Devoirs et Manipulation ~ Ke...

By DaleSeinby

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Florian Salvi travaille depuis une dizaine d'années sous l'autorité du ministre Johann Goldberg. Au fil des... More

Chapitre 1: Le nouveau régent
Chapitre 2 : Marchandage au détour d'un couloir
Chapitre 3 : Alcool et ressentiment
Chapitre 4 : Affection mutuelle
Chapitre 5 : L'entêtement d'un Goldberg
Chapitre 6 : Mémoire trouble
Chapitre 7 : Semi Confessions
Chapitre 8 : Eclats de colère
Chapitre 9 : Dîner chez les Goldberg
Chapitre 10 : Querelle et Chaton abandonné
Chapitre 11 : Cigarette au coin du feu
Chapitre 12 : Lendemain de soirée
Chapitre 13: Emprise
Chapitre 14 : Promesse
Chapitre 15: Excuses et décisions
Chapitre 16: Ouragan
Chapitre 17 : Plonger dans le passé
Chapitre 18: L'heure des décisions
Chapitre 19 : Dev et Tristan
Chapitre 21 : Mise au point
Chapitre 22: Récit
Chapitre 23: Prendre la fuite
Chapitre 24: Démasqués
Chapitre 25: Issue fatale
Chapitre 26 : L'après

Chapitre 20 : S'échapper

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By DaleSeinby


Florian essayait pour la troisième fois d'agrafer un paquet de feuilles ensembles. 

Il dût reposer l'appareil. 

Ses mains tremblantes semblaient incapables d'une telle tâche. Il se maudit et envoya valser les documents de son bureau qui vinrent s'écraser par terre dans un bruit sourd, faisant se retourner les autres assistants de ministres qui partageaient ce bureau. C'était leur salle de travail quand ils ne devaient pas accompagner leur supérieur ou effectuer leur diverses missions. 

Depuis la conférence du premier ministre, l'atmosphère déjà étouffante était devenu irrespirable. Une partie des opposants de Johann reportaient leur haine sur l'assistant qui se sentait encore plus ostracisé qu'il ne l'était habituellement. Les alliés de Johann quand à eux le félicitaient à renfort de discours homophobes à gerber. 

Après quelques secondes à regarder les feuilles éparpillées avec un air hagard, il se leva pour aller les ramasser précipitamment. Il commençait à craquer. Johann multipliait les provocations à son encontre, parfois même en publique. 

Il le testait. 

Mais les deux hommes savaient que c'était inutile. Florian avait atteint un stade où il ne se serait rebellé pour rien au monde. Il se sentait épuisé et brisé.

L'assistant avait appris par le ministre la fermeture temporaire du bar de Victor et avait eu les échos d'une plainte déposée à l'encontre du barman qui aurait agressé un homme honnête. Il s'était retenu de protester. Il ne devait montrer aucune émotion. Laisser le ministre comprendre qu'il avait gagné et qu'il ne s'éloignerait plus de lui. 

En reposant les feuilles sur son bureau, Florian laissa son regard dériver vers le coupe papier. L'objet pointu au design élégant lui avait été offert par Johann au tout début de leur collaboration. Il ferma les yeux un instant, s'imaginant la lame ouvrir lentement ses veines pour lui apporter la libération. Il n'aurait plus à porter le poids des années de péchés et de crimes que lui et son supérieur avaient commis. Il ne mettrait plus en danger ses proches. 

Il rit nerveusement. Il n'avait plus de proches.

Un raclement de gorge le sortit de ses pensées obscures et il se retourna pour trouver Solange Goldberg. Il fut surpris de la voir là. Elle s'était absenté quelques jours quand son père lui avait annoncé qu'il ne souhaitait plus la voir au ministère. De toute évidence, la jeune fille si sage avait décidé de ne pas obéir à la pression familiale. Elle ne dépendait pas vraiment de Johann au ministère, et si le comité décidait de la garder, Johann ne pourrait pas l'en faire partir, malgré toute sa volonté et son statut. 

Le comité était au dessus des guéguerres d'influence. Johann avait compté sur l'obéissance et la docilité de la sœur de Thomas. Preuve qu'il ne connaissait pas sa fille. Comme pour souligner son désir d'indépendance, la jeune femme avait coupé ses cheveux et arborait maintenant un carré bouclé dont l'indomptabilité la rapprochait encore plus de son grand frère. 

Florian s'efforça de ne pas penser au jeune aristocrate et lança un regard interrogateur à la jeune femme.

-Solange ? Est-ce que je peux vous aider ?

-Oui Monsieur Salvi. Votre présence est requise au comité. Pouvez vous me suivre ?

Elle avait prononcé tout ça avec une froide résolution qui fit tiquer Florian. Il ne voyait pas pourquoi il était convoqué au comité, ni pourquoi c'était la jeune femme qui était venu le chercher. Il soupira et lui sourit d'un air fatigué.

-Très bien... Je vous suis Mademoiselle Goldberg.

La jeune fille parût se détendre. Il la suivit jusqu'aux ascenseurs, l'esprit absent. Le comité ne convoquait pas de simples assistants sans raison. Son cœur se mit à battre plus vite. Il n'était pas sûr de pouvoir encaisser une autre mauvaise nouvelle sans s'effondrer.

Ils arrivèrent enfin au bon étage et Solange le conduit jusqu'à une petite porte. Il fronça les sourcils. Ce n'était pas le bureau du comité. Il se tourna vers Solange qui souriait d'un air désolé.

-Je pense que tu devrais entrer Florian...

Il aurait dû faire demi-tour mais la douceur de la voix de Solange le convainquit de pousser la lourde porte de bois. Il s'avança dans une des anciennes salles inoccupées du ministère. Quelques tables subsistaient encore mais le reste était à l'abandon. Et planté au milieu de la pièce, le jeune homme aux tâches de rousseur qui hantait fréquemment ses pensées.

-Florian... Désolé d'avoir utilisé ce stratagème mais... Il faut qu'on discute.


***

Le jeune assistant se figea sous le choc. Thomas le fixait d'un air décidé et il sentit son cœur faire un bond en même temps que son souffle s'emballait. Il fallait qu'il sorte d'ici. Lejeune aristocrate dût sentir sa panique puisqu'il le devança en se dirigeant précipitamment vers la porte pour lui barrer le passage vers la seule issue. Florian serra les poings, agacé de s'être laissé berner si facilement.

-Thomas... Laissez-moi sortir d'ici. Je n'ai rien à vous dire.

Thomas éclata d'un rire sans joie en s'appuyant contre la porte.

-Vraiment Florian ? Rien à me dire sur Victor ? Sur mon père ?

Florian ferma les yeux quelques secondes. Thomas ne se rendait pas compte. Il aurait dû s'éloigner bien avant. Il inspira pour répondre d'une voix calme et maîtrisée.

-J'ai énormément à faire. Votre père va s'apercevoir de mon absence.

-Solange s'est occupé de trouver le bon moment dans son emploi du temps. Nous avons quelques minutes pour que je puisse te dire ce que j'ai à te dire, Florian, l'interrompit le jeune homme d'une voix douce. Florian... Victor s'inquiète pour toi, et moi aussi.

Florian détourna le regard, bien conscient du fait que l'obstination du plus jeune l'avait conduit dans une impasse. Il jeta un regard par la fenêtre pour ne plus croiser ses grands yeux verts.

-Comment va t-il ? Victor ? Finit t-il par demander dans un murmure.

-A ton avis ? Il était furieux et abattu. Des hommes sont venus le provoquer et il a du fermer le bar.

Florian se passa nerveusement la main dans ses cheveux. Bien sûr que le barman réagirait comme ça. Il devait lui en vouloir à mort, et il ne pouvait pas s'en formaliser.

 Il avait trahi des années d'amitié et de confiance, même s'il avait essayé de se convaincre que c'était pour le bien de Victor. Pour ne pas que Johann s'en prenne à lui d'une autre manière. Il le savait, et pourtant la douleur était presque intolérable. Il tenta de maîtriser le tremblement dans ses jambes et se raccrocha à la première table à sa portée. 

Il allait faire une crise de panique. Il lui fallait de l'air.

Il entendit vaguement la voix de Thomas et des mains se poser sur ses bras pour le secouer doucement. Il gémit de douleur et réussit enfin à reporter son attention sur le jeune Goldberg. Contrairement à ce à quoi il s'était attendu, il n'y avait pas de jugement dans son regard, seulement de l'inquiétude et de l'affection contenue. C'était presque pire que la haine. Parce qu'il ne méritait pas la bonté de Thomas. Il secoua la tête vivement.

-Laissez-moi, vous ne devez pas m'approcher. Sinon il s'en prendra à vous aussi, comme par le passé et je ne pourrais pas me le pardonner... Vous ne savez pas de quoi il est capable, s'exclama t-il d'une traite.

Le jeune homme fronça les sourcils et lâcha doucement ses épaules pour prendre ses mains dans les siennes. Florian résista à l'envie de les retirer. Le contact de l'autre lui faisait l'effet d'une brûlure.

-Florian... Est ce que c'est mon père qui t'a fait faire ça ? Est-ce que c'est à cause de lui que tu es comme ça ?

Florian ne répondit pas, mais fixa son regard perdu dans celui du jeune Goldberg. Un espoir insupportable commençait à occuper son esprit. Et si Thomas pouvait l'aider ? Le sortir delà ?

Son silence dût paraître un aveux au jeune homme qui le lâcha avec un juron.

-Florian...Tu n'as pas à l'affronter tout seul. C'est un monstre. S'il a abusé de toi une manière ou d'une autre...

Florian laissa échapper un rictus et sentit l'espoir se faner. Thomas ne savait rien du tout. Sinon il ne proposerait pas de l'aider.

-Tu te trompes Thomas. Quoi que Victor et toi pensiez, vous n'avez pas compris. Johann et moi... Nous sommes tous les deux des monstres. Tu n'as pas la moindre idée de tout ce que j'ai fait pour lui.

Parce qu'elle était là la vérité. Il avait obéi à chacun des ordres de Johann en dix ans, même les pires. Il avait menti, triché, espionné pour lui, et même pire. Du point de vue de l'assistant il ne valait pas mieux que l'autre homme. Il l'avait laissé faire et était devenu son chien fidèle.

Il vit Thomas se figer et froncer les sourcils. Florian sourit tristement. C'était plus simple pour le jeune homme d'imaginer que Johann était le responsable de tout ça. Il avait toujours haï son père, c'était logique. 

Mais il avait été aveuglé par l'affection qu'il lui portait à lui, le petit assistant à l'air inoffensif.

-Retourne auprès de Victor Thomas. Aide le à se remettre de ce moment difficile... Quitte le manoir Goldberg et ne me contacte plus jamais, soupira Florian.

Il fut pris de surprise quand Thomas fonça sur lui pour le prendre dans ses bras. Son cœur s'accéléra brusquement.

-Thomas ?

L'autre homme le serrait plus fort, comme s'il avait peur qu'il prenne la fuite.

-Oh Florian... Qu'est ce qu'il t'a fait ? Qu'est ce qu'il t'a fait pour que tu le laisse t'utiliser comme ça ? Tu ne mérites pas ça...

Florian se tendit. Il méritait exactement ça. Il ne valait pas cette affection, ce rapprochement et l'union de leur deux corps. Il tenta de s'écarter mais la poigne du jeune aristocrate était ferme et lui-même avait perdu beaucoup de force ces derniers temps.

-Je ne sais pas ce que tu as fais pour lui... Mais je sais ce que tu as fais pour moi. Tu m'as protégé de lui. Je m'en souviens maintenant et ... Et Victor m'a dit ce que tu lui avait confessé. Quoique tu aies fait Florian, je serais là. Victor aussi. On ne te laissera pas te détruite ou te convaincre que tu es pareil que cet enfoiré alors que tu es une victime toi aussi.

Florian sentit une partie de sa carapace se fissurer face aux mots de Thomas. Une partie qu'il avait enfoui bien en lui pour ne pas l'écouter et ne pas la laisser le détruire refaisait surface. 

Il se sentait à nu, le cœur à vif et l'esprit en vrac. Il ne pouvait pas être une victime alors qu'il avait fait tant de mal, si ? Il ne pouvait pas. Il était coupable, il devait être coupable.

-Florian ? Calme-toi, respire...

Sans qu'il ne s'en rende compte, sa respiration s'était emballé. Son cœur était hors de contrôle et il se raccrocha au jeune homme pour ne pas tomber. Il allait étouffer, assailli par toutes les émotions qu'il avait rejeté pendant tant d'années. Son front se couvrit d'une fine particule de sueur et une envie de vomir lui tordit le ventre.

Il sentit vaguement Thomas continuer d'essayer de le rassurer et les mains du jeune homme l'entourer comme pour le protéger. Il s'agrippa à lui et ses dernières barrières cédèrent.

Était-ce le fait d'être seul avec le jeune homme, les événements des derniers jours ou l'accumulation d'années de sévices ? Il n'aurait pas su le dire mais à ce moment, enfoui contre le fils de l'homme qui lui avait fait et fait faire tant de mal, il sentait pour la première fois les prémices d'une envie confuse. L'envie de quitter Johann. De s'échapper.

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