Chapitre 25 : Fureur d'ambre et éclat d'améthyste

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— L’agate rayée n’existe pas, fit remarquer le nain d’un ton acerbe. Ce que vous tenez là, c’est du lapis-lazuli, aucun doute possible.

— Vous n’y connaissez rien ! Comment pouvez-vous affirmer de pareilles affabulations ?

Commençant à m’impatienter, je décidai d’intervenir :

— C’est un nain de Dolgarîn qui vous parle, dis-je en prenant Bjorn par le bras. Alors, cessez de nous faire perdre notre temps. 

Je vis le dégarni ouvrir la bouche pour répliquer , mais nous étions déjà trop loin pour l’entendre. Quelque peu énervée, j’entraînai le nain avec moi dans les ruelles pour reprendre notre quête.

— Au fait, merci pour tout à l’heure, me dit mon allié une fois à l’écart. J’ai bien cru que ce gredin ne me lâcherait jamais.

— Merci à toi aussi d’avoir pris ma défense, lui souris-je.

Les minutes s’égrainèrent et nous avions inspecté chaque recoin du marché sans succès. Le temps perdu avec l’homme au vase bleu avait sans doute donné une bonne longueur d’avance à notre voyageur. À l’heure qu’il était, il devait déjà se trouver bien loin. Je commençai à me décourager jusqu’à ce qu’une silhouette attire mon attention au croisement d’une ruelle.

— Regarde ! dis-je à Bjorn.

Le nain s’immobilisa pour suivre mon regard.

— Tu penses que c’est lui ?

— Il y ressemble, tentai-je de me convaincre. Approchons-nous pour en être sûrs.

Isolé des autres, le nomade marcha et s’arrêta contre un rempart. Il jeta un rapide coup d’œil à droite et à gauche avant de pousser le mur en bois du plat de la main.

— Qu’est-ce qu’il fait ? se méfia Bjorn. 

Je n’eus pas le temps d’exposer mon avis que déjà, l’homme disparaissait par une porte dérobée. Après une œillade inquisitrice, nous décidâmes de le suivre. Le passage menait à l’extérieur du village, aux abords de la forêt. Le vent des bosquets s’immisça entre nous et s’engouffra dans les cheveux de Bjorn. Ce dernier ne manqua pas de tenir ses mèches. Je me questionnais sur les raisons de ce curieux geste habituel. Mais je m’interrogeais plus encore sur notre fugitif. 

— Où est-il passé ? chuchotai-je.

Soudain, une masse sombre surgit d’entre les hautes herbes. Au travers des broussailles, deux pupilles luisaient dans la nuit. Je crus d’abord à Tamra ou Morâk, mais l’animal n’avait rien d’un loup. Un feulement se fit entendre et la bête se redressa. Sous l’astre lunaire, je vis une fourrure lisse et brillante se confondre avec l’obscurité nocturne. 

Une panthère. Aussi grande que nos totems.

— Vous faites tellement de bruit que même un sourd pourrait vous entendre... 

Les mots de l’inconnu surgirent dans notre dos et nous firent sursauter.

Je reconnus ce timbre de voix mielleux, son parfum piquant de notes boisées. Il se tenait adossé aux parois, les mains cachées dans les plis de sa cape, la stature droite et fière. Le visage à demi dissimulé sous sa parure en tissu, un sourire de vainqueur étira ses lèvres. Mon instinct ne m’avait pas trompée. La chance avait tourné, car nous l’avions retrouvé.

Sans prévenir, il quitta son point d’appui. 

— Pourquoi vous me suivez ?

Son ton chaleureux se fit froid comme la glace. Le félin noir s’aplatit sur le sol, prêt à nous bondir dessus. Je m’avançai en tentant de maintenir un semblant d’assurance :

L'avènement de l'ombre Où les histoires vivent. Découvrez maintenant