II - Premier rendez-vous.

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"Hold my hand and never let me go because I am so tired of being alone."

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J'ai encore vu ce joggeur, ce matin. J'ai même cru qu'il m'avait souri l'espace de quelque secondes, mais je sais que je me faisais des idées. Je l'admire vraiment, lui et son courage. Il contraste vraiment avec moi. Parfois, quand je le regarde je culpabilise. Il me rappelle à quel point je suis lâche, feignante et bonne à rien, sans aucune motivation. Une fille qui déteste tout. Une fille de plus sur cette terre pour faire chier le monde. Quand il court, j'ai l'impression qu'il se bat pour la vie, pour être heureux, combat que j'ai abandonné depuis longtemps. Je ne fais plus rien de mes journées. Et je repense à ce joggeur, parce que je suis dans la rue, et qu'il fait froid. Parce que je déteste le froid, tout comme je déteste le bruit des klaxons de voiture et tout un tas d'autres choses. J'ai froid, et je me rappelle que je me plains pour rien, et que le jeune homme court tous les matins dans le froid. Ce que je fais à côté, c'est de la rigolade. Je tente de réchauffer mes mains vainement, et me contente de les réfugier dans les poches de mon manteau noir. Je suis presque arrivée. A la bibliothèque.

Je ne sais pas pourquoi je suis revenue à la même heure. Avec mes manuels en plus. C'est bizarre, le garçon aux bouclettes m'inspire confiance. C'est même le seul, avec le joggeur. Je ne comprends pas ce qui me prend, pourtant, je ne lui avais pas répondu. Je lui avais juste souri avant de partir, sans vraiment lui répondre. Je m'étais engagée en rien. Pourtant, j'avais l'impression d'avoir l'obligation de revenir, rien que ses jolies petites bouclettes m'appellent. C'est horrible comme sensation, je ne lui dois rien. Je ne le connais même pas. Ce joggeur me pousse à faire des choses que je n'aurais jamais fait! C'est tellement bizarre cette histoire. Je crois que c'est juste moi qui ne tourne pas rond.

Je me décide enfin à passer les portes automatiques de la bibliothèque, et m'engage dans le fond de la salle. Aujourd'hui, elle est plutôt vide, et quelque part, c'est assez rassurant pour moi. Je n'aime pas quand les choses m'échappent, or ma vie m'échappait. Ironie du sort. C'est peut-être bien pour ça, que je suis devenue ce que je suis aujourd'hui. Je ne suis plus très loin de l'endroit où je me trouvais hier, je ralentis le pas. J'ai peur d'être déçue, plus qu'un rayon et j'y suis. Je crois que je vais retourner chez moi, maintenant je commence à angoisser. Ce serait bête de faire une crise d'angoisse ici. J'étais qu'à un rayon de savoir s'il était là ou pas, et j'allais abandonner si près du but. Et puis, je repense à ce joggeur, et dans un élan de courage, je traverse le rayon sans penser aux conséquences. Et.. Je retrouve la table derrière l'étagère, vide, bah oui, à quoi je m'attendais. Il était bien trop beau pour moi pour que ça puisse être vrai, et en plus je l'ai pris au sérieux. Au moins, il m'aura fait venir jusque la bibliothèque et je pourrai peut-être me mettre enfin sérieusement à mes révisions. Je ne savais même pas pourquoi j'étais déçue. Si, peut-être que pour une fois, j'avais envie d'être la fille qui s'appelait «Hey ». Je voulais juste quelque chose de trépidant, dans ma vie aussi ennuyeuse..

_Comme si on allait te faire ce cadeau. Soufflais-je à moi même, avant d'enlever mon manteau et de m'asseoir à la table.

Je sortis toutes mes affaires de mon sac, et les déposais sur la table. J'avais une pile de livres entassés devant moi, qui faisait deux fois ma taille. C'était tellement motivant. Je pris tout de même le premier de la pile, avant de déposer mes lunettes sur mon nez et d'attacher mes cheveux en une queue de cheval. Pour la première fois depuis des mois, j'allais remettre le nez dans ces bouquins. Décidément, ce joggeur m'aidait vraiment à avancer. Il faudrait peut-être qu'un jour je pense à aller le remercier, quoi que ça serait un peu bizarre. J'aurais sûrement l'air d'une psychopathe, après tout il ne me connait même pas. Les pages étaient incompréhensibles mais, j'essayais tout de même de comprendre. Je n'allais pas abandonner maintenant. Au bout d'une heure, je relevai enfin la tête de mon bouquin, et m'apercevais qu'un certain bouclé qui m'était maintenant familier, me fixait tout en souriant, avec ses petites fossettes.

_Ça fait longtemps que tu me fixes comme ça ?
_Je croyais que tu ne venais pas souvent ici ?
_On se tutoie maintenant ? m'étonnais-je.
_C'est toi qui as commencé ! répliqua-t-il d'un air ahuri.
_Tu m'as surprise, dis-je de mauvaise foi, en haussant les épaules.

Et je ne sais pas pourquoi, mais le bouclé a commencé à sourire, encore plus que tout à l'heure. C'était légèrement beaucoup trop troublant, parce qu'il était vraiment trop craquant comme ça. Comment voulait-il que je me concentre avec ce visage d'ange en face de moi? C'était décidément mission impossible. Il était trop mignon.

_Est-ce que tu veux bien arrêter deux minutes ?
_Arrêter quoi ? s'étonna-t-il.
_D'être aussi mignon.

Je ne sais même pas comment j'ai pu sortir un truc pareil. C'est lui qui me rend comme ça, je sais pas. Le fait est que j'ai l'impression que monsieur le bouclé fait tout pour me rendre à l'aise avec lui, et je trouve que je le deviens un peu trop. Après tout, je ne connais même pas son prénom. Et puis, je me rappelle de ce que j'ai dis, trente secondes plus tôt, et.. Pourquoi j'ai sorti ça aussi, il va croire que je le drague. Je disais simplement la vérité. Je pense que je suis trop franche parfois, ça va me jouer des tours.

_Dit la fille qui se mord la lèvre depuis plus d'une heure, sourit-il encore plus.

Je crois que j'ai rougi, sa réponse m'a surprise. Il insinue que ça fait plus d'une heure qu'il me fixe, non mais j'y crois pas. J'ai rien vu venir. Et puis, je me mordais pas la lèvre! Enfin, si peut-être.. On m'avait souvent fait remarquer que quand j'étais concentrée, je n'étais plus là, et je me mordais la lèvre. J'avais baissé la tête instinctivement, trop gênée, et là j'osais à peine relever les yeux vers lui. Je savais, et je sentais qu'il avait encore son regard émeraude fixé sur moi, son sourire collé aux lèvres et ses petites fossettes. Attendez.. Suis-je réellement en train de parler à quelqu'un, qui plus est, un inconnu hyper beau, et prendre du bon temps avec? Ça faisait tellement longtemps que ça m'était pas arrivé. J'avais oublié à quel point ça pouvait faire du bien parfois.

_Tu t'en sors? Ça m'a l'air bien compliqué tout ça.. tenta-t-il de changer de sujet.
_Non pas vraiment..
_Je peux peut-être t'aider?
_Non, je pense pas que comprennes grand cho..

Il ne m'avait même pas laissé terminer ma phrase qu'il m'avait déjà pris le bouquin des mains. Le bouclé lisait ce qu'il y avait écrit, et fronçait les sourcils. A cette vision, je poussai un tout petit rire. Il était mignon même quand il ne cherchait pas à l'être. Apparemment, je n'étais pas la seule à trouver ce bouquin incompréhensible. Mais là au moins, je trouvais ça moins ennuyeux, et beaucoup plus amusant. Ouais, c'est vrai que c'est cool d'être avec quelqu'un.

_Quand quelqu'un te propose son aide, et que tu en as besoin, ne la refuse pas, dit-il sérieusement, toujours en tentant de décrypter ce qu'il y avait écrit, ce qui rendait la scène encore plus drôle mais ce qu'il avait dit m'avait en quelque sorte touché. On va bien arriver à comprendre ce truc, ajouta-t-il en relevant la tête, et en m'offrant son plus beau sourire.

Et il avait vu qu'on avait échangé les rôles, cette fois-ci, c'est moi qui le fixais et qui souriais comme une débile. Je le trouvais tellement beau, c'était indescriptible. Il n'était pas parfait, mais ses défauts le rendaient encore plus beau qu'il ne l'était déjà. Je ne savais pas pourquoi il était aussi gentil avec moi, mais tout ce que je savais, c'est que je commençais à y prendre goût.

_Est-ce que tu veux bien arrêter deux minutes ?
_D'être aussi mignonne ?
_De me déconcentrer avec une tête aussi craquante. J'essaie de me concentrer là, vois-tu.

Ça faisait vraiment longtemps que je ne m'étais plus sentie comme ça. Je crois que, j'étais heureuse à ce moment là. J'étais réconforté par ce garçon aux cheveux bouclés, et il faisait sûrement ça inconsciemment. Dire qu'il y a deux jours, je ne le connaissais même pas. Je ne saurais même pas l'appeler par son prénom, mais j'ai l'impression de le connaître depuis des années. C'est lui qui fait ça, il rend les gens à l'aise. Il a sans doute une aura qui pousse les gens à être à l'aise avec lui, je sais pas. Je connais pas son secret, mais en tout cas, ça marche.

_Pourquoi tu fais ça ? demandai-je timidement.
_Je fais quoi ?
_Pourquoi t'es aussi gentil avec moi, et tu m'aides alors que tu ne me connais pas ?

« _Parce que ça fait longtemps que j'ai envie de faire ça. »

Heal you [h.s]Donde viven las historias. Descúbrelo ahora