10- All I want fo

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J-24 | Dimanche 30 novembre

La vie est vraiment injuste envers ma personne. Moi qui pensais que mon job au café était une bénédiction, finalement, je regrette amèrement ma pensée. Non mais ce déguisement ?! Vraiment ? Je nettoie quelques tables vides et j'essaye de tenir le café en ordre. Ce week-end est le dernier que je passe en formation. Philibert me fait confiance, il me laisse tenir mon rôle entier de serveuse mais il garde toujours un œil sur moi. Avec ma maladresse maladive, je ne peux que comprendre.

- Jaëlle, tu tires la tronche depuis ce matin, me sermonne gentiment Abby, t'es plus mignonne quand tu souris tu sais.
- Même habillée comme ça ?
- Justement, ricane-t-elle, c'est ce qui fait tout ton charme.

Je la fusille du regard et elle éclate de rire. Depuis ce matin, quand mon amie me voit, elle ne peut s'empêcher de se foutre de moi. Demain, nous sommes le premier décembre et mon patron a décidé que le personnel devrait être déguisé pour s'accorder à cette période de fête. L'idée n'est pas si mauvaise. Si les clients aiment voir des serveuses se pavaner en tenue de Noël, grand bien leur fasse. Par contre, je n'étais pas préparée à ce que les vêtements soient inondés de rouge. J'ai freiné des deux pieds quand j'ai découvert la nouvelle en arrivant au boulot plus tôt dans la journée. C'est infâme.

- Mademoiselle, puis-je avoir un autre café s'il-vous-plaît, me hèle un client.
- Bien sûr, je vous l'amène.

Le sourire qu'il me lance me semble étrange : apprécie-t-il ma personne ou est-ce qu'il se moque lui aussi de mon accoutrement ? Je me tourne et le tintement de la clochette sur mon bonnet résonne. Quelques personnes détournent le regard, ne voulant certainement pas me montrer à quel point la situation est hilarante. Je vous rassure mesdames et messieurs, je suis au courant et j'en suis même la victime. Je donne la commande à ma collègue derrière le bar et je m'affale sur celui-ci. Abby est sur un escabeau en train d'accrocher des guirlandes pour permettre à cet endroit d'être davantage dans l'esprit de Noël. Et, moi qui ne supporte pas du tout cet univers, je dois quand même avouer que le rendu est pas trop mal.

Un jeune homme se dirige vers mon amie. Dans mon observation discrète, je le vois l'aborder maladroitement. Je n'arrive pas à distinguer leur échange de façon claire, je devine juste qu'il lui demande son numéro. Abby refuse poliment, souriante et il repart sans insistance. Elle a l'air d'avoir l'habitude. Elle me lance un sourire discret que je lui rends. Quand je vois comment elle est vêtue, tout est clair : elle ressemble à quelque chose comparé à moi. Un costume élégant avec une jupe rouge, un pull blanc, des collants pailletés et un chapeau de Père Noël qui accompagne le tout. Ses longs cheveux blonds s'harmonisent parfaitement avec l'ensemble.

Mon autre collègue me tend le café et je l'amène à la table concernée. Je me prends les pieds dans mes chaussures pointues et je suis sur le point d'embrasser le sol. Finalement, c'est peut-être la seule solution qui s'offre à moi étant donné les circonstances. Peut-être que le patron aurait pitié de moi et qu'il accepterait que je rentre chez moi ? Je remonte mon pantalon vert et noir, dix fois trop grand pour ma corpulence, car j'aimerais éviter de finir le cul à l'air en plein milieu de mon lieu de travail.

Quelle idée de me laisser le déguisement de lutin aussi ?

Le sort s'acharne sur moi. Oui OK, je ne voulais pas prendre le déguisement de mère Noël car le rouge était omniprésent ou encore celui d'Abby vis-à-vis de sa jupe. Mais, est-ce que c'est une raison pour prendre des costumes tout aussi ridicules les uns que les autres ? Je m'approche d'une table, tire une chaise et m'étale de fatigue.

Il est seize heures et à ma grande surprise, le café est loin d'être bondé. Je profite de ce moment de creux pour me poser un peu après cette longue journée. Abby est partie prendre une pause dans la salle de repos, à l'arrière du café. Pendant ce temps, j'en profite pour me pencher sur une feuille que le patron nous a distribuée ce matin. L'endroit s'accorde aux saisons, aux événements, aux moments marquants de chaque mois. Des recettes s'ajoutent à la carte et ce, particulièrement pendant les fêtes de fin d'année. Pour ne pas me sentir ridicule devant les clients s'ils me demandent des conseils, je révise les noms des chocolats chauds - très prisés en cette période - et les particularités de chacun. Je dois être à tout prix opérationnelle et prête à intervenir dès que le moment sera venu. Mon dernier souhait est de me ridiculiser comme j'en ai l'habitude.

Pepperonis for Christmas [TERMINÉE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant