Noël et coupure de journal

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Ils devaient arriver à seize heures, après avoir inscrit leur nom pour la sortie de ce week-end. Liesel autorisait les élèves âgés de plus de quinze ans à quitter le château pour une excursion trimestrielle. Le choix était fait parmi ceux ayant prouvé lors d'un test d'aptitude, passé la semaine précédente, qu'ils maitrisaient leur don dans certaines mesures. Ainsi, ils partaient pour la foire de Noël de la ville voisine.

Toute tentatives pour tenter de convaincre Liesel s'étaient soldées par un échec, la directrice s'était montrée immuable dans sa décision : me faire sortir de l'enceinte du château était prématuré. – Quand alors ? Vous m'aviez envoyé au Tournois avec moins de scrupules ! – Mes aïeux, Kaleb a vraiment tendance à déteindre sur toi, avait-elle grommeler en secouant la tête, sans pour autant cesser son tamponnage de lettres derrière son bureau. – Ne le mêlez pas à ça, s'il vous plait. Je pense pouvoir sortir sans agresser qui que ce soit. J'ai besoin de sortir. La directrice avait fait une pause, sceau de l'Institut figé en l'air. – Besoin, dis-tu ? – Vous ne m'autorisez pas à me joindre aux randonnées du week-end, ni aux excursions au village local ! J'en viens à croire que je ne passerai jamais les grilles à nouveau ! Je serai prudente, et je promets de... – Eden, m'avait-elle interrompu sur un ton laissant entendre qu'elle ne saurait souffrir la moindre objection. Le dernier rapport de Kaleb ne fait état d'aucune amélioration. Ton évaluation trimestrielle laisse à désirer. L'erreur du Tournois ne se reproduira pas. Je suis désolée, mais je ne peux pas prendre sur moi de te laisser quitter l'enceinte du château. J'avais ravalé mes mots, serré les poings et quitté le bureau avec l'impression de m'être faite tapée sur les doigts. J'avais également tenté d'en toucher mot à Kaleb, dont l'avis faisait grandement foi pour Liesel. A mon grand désarroi, il avait refusé de déchausser ses lunettes de professeur pour celle de simple jeune homme et son opinion rejoignait celui de la directrice.

J'étais condamnée à voir tous mes récents amis quitter une nouvelle fois le château sans moi.

Durant une semaine entière, nous avions été convoqués les uns après les autres dans une clairière dans la forêt. Le jury était composé de professeurs, de Liesel et du mentor de l'élève évalué. L'entretien se déroulait en deux parties : l'une était psychologique, durant laquelle l'un des professeurs, aussi psychiatre, faisait parler l'étudiant. L'autre partie consistait pour l'élève à user de leur don, et l'intensité demandé augmentait au fur et à mesure de l'épreuve. Les critères observés n'avaient rien de secret : la vitesse d'exécution, la précision, les réflexes, etc. On notait l'évolution par rapport aux évaluations antérieures.

Mon tour venu, Kaleb m'avait accompagné jusqu'à la clairière.

« Nerveuse ?

– Tu veux rire ? Je me porte comme un charme.

– A l'évidence. »

Son ton ironique reflétait le mien. Mais il n'avait pas insisté, se contentant de me donner quelques conseils serinés déjà des dizaines de fois.

« Sois transparente. Ne t'énerve pas. Mieux vaux...

...une étincelle qu'un feu de forêt. Je sais. »

La métaphore venait d'Helena. Elle avait passé ses tests haut la main.

On avait disposé en guise de cible différents objets, fragiles telle un œuf, ou dur, comme des maillons en acier. La demande avait été simple : fais-en quelque chose.

Bien entendu, rien ne s'était déroulé comme nous l'aurions tous souhaité. Vraiment rien. Ni d'étincelle, ni de feu de forêt. Je m'étais retrouvée incapable de la moindre prouesse. Liesel avait froncé les sourcils mais n'avait rien ajouté. Kaleb aussi s'était passé de mot.

L'Institut FitzgeraldOù les histoires vivent. Découvrez maintenant