être toujours dans une relation, tu as besoin de temps pour toi aussi
Le français hoche la tête, attentif à chacune de mes paroles. Son regard s'adoucit à mesure où je lui parle. Il avait besoin que je le conseille, je l'ai bien vu. Alors même si je suis toujours très en colère contre lui, je repousse le moment où je l'insulterai de tous les noms, et le prend dans mes bras.
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Chapitre imprévu parce que j'avais besoin de lire vos commentaires ! Je vous attends 🫶🏻
Passez une belle semaine, et si ça va pas, même si on ne se connaît pas, envoyez moi un message privé ! Je vous répondrai toujours ❤️