Chapitre 1

259 30 44
                                    

« Les dragonniers étaient l’âme de notre peuple. Devenir l’un d’entre eux représentaient un honneur qu’un nombre infime d’entre nous avait ou aurait la chance de connaître. Ceux qui avait la chance de devenir l’un d’entre eux devait se montrer digne du privilège qui leur avait été accordé. »
Le Tournoi ; une légende naquit du feu et de la cendre,
Côme Shi’Andraï, historien d’Elendil.

Mes cheveux dansaient devant mes yeux. Je rabattis quelques mèches derrière mon oreille avant que d’exhorter Cara à avancer, frissonnant moins de froid que d’excitation à l’approche de la Cité. Elle accéléra davantage le pas tandis que j’espérai toujours arriver à temps.

Les pierres de jade, incrustait le long de sa crinière, scintillaient sous la pâleur de la lune et des flambeaux à l’orée de la ville. Ses sabots claquaient sur les pavés, faisant écho aux battements de mon cœur angoissé. Puis une corne de brume résonna dans la Cité entière, synonyme d’une seule chose.

La sélection allait commencer.

Les fanions rouges, orange et jaunes se dressaient comme des feux miroitants entre les maisons et les hôtels particuliers. La Cité grouillait de monde et bouillonnait d’agitation, c’était un jour de fête comme on n’en voyait peu ; la plus grande célébration depuis quinze ans — plus importante, même, que le couronnement du roi.
Je tirai sur les rênes de ma jument afin qu’elle ralentisse. Des gardes étaient postés à l’entrée de la place pour surveiller et protéger toutes les personnes qui y étaient réunies. D’autres encore effectuaient des rondes de reconnaissance dans les rues alentour. Leurs mains étaient couvertes de cicatrices en forme d’arabesques marquées au fer chaud. La Garde Royale. Je n’avais jamais eu la chance d’observer ces symboles ; ils étaient si impressionnants qu’ils forçaient le respect.

D’ordinaire, elles n’auraient ressemblé qu’à de maigres sillons blancs, ternes et sans relief. Mais ce soir, à l’aube de l’arrivée des dragons, elles resplendissaient de mille feux. Les visages de ces officiers n’exprimaient qu’une immense fierté. Ils protégeaient leur patrie, les habitants de notre royaume et, bientôt, les créatures à venir (quoique ce ne fussent pas l’inverse). C’était un honneur qui leur était accordé. Pourtant, malgré l’ampleur de leur charge en ce jour historique, ils se laissaient eux aussi gagner par l’euphorie du moment. Leurs sourires renvoyaient une partie des espérances de tous les jeunes du pays venus tenter leur chance.

J’avançais distraitement, les mains serrées sur les rênes de Cara. Mes yeux bondissaient d’un endroit à l’autre, s’émerveillant de chaque découvertes et avides de tout ce que la ville avait de nouveau à m’offrir. Je voulais tout voir et tout connaître, me souvenir de tout jusqu’au plus infime des détails.

Sur les pavés, des dessins à la craie et au tracés irréguliers de dragons parsemaient les dalles des rues, dans une explosion de couleur vive. Un vieil homme, accompagné de quelques enfants, continuait ces œuvres d’art avec une passion chaleureuse. Je souris, avant de croiser le chemin d’une femme.

Mes yeux s’écarquillèrent.

Entre ses mains virevoltaient et dansaient des bâtons aux pointes enflammées. Elle maniait l’objet avec une facilité et une agilité déconcertantes. On ne pouvait que pensait qu’il s’agissait d’un don acquis dès la naissance. Un groupe de personnes s’étaient attroupées autour d’elle, aussi surpris et curieux qu’impressionnés.

Sa robe traditionnelle ressemblait à celles des conteurs de mon village. Un drapé rouge partait de ses épaules et venait s’écraser avec légèreté le long du sol, cintré à la taille par un foulard jaune. Je m’extrayais à grand peine de ce spectacle tandis que des musiciens situés de part et d’autre de la place entonnaient l’une des chansons folkloriques du pays. Une douce odeur de nourriture prête à être servie mêlée à celles des sucreries et du vin flottait dans l’air, me rappelant la taverne de mes parents adoptifs.

Le Chemin de l'ÉpéeWhere stories live. Discover now