ACTE 4-WHAT WE ARE LIVING FOR ✨ Grise

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🎧 𝑩𝒍𝒖𝒆 𝑾𝒆𝒅𝒏𝒆𝒔𝒅𝒂𝒚, 𝑴𝑼𝑹𝑴𝑼𝑹𝑨𝑻𝑰𝑶𝑵 🎧

La chaleur moite de début septembre écrase Nantes, mais pourtant, le vent serpente encore entre les arbres bruissants doucement

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La chaleur moite de début septembre écrase Nantes, mais pourtant, le vent serpente encore entre les arbres bruissants doucement. Il caresse ma peau, se glisse dans mes cheveux, comme un vieil ami qui viendrait me taquinait. C'est vrai que je commence à avoir l'habitude du vent, moi qui aie élu domicile sur la butte du Jardin des Plantes. J'y vais tous les jours après les cours, qu'il pleuve, qu'il vente ou qu'il fasse beau. C'est ma bulle d'oxygène, mon havre de paix dans cette ville qui m'étouffe chaque jour un peu plus. Je ne sais pas pourquoi, mais dès le premier jour, je suis tombée amoureuse de cet endroit. Les feuilles des arbres, charnues et veloutées à la fois, jamais de la même couleur deux saisons de suite, le ciel d'un bleu d'éternité, seulement parcouru çà et là par de légères traînées d'écumes, comme autant de vapeurs fugaces sur cette nappe immaculée... je suis loin de tout, je ne pense plus à rien.

Soudain, mon champ de vision est couvert par une énorme masse marron disons plus... humide. Encore prise dans la quiétude de mon jardin secret, je mets quelques secondes à réaliser qu'il s'agit en fait d'un énorme bobtail, qui s'applique à couvrir consciencieusement chaque centimètre carré de mon visage de bave poisseuse.

- Hé, arrête ! J'ordonne en vain en tentant de me relever, les membres endoloris, un énorme chien plein de poils s'écrasant sur ma poitrine. Ce qui ne sert à rien, évidemment. Ce chien inconnu, visiblement fou d'amour pour mon épiderme, semble déterminé à l'inonder sous des hectolitres de bave gluante et de poils rêches. Quand j'arrive enfin à me dégager, après une lutte sans merci, je n'ai pas vraiment fière allure : le visage trempé, les cheveux pire que d'habitude, les vêtements dégoulinants. Le chien s'est assis dans l'herbe à côté de moi, la queue frétillante, visiblement très satisfait de son œuvre. Il y en a au moins un de content, visiblement.

Mais qu'est-ce que je vais faire de ce chien ? Il sent bon, a l'air à peu près dressé, mais il est tout seul. Je ne peux pas le ramener chez moi, ma mère et moi nous partageant un T3 bordélique où les objets disparaissent et apparaissent à leur convenance, il n'y a pas vraiment la place. Je n'ai donc qu'une solution : partir à la recherche de son maître. Youpi, c'est parti...

Je me redresse sur mon séant douloureux. Se faire attaquer par un énorme chien couvert de poils, c'est le genre de choses qui pourraient arriver dans un de ces romans débiles que je lisais en CM2. Alors le maître du chien surgirait, comme par hasard un garçon magnifique et doué, et une folle histoire d'amour commencerait. Dans la réalité, c'est sûrement un quinquagénaire douteux qui promène son chien débile dans les allées du Jardin des Plantes. Mais des fois je me dis que pourquoi pas ? Si ça arrive dans les romans, pourquoi pas à moi dans la vraie vie ? Et puis je me regarde dans un miroir, moi, mes cheveux rêches, mes yeux d'un marron douteux sillonnés de cernes, et je me dis que jamais, jamais, ça n'arrivera. Je suis bien trop moche, bien trop commune. La vie n'est pas un roman de Cathy Cassidy.

- Hum, hum.

Une voix grave s'élève et me tire de mes pensées moroses.

Le chien a rejoint son maître, et ils se tiennent tous deux à la lisière de la forêt.

Et il s'avère que c'est tout sauf un quinquagénaire douteux.

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