Chapitre 2

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¤ Louis à Neil, Haz, Bradford :
Li' demande si on veut bouger en bande ce soir...

¤ Neil à Louis :
Je crois que je viens d'avoir une révélation mec !

¤ Louis à Neil :
Et ta révélation t'a informé de ton envie ou non de venir bouffer avec nous ?

¤ Neil à Louis :
Je crois je suis amoureux $)

¤ Louis à Neil :
???
Moi je crois surtout que t'es en manque de sucre. Allez on va manger, ça ira mieux après ;)


***

Il est tôt lorsque nous nous retrouvons pour petit-déjeuner ensemble, la salle privatisée pour notre confort est élégante mais surtout silencieuse et c'est définitivement un plus non négociable lorsqu'il nous faut nous lever à cinq heures du matin pour une journée marathon comme nous les enchaînions en ce moment... La promo tout ça, toujours le même processus, encore et encore pour la quatrième fois.
Tout le monde semblait encore profondément endormi sur sa chaise. Finalement Niall nous avait rejoint la veille au soir pour dîner à l'extérieur et nous ne nous étions pas couché à une heure jugée raisonnable pour un réveil si matinal. Contre mon avis et celui de Liam, nous avions évité clubs et autres bars de nuit pour atterrir tous sur le lit de Zayn à écouter Niall reprendre à la guitare les chansons du prochain album. C'était un de nos rituels. Un de nos multiples rituels de groupe qui s'étaient évanouis cette dernière année.


L'ambiance ce matin était plutôt détendue quoique ensommeillée, Niall engloutissait ses céréales à une lenteur inhabituelle tout en ne lâchant pas son bol des yeux. Zayn divaguait sur twitter, et sa joue écrasée dans sa main libre déformait ses traits parfaits. Liam arborait une coupe de cheveux douteuse bien qu'il semblait être le plus lucide de nous tous, sirotant un café noir tout en griffonnant quelques paroles sur un carnet déjà bien usé. Et puis il y avait Harry...
Harry qui venait d'entrer et saluait chaleureusement le personnel en train d'arranger le buffet. Il avançait en dégageant ses boucles de ses yeux, les rassemblait dans l'idée de les emprisonner en un chignon brouillon. Evidemment les plus rebelles d'entre-elles retombèrent dans sa nuque malgré ses plaintes murmurées. Il y avait Harry qui vint prendre place à notre table, tenant dans une main une assiette garnie de douceurs en tout genre, l'autre tentant encore de dompter ses mèches. Son regard s'arrêta sur moi, juste quelques secondes, un instant éphémère que j'aurais souhaité étirer à l'infini. Je ne savais plus lire ces orbes vertes fixées sur moi mais son attitude trahissait son hésitation. Depuis cette nuit-là nous n'avions plus échangé un mot. Il avait tenté de m'approcher au départ mais j'étais vexé, fâché, blessé, je ne savais plus trop... J'avais seulement envie qu'il se tienne loin de moi. Au moins autant que je souhaitais ses bras autour de moi pour l'éternité. Il y avait Harry qui m'adressait un regard perdu, hésitant à s'installer à mes côtés sur la dernière chaise encore libre, sans savoir que je l'étais certainement tout autant que lui. Harry qui ne m'adressa pas un mot de bon matin quand quelques mois plus tôt il se serait jeté sur moi pour embrasser ma joue à peine le seuil de la pièce franchi. Et ce bien qu'on ne se serait pas quittés de la nuit.


Finalement il y avait moi, mais cela importait peu. J'étais juste Louis, Louis le boute-en-train, Louis le farceur alors je m'acquittais de mon rôle afin de dissiper la tension que l'hésitation de Harry semblait avoir créée.


- Bon alors tu nous le racontes ce coup de foudre Nialler ?

Le dénommé se tourna aussitôt dans ma direction -bien que ce ne fut pas de moi que venait la remarque- s'insurgeant silencieusement, me reprochant sans un mot mon supposé manque de discrétion. Je me défendis d'un haussement d'épaule indifférent : ce n'était pas de mon ressort si Zayn semblait ne plus faire la distinction entre mes affaires et les siennes, nos portables compris.
Puis sans plus s'attarder sur son désir premier de ne pas partager le récit de cette rencontre, Niall s'empressa de le faire sans même que Zayn n'ait besoin de se répéter.

Bientôt il se mit à raconter entre les croissants et le bacon (après avoir fini ses céréales), de quelle façon il était tombé sur deux fans à l'extérieur de l'hôtel en rentrant d'un club tard dans la nuit. Les filles s'étaient, paraît-il, assoupies près de l'entrée secondaire. Il nous expliqua avec hauteur avoir parlé quelques instants avec elles, davantage encore avec la jolie brune folle de lui et au bord de l'hystérie –selon ses dires- lorsque la rousse se fut éloignée pour téléphoner tranquillement. Ils auraient alors plaisanté et multiplié les accolades. Lui, signant des autographes ; elle, souriant à outrance et pouffant à toutes ses blagues – sûrement dénuées d'esprit...

Puis la rousse les aurait interrompus alors qu'il était persuadé de conclure –encore d'après ses propres dires. Elle aurait hâté son amie pour partir, Niall aurait répliqué en les invitant à entrer, juste pour se poser un instant. Après tout elles étaient logées loin d'ici et n'avaient plus aucun moyen de transport à cette heure avancée de la nuit.

A cet instant, Niall se leva avec précipitation faisant trembler la table du petit-déjeuner, et commença à nous mimer théâtralement l'emportement de la rousse qui aurait fait suite à sa proposition, assurément "amicale et rien de plus". Et sans arrières pensées...

- Je vous promets ! Ses yeux sont devenus rouge sang et je suis quasi sûr que ses canines se sont allongées juste sous mes yeux. Elle est passée d'une expression angélique à celle d'un loup-garou affamé !

En résumé –parce Niall parle beaucoup et n'a jamais fait ami-ami avec le principe de concision- l'amie de sa supposée-future-conquête aurait vulgairement décliné son offre, ne lui laissant pas une chance d'en placer une, balançant en toute impunité qu'elles avaient beau être fan de lui, il restait un parfait inconnu et que ce type de proposition était extrêmement déplacé de la part d'un total inconnu. Comme quoi les fans n'étaient pas des hôtesses à sa disposition, ni même de vulgaires pantins aveuglés par leur dévotion.
Et il poursuivit en essayant de nous faire croire qu'il avait encaissé avec détachement, mais j'imaginais avec aisance son petit visage chiffonné, tout penaud et gêné. Ce type de situation le poussait loin hors de sa zone de confort. Lui, le petit ange blond, qu'on préfère d'ordinaire draper de coton pour lui éviter les coups.Pour se rattraper aux yeux de sa toujours-supposée-future-conquête, il aurait ignoré la révolte avec aplomb avant d'appeler son chauffeur perso afin qu'il raccompagne ses nouvelles amies. Aurait chaleureusement salué la jolie brune sans oublier de rajouter son numéro au dos de l'autographe précédemment signé, et brièvement étreint la rousse incendiaire car :
« je suis fâchée, mais je t'aime bien quand même » lui aurait-elle glissé à l'oreille.

Et je doutais encore de la véracité de cette version... Mais il restait Niall, et je préfèrais cent fois son visage orné d'un sourire insouciant plutôt que du froncement vexé de ses sourcils.

- Et...c'était il y a combien de temps ? l'interrompit Harry.
- Sais pas. articula le blondinet, ayant tout juste rejoint sa chaise, la bouche déjà pleine de mets en tout genre. Genre, y a dix jours...

La réaction ne se fit pas attendre autour de la table. J'explosai d'un rire strident alors que Harry et Zayn pouffèrent dans leur bol de chocolat chaud. Liam resta plutôt flegmatique, haussant un sourcil peiné, presque désabusé vers Niall qui s'était brusquement figé à notre entente. Les lèvres entrouvertes sur un mélange prémâché peu ragoûtant -totalement répugnant serait plus adéquat- il poursuivit son analyse de nos expressions, n'assimilant toujours pas le comique de situation.
Liam qui était, semble-t-il, le seul maître de lui-même ; s'empressa d'éclaircir la situation :

- Nialler... Une fille qui ne te rappelle pas aussi longtemps après...c'est pas bon signe. D'autant plus quand tu es mondialement connu...

J'essayai, je promets, mais je ne pus m'empêcher de repartir dans un fou rire me faisant frôler l'hystérie et craindre pour les tympans de mes camarades.

***
J'étais en colère. Dit ainsi, je perdais certainement toute crédibilité et pourtant mon sang bouillonnait et un flot d'insultes avait remplacé toutes les pensées rationnelles de mon esprit.
Nous sortions tout juste de l'enregistrement de Night Changes pour le Saturday Night Live et je ne pensais qu'à me jeter au cou de Harry, et cette fois-ci aucun désir d'étreinte ne m'habitait.
Cet idiot se permet d'oublier jusqu'à mon existence pendant presque deux mois et excepté quelques approches avortées ne me portait aucun intérêt. Puis semblant soudainement animé de pulsions inédites il décidait en plein live d'intervertir le micro de Zayn et le sien afin d'être placé à mes côtés. Cela aux yeux de tous évidemment!
C'était un comportement totalement stupide, et venant de lui cela devenait simplement puéril. Il avait comme quémandé mon attention, se transformant en un infernal môme de six ans tirant sur les jupes de sa mère. Pendant le live, pas une seconde ses yeux n'avaient quitté mon visage, alors non seulement son putain de tempérament bipolaire m'avait fait louper le début de mon solo mais son insistance soudaine et inexpliquée m'avait aussitôt mis dans une rogne folle qui j'en étais certain sera évidente à l'écran.
Pourquoi agissait-il comme ça? Ne pouvait-il pas rester encore un peu dans son coin à oublier mon existence ou au moins reporter ce revirement à un moment où nous ne serions pas cernés par une douzaine de caméras?


Nous sortions tout juste du plateau. Les uns derrière les autres, nous n'échangions pas un mot, chacun encore plongé dans l'atmosphère de la prestation, encore enfermé dans notre ressenti individuel. Le triple idiot clôturait notre file juste derrière moi.
Le manager se matérialisa à nos côtés. Déjà il s'agitait, résumant notre prestation et analysant les plus et les moins de chacun, il parlait à toute vitesse et marchait à reculons devant nous. Je n'attendis pas qu'il aborde le sujet Harry, je ralentis le pas discrètement. Dès que le reste de l'expédition nous eut distancés d'une dizaine de mètres, j'attrapai l'idiot qui se trouvait toujours dans mon dos et nous menai dans un couloir délaissé afin de nous isoler.



- Tu me soûles Harry, t'es totalement incohérent dans tes agissements, j'ai juste plus envie de voir ta tête à longueur de journée, alors respecte ça et arrête d'agir comme un gosse en manque d'attention!.
- Louis ?
- Bien sûr ça va être de ma faute! c'est bien connu que le gentil petit Harry Styles n'est jamais fautif. Il ne connaît certainement pas le sens du mot mesquin!
- Louis... il t'arrive quoi encore ?
- Tu te fous sérieusement de ma gueule Harry, putain mais pourquoi t'agis comme ça ? Ça fait des semaines qu'on ne se calcule plus du tout et soudainement tu me proposes de dormir avec toi, sans explications. Et c'était quoi ça là, ton petit numéro pendant le live? Comme si tu n'avais pas remarqué qu'on agissait comme des étrangers! Bien sûr ma colère semblait n'avoir aucune prise sur ce grand débile, il continuait seulement à me faire face, ses jolis traits brouillés d'incompréhension. Mais toujours aussi calme que j'étais agacé.
- J'avais remarqué Lou... et j'aime pas ça. Mais je te connais, et je me suis habitué aux périodes du "Louis méprisant". J'ai appris à te laisser te gérer dans ces moments-là. Genre...attendre que ça passe.


C'est impressionnant la façon dont notre cerveau se module au fur et à mesure des nouvelles situations que l'on rencontre. C'est cette colère qui ne m'a pas quitté et qui percute autre chose, une autre émotion, plus forte ou peut-être pas. En soi, la tristesse, la colère c'est du pareil au même: on se met en colère pour combattre la tristesse, pour la contourner, l'empêcher de nous ensevelir sous ses larmes et ses pics de douleur amère. On est triste de devoir se mettre en colère pour être regardé, compris. On est triste de voir la colère prendre possession d'un être. On est en colère de voir quelqu'un triste...
Tout ça, ces émotions, sentiments, ressentis, sensations c'est compliqué à gérer et même à comprendre. Tout s'emmêle, on ne sait plus faire le tri alors on élève la voix, et cette fois-ci rien à voir avec la colère: on est juste perdu et on se dit que si notre voix parvient à couvrir la cacophonie qui se joue sous notre crâne alors peut-être que tout s'apaisera et rentrera dans l'ordre.
L'humain est fascinant, et son cerveau tellement complexe... Cet amas de neurone et de matière grise qui nous fait passer d'un état extrême à un autre si rapidement, sans aucun signe avant coureurs. Capable d'occulter certains faits, parfois certaines émotions... Appeler cela l'inconscient. Nous persuadant que nous sommes fou de colère pour mieux nous dissimuler la rancœur et la souffrance qui s'y cache.
Mais l'inconscient est vicieux. Et soudain il décide de rappeler à nous ces souvenirs, ces réalités oubliées qui ont le pouvoir de nous plonger dans un monde différent. Alors notre vision de notre quotidien peut changer du tout au tout. Folle hérésie.
On parle d'inconscient, en réalité il ne s'agit que de nous. Nous planqués sous un masque d'où nous trouvons le courage d'avouer tout ce qui ne nous semble pas convenable de formuler à découvert. L'inconscient n'est pas vicieux, c'est l'humain qui est tordu. Qui cherche à se protéger, s'enveloppant dans un mécanisme de défense ingénieux pour mieux s'écraser lorsqu'il décide que tout à une fin.

- T'agis comme un con avec moi, tu sais que je supporte pas qu'on soit distants...
- Lou... C'est toi le décisionnaire de toute cette connerie.
- Mais je suis censé te faire la gueule! Et toi t'affaiblis mes remparts avec tes comportements vicieux là. Comme si j'étais capable de t'ignorer quand tu me colles comme ça et avec ce sourire idiot sur le visage.
- Je parle pas de la semaine dernière Lou...C'est toi qui m'as repoussé le lendemain de la soirée de clôture de la tournée... c'est toi qui demandais au staff où je me trouvais pour ne plus avoir à me croiser...c'est toi qui nous impose cette distance depuis...


Et parfois la colère surpasse tout le reste, jusqu'à l'entendement. Souvent juste parce qu'il est plus facile de se montrer énervé, agacé que de dire ce qu'on prétend vouloir garder caché.


- Nan mais j'hallucine!


Je n'eus pas le loisir d'analyser la fureur qui s'empara de moi sur l'instant, je pris seulement le temps de fusiller Harry du regard que déjà mon corps se détournait de lui, voulant sûrement lui épargner mon hystérie naissante.


- Louis! Arrête de fuir.
- Au choix Styles, lui hurlai-je au visage en faisait volte-face, soit je m'éloigne de toi maintenant, soit j'éclate mon poing dans ta face!


Harry est quelqu'un de sensé, c'est sûrement la raison pour laquelle il ne tenta ni de me retenir, ni de poursuivre cette discussion.


- Lou... Pourq-


Ou peut-être pas finalement...J'avais déjà parcouru une quinzaine de mètres quand il m'interpella de la sorte, trahissant mon empressement à m'éloigner de lui et du tourbillon que sa présence faisait invariablement naître en moi. Évidemment je marquai un arrêt, il restait Harry et ce n'était pas dans mes capacités de le négliger ainsi.
Et bien que ma colère eut le temps de faire son chemin dans mes veines jusqu'à atteindre la moindre parcelle de mon corps, j'avais besoin d'une réponse. Peut-être cette dernière aurait le pouvoir d'apaiser la tornade que j'étais devenu. Je restai dos à lui, le souffle court et les poings pressés contre mes côtés je passai de hargneux à fébrile.

- Dis-moi que c'était après...


C'était presque une plainte, une supplication...


- Louis? Pourquoi c'est toujours les choses qu'on ne veut pas formuler à haute voix qui doivent l'être. Ce ne sont jamais ces choses-là que l'autre parvient à lire entre nos lignes.
- Ton mec...dis-moi que cela c'est passé après...çà.
- Après quoi Lou?
- Tu sais bien, après çà... Tu penses que cela à...tu sais, influé sur ton...envie de nouveauté?
- Mais de quoi tu parles Louis?
- Tu te joues de moi? La soirée de clôture...et ce qu'il s'y est passé.
- Et...Tu cibles un moment particulier ? Faut avouer que cette soirée reste plutôt floue dans mon esprit... Et rien avoir avec son ancienneté...


Et cet idiot osa ponctuer sa phrase d'un rire bref.


- Tu ne... Tu as oublié!?!
- De quoi tu parles à la fin Louis? J'ai fait un truc de travers, c'est pour ça que tu me tires la gueule depuis?


Cette fois c'en était trop, je me sentais sur le point d'imploser, et malgré ma rage entièrement dirigée contre lui je ne souhaitais pas le compter dans les dommages collatéraux. Je m'éloignai de nouveau, les pieds fracassant le sol à chacun de mes pas, toujours plus fort. Si fort que je ne l'entendis plus ni s'agiter, ni s'interroger. J'étais déjà trop loin


***


- Sûr?
- Oui Zayn! Je vais bien.


A ce niveau-là il ne s'agissait plus d'une insistance guidée par l'inquiétude, cela virait à l'obsessionnel.
Zayn s'était considérablement rapproché de moi depuis l'éloignement soudain entre Harry et moi, qui avait, il faut l'avouer, ébranlé le fonctionnement habituel de notre bande.
Avant -comme c'est dur de penser à cette période comme révolue-, avant c'était moi et Harry et bien que nous partagions tout à cinq, les autres nous avaient bien fait comprendre que malgré tout et sans forcément user de volonté nous cultivions notre monde à nous d'où nous étions les deux seuls habitants. Ils avaient tous fait avec, l'acceptant sans nous mettre de côté, acceptant d'être exclus de notre duo si spécial.
Dans les faits, ce n'était pas réellement Zayn qui s'était rapproché, nous nous étions trouvés. Deux âmes plus ou moins en peine qui réalisaient avoir soudainement besoin d'un pilier. Quelque chose du genre. Je n'avais plus Harry et mon quotidien s'en trouvait chamboulé, or j'ai toujours eu besoin de repères stables dans ma vie. Quelle ironie. A défaut d'avoir un chez-moi où rentrer le soir, ma famille auprès de moi ou des amis loyaux, j'avais Harry. C'était lui qui maintenait l'ensemble des fondations branlantes de mon existence en place.
Zayn, c'était plus compliqué. Il était à rang égal notre meilleur ami, puis au travers des années il s'était forgé une image de solitaire, totalement indépendant de nous. Présent lors de nos bons moments en groupe, bien qu'il n'en soit jamais un réel participant. Il se rapprochait dangereusement du simple collègue...
Au moment où j'exécrais la solitude que m'imposait l'absence de Harry, Zayn souhaitait se défaire de cet indépendance qui commençait doucement à lui peser.
Nous nous étions trouvés au milieu de toute cette obscurité à laquelle nos quotidiens semblaient s'être réduits. En fin de compte nous nous étions bien trouvés, tous les deux sombres avec des tendances à tout foirer, de vrais aimants à conneries. A croire que nous aimions être au sol.


- C'est faux, ce refrain s'éloigne de la vérité depuis que Harry et toi n'êtes plus... Louis et Harry.


Forcément il ne s'attendait à aucune réponse et se contenta de hâter le pas, se calquant sur ma soudaine accélération. Nous allions encore être en retard, et nous allions encore être les seuls à se prendre un savon.


- Louis...il faut que vous mettiez les choses à plat, c'est intenable cette tension. Pour tout le monde


Oui c'est vrai que moi je le vis très bien, que je fais tout pour que cette situation perdure!


- C'est juste...plus possible. Je peux plus parler avec lui. Ca me bousille à chaque fois
- Je suis sûr que c'est juste un gros malentendu. Vous êtes Louis et Harry. Vous revenez toujours l'un vers l'autre, quoi qu'il se passe.


Je croyais comme toi il y a peu...


- Arrête. Il n'en a plus rien à foutre. C'est juste une autre ère, c'est...bien comme ça aussi.
- Tu crois pas toi-même en tes paroles Louis...
- Oh, on est arrivés!
- Où? Au bout de ta connerie?


Zayn entra sur l'arrière scène légèrement propulsé sous le coup d'épaule que je lui assénai en réponse. C'était une nouvelle scène ce soir nous nous trouvions quelque part en Europe et avions été convoqués en urgence pour les dernières balances et vérifications techniques nous concernant.
Les trois autres étaient déjà présents. Niall se trouvait à la place de notre batteur, lui ayant certainement volé sa place dans un moment d'inattention de ce dernier, et s'amusait actuellement à produire un vacarme sans nom. Harry discutait dans un coin avec un des régisseurs, son éternelle bouteille d'eau ouverte à la main.
Et puis il y avait Liam.
Liam totalement prit dans son interprétation de Uptown Funk. Le micro levé vers le ciel à la verticale de sa bouche, un bras en balancier accompagnait ses mouvements de jambes, il se déhanchait furieusement sur le rythme entraînant.


- "I'm too hot ( hot damn)"


Le pire arriva au moment du refrain.


- "Say my name you know who I am!"


C'était...tordant. Il s'égosillait tout en balançant son bassin de droite à gauche.


- Arrête de faire ta pute Payno! Déjà qu'avec tes selfies de mec en rut tu as causé plus d'arrêts cardiaques que la coke!
- C'est vrai que tu ressembles à un gigolo au boulot Liam...


- Tiens! Blanche-Neige nous accorde son attention, grognai-je d'une voix basse.
On dit que la rancœur peut rendre mauvais. Je ne l'ai jamais dûment constaté...


- Tu peux parler Haz, t'es putain de provocant sur scène avec tes boutons de chemises au chômage forcé.


Liam appuya ses propos d'un clin d'œil en lui subtilisant sa bouteille d'eau et en vida la moitié d'une seule gorgée.


Une fois toute l'équipe regroupée nous commençâmes sérieusement les balances et je fis tout pour me retrouver en permanence du côté de la scène opposé à celui où déambulait Harry. Forcément j'étais davantage concentré sur mes flagrantes tentatives d'esquives que sur mon chant, ce qui me valut quelques remarques bien placées du Tour manager.
Au moment de ranger le matériel et de nous défaire des batteries, micro et oreillettes, la tension s'était déjà accrue. L'ensemble du processus de répétitions prenait plus de temps simplement car je refusais d'approcher Harry à moins de cinq mètres et que ce dernier -ayant remarqué mon manège puéril- marquait son agacement par force de soupirs et de gestes brusques.


La tension ambiante franchit encore un palier dans le minibus qui nous rapatria à l'hôtel. A peine fus-je installé qu'Harry esquissa un geste pour prendre place à mes côtés, me pensant acculé contre la portière il espérait sûrement enfin me confronter. Ses fesses eurent tout juste le temps d'entrer en contact avec le cuir du siège que ma main gauche actionnait la portière et que j'extrayais mon corps de l'habitacle. Et je pus sentir son regard me brûler le dos avant de claquer la porte derrière moi.
Je fis le tour du véhicule sous les regards incrédules de Zayn et Liam encore à l'extérieur de celui-ci. Figés devant mon comportement inattendu, je dus les bousculer un peu puis leur faire signe de grimper pour qu'ils s'animent de nouveau. Je les suivis finalement, satisfait de pouvoir prendre place à l'exact opposé d'Harry.
Je gardai mon nez collé à la fenêtre, le regard vers l'extérieur tout le long du voyage. Niall tenta désespérément de lancer une conversation et de plaisanter avec les autres, en vain. La tension avait atteint son apogée à la suite de mon petit numéro et étouffait actuellement chacun d'entre nous.
Après une quinzaine de minutes à s'épuiser seul et sans soutien Niall finit par la boucler définitivement. L'atmosphère pesante nous engloutit alors et s'abattit sur nous telle une chape de plomb. Finalement le blabla de Niall n'était peut-être pas si vain que je l'avait cru.


Arrivés à destination, Zayn assis à mes côtés ne me laissa pas le temps de me redresser. Déjà il escaladait mes genoux, abandonnant toute douceur, afin de s'extirper le plus rapidement possible de l'habitacle. Liam tenta de croiser mon regard mais je me détournai pour voir Zayn ouvrir la portière avec fracas. Il ne se retourna pas pour me fusiller du regard et pourtant, à son ton tranchant c'était tout comme.


- Vous faîtes grave chier les gars !

Les gars... Plus Harry et Louis. Et plus Louis que Harry

A Long Way DownWhere stories live. Discover now