« Demain. Mais on ne se préoccupe pas de ça, tu veux ? »

Naël n'est jamais difficile à convaincre alors on se retrouve à préparer des crêpes en pleine nuit, simplement pour le plaisir de passer un moment tous les deux. Dans un film, on aurait certainement transformé ça en bataille de farine pour s'embrasser en riant au milieu du chaos, mais la réalité c'est qu'on n'aurait pas assumé de faire le ménage ensuite. Je me contente de goûter la pâte sur son doigt après qu'il l'ait testé lui-même, le regard pétillant de gourmandise.

Comme nos crêpes ressemblent plus à des pancakes, nous rajoutons quelques pépites de chocolat. On n'arrive malheureusement pas à en manger une seule parce que la fatigue qui nous tombe dessus au moment de la dégustation nous coupe l'appétit.

« Je crois qu'on a préparé un super petit-déjeuner.

— Mes parents vont être contents.

— Et toi ? T'es content ?

— T'as pas idée à quel point. »

Le baiser qui suit me donne des ailes à tel point que, pour la première fois depuis des mois, lorsque je reçois un message de William qui m'annonce que Fabio lui a présenté quelqu'un d'adorable, je m'en balance complètement.

Le message de ma sœur, le lendemain matin, en revanche, m'a complètement retourné.


SMS

Marie : Gabriel, il faut que tu rentres.


Ce n'est pas grand chose, mais j'ai senti qu'il fallait que je le fasse pour de bon et en urgence. Quand je suis rentré chez moi, en fin de matinée, je ne m'attendais pas à trouver mes parents dans le salon, à m'attendre comme s'ils avaient compté sur le message de ma sœur en étant certains que je serais là dans la minute. C'est plus ou moins ce qu'il se passe, c'est vrai, mais j'ai du mal à comprendre.

« Euh... salut.

— Assied-toi. »

La voix de ma mère n'a rien de doux et mon père fuit mon regard. Marie n'est même pas là, comme si elle ne voulait pas assister au massacre. Je m'assois face à eux.

« Les parents de ton camarade de classe sont passés hier soir.

— Mon camarade ? Quel camarade ?

— Christopher Williamson. »

C'est plus fort que moi, je pouffe de rire.

« Ah, tu trouves ça drôle ?

— Bah... c'est bon, fallait pas me faire revenir si c'était pour me refoutre à la porte pour la même histoire.

— Gabriel, mais c'est grave, ce que tu as fait !

— Non.

— Si. Ils ont accepté de ne pas porter plainte sous les supplications de leur fils, mais je t'assure que c'est grave.

— Porter plainte ? Mais pourquoi ils porteraient plainte ?

— Parce que tu as fait une fellation à leur fils contre son gré. »

L'espace d'un instant, le temps s'arrête. J'essaie de comprendre comment les parents de Christopher ont pu croire ça et, à part qu'il leur ait menti, je ne trouve rien. Mais pourquoi il aurait fait ça ? Si c'était pour se venger, il n'aurait pas pris la peine de les supplier de ne pas porter plainte ?

« Gabriel ? »

Alors si ce n'est pas une vengeance, qu'est-ce que c'est ? Je soupire en comprenant plus ou moins. Son excuse habituelle pour traîner avec moi, c'est qu'il est bourré. Mais bourré au lycée ? Un sportif ? Impossible. Alors s'il n'était pas bourré, je l'ai forcé. Ce taré me fait passer pour un gros porc de violeur.

GabrielWhere stories live. Discover now