C'était lui

𝒬𝓊𝒾𝓃𝓏𝑒 𝒹𝑒́𝒸𝑒𝓂𝒷𝓇𝑒

          Parfois, je me demande pourquoi j'accepte de faire ce qu'il me propose, car il est fou ! Il est dingue ! Non, il est simplement plus déjanté que la moyenne, mais reste un homme génial. Sincèrement, aller faire du shopping, le jour où nous devons fêter le nouvel An, c'est de la folie ! Il y a tellement de monde dans les magasins qu'il est presque impossible de se déplacer ! Je le suis comme je peux, car je n'ai pas le choix, et si je ne m'étais pas accroché à sa main, je l'aurais perdu depuis longtemps. Il a cette manie de toujours vouloir être au top du top ! Je suis parfaitement d'accord avec, dans le sens où, effectivement, il est toujours très beau, bien soigné et possède une classe inhumaine. Seulement, de là à faire les courses aujourd'hui, c'est débile !
          Malgré cette guerre que nous avons finit par remporter, je peux dire avec certitude que je suis content qu'il ait fait ce shopping, autrement, il serait un râleur toute la soirée. Elvin, que ne ferais-je pas pour toi ? Il a réussi à me convaincre de m'acheter une nouvelle tenue, qui, je l'admets, me va très bien. Un trois pièces bleu marine qui va merveilleusement bien avec mes yeux. Il a aussi pris l'initiative de m'acheter des lentilles de contact pour que je puisse commencer la nouvelle année sans mes lunettes de vue. Ce qui est un bon prétexte pour que je les laisse à l'hôtel.
          Après la séance de shopping, nous sommes allés au coiffeur de l'hôtel, malgré le peu voire aucune place disponible, Elvin a réussi à convaincre la gérante de nous coiffer. Son charisme est incroyable. Il sait parler aux inconnus, les séduire et surtout marchander. Il a ce don qui fait que tout le monde est obligé de l'apprécier. C'est pour cela que je suis tombé amoureux de lui. Il est l'homme parfait. Parfois, j'en suis convaincu et certain. Je pourrais même dire avec certitude que c'est cet homme que je veux épouser et avec qui finir ma vie. Sans lui, je ne serai qu'un simple homme de science accroc aux mathématiques et qui vivrait sans jamais connaître les joies de la vie. Il est celui dont j'avais besoin, celui que je recherchais inconsciemment dans mon existence.
          Maintenant qu'il fait partie de ma vie, malgré mes souvenirs avant sa rencontre, je peux dire que je ne pourrais pas vivre sans lui. Il me remonte, il me rend meilleur et il sait me comprendre, malgré mon caractère complexe et de merde. Je fais souvent mon intéressant avec mes connaissances, sauf avec lui. Dès le départ, je n'ai pas su me montrer arrogant et monsieur, je sais tout. Avec sa soeur, c'était facile d'être celui que j'étais, mais Elvin possède une aura qui m'empêche de lui faire du mal. Je n'ai pas envie de le blesser, de l'offenser ni me croire au-dessus de lui. Elvin me canalise. Il me rend un peu plus humain. Il me montre qui je dois être. Il me guide sur le droit chemin. Je promets de lui écrire tout ceci dans une lettre en rentrant qu'il sache ce que je pense de lui. Je l'ajouterai à mon pseudo-testament, comme ça, je n'oublierai pas son rangement. Je devrais aussi mes voeux pour notre éventuel mariage, je ne veux pas que ces mots s'échappent de mon esprit. Je veux qu'il sache qu'il compte pour moi. Elvin n'est pas un simple ami ou petit ami, il est celui que j'ai choisi.
          - À quoi tu penses, avec ce merveilleux sourire ? Me demande-t-il, enfin prêt à sortir.
          - Je me disais que je suis heureux avec toi, avouais-je, en inclinant légèrement la tête pour qu'il ne voit pas mon visage rougir.
          - Oh ! Andrew ! Moi aussi, je suis bien avec toi. Je suis tellement fou de toi, si tu savais !
          Je ne dis rien et tends mon bras pour qu'il saisisse ma main. Il est presque vingt-trois heures et nous devons nous rendre, à pied, à Time Square pour le décompte. Nous avons appelé le room-service, car tous les restaurants de la ville étaient complets pour ce soir, ce qui est logique. Nous avons donc préféré miser sur la soirée, plutôt que sur la nourriture. Elvin saisit une bouteille de champagne que nous avons acheté dans le mini frigo, puis nous quittons la chambre, le rire à la gorge.
          Nous nous baladons dans les rues de New York, tout en se tenant fermement les mains, car il y a beaucoup de monde. Nous trouvons un trottoir peu bondé et nous faisons une petite pause pour que je puisse reprendre mon souffle. Elvin vérifie sur son téléphone si nous sommes encore loin de Time Square et il m'annonce qu'il nous reste un peu plus de cinq minutes de marche. Je le suis avec plaisir et nous tentons de nous introduire au milieu de la foule. Seulement, ça m'angoisse d'être entouré d'autant de monde. Elvin le remarque tout de suite et nous rebroussons le chemin. Il me demande si je vais bien. Je lui annonce qu'aller là-dedans est trop difficile pour moi.
          - Venez avec nous ! On a accès au toit de cet immeuble, nous interpelle un inconnu. Dépêchez-vous de nous suivre.
          - Viens ! On les suit, m'ordonne Elvin en me tenant la main.
          - Elvin, on ne les connaît pas !
          - C'est ça la magie du Nouvel An ! Il y a deux règles à respecter durant le Nouvel An et je rêve de pouvoir les faire.
          - Et, c'est quoi ? Demandais-je, en continuant de le suivre.
          - D'abord, s'introduire à une fête ou, comme équivalence, faire la fête avec des inconnus. Et la seconde, c'est à la fin du décompte.
          - Venez, c'est par ici ! Nous appelle l'inconnu.
          Plusieurs personnes entrent dans le bâtiment, dont Elvin et moi. Je constate que personne ne se connaît, sauf les groupes d'amis. Nous devons être une vingtaine au maximum. Elvin remercie le jeune homme qui nous a invité, puis nous nous dirigeons vers les ascenseurs. Je fixe Elvin pour deux choses. La première, je le remercie et le fusille du regard pour être ici avec des inconnus, et il le comprend parfaitement, car son sourire veut tout dire. Secondement, j'aime connaître la fin de son récit à propos des règles du Nouvel An. Qu'est-ce qui peut bien se passer à la fin de décompte ? En me posant la question, la réponse me vient immédiatement : un baiser. Évidemment, j'aurais dû m'en douter. Je n'ai jamais fait ça. En même temps, je n'ai jamais eu de petit-ami auparavant. Je ne sais pas si je vais réussir à l'embrasser. Nous sommes avec des inconnus. Ils vont tous nous sauter dessus pour nous souhaiter « bonne année » et on ne pourra même pas profiter de notre premier baiser de l'an 2020.
          - Qu'est-ce qui te tracasse petit génie ?
          - Le décompte est dans moins de dix minutes. On est avec des inconnus. Je voudrais uniquement avec toi.
          - Ne t'en fais pas, j'ai prévu un petit quelque chose, me rassure-t-il en me faisant un clin d'oeil.
          Je me tais et suis la bande d'amis qui se dirige sur le toit. Fort heureusement pour moi, il y a un haut rebord et je ne crains pas de rejoindre l'extrémité du bâtiment. Je guigne en bas et découvre que nous sommes très haut ! C'est dingue la foule qu'il y a ! C'est complet ! Il n'y a pas un centimètre vide ! C'est magnifique ! Et tous ces écrans ! C'est le spectacle le plus beau que je n'ai jamais vu. J'en ai les frissons !
          - Andrew, m'appelle Elvin. Viens avec moi.
          Nous allons de l'autre côté du toit, là où il n'y a personne, mais nous entendons encore les autres. En même temps, avec une foule pareille qui ne les entend pas ? C'est incroyable. J'ai l'impression de rêver. Elvin vérifie que personne nous suit, puis il pose la bouteille de champagne au sol. Il a déjà enlevé tout ce qui enrobait le bouchon et il ne manque plus qu'à le retirer. Je suis si heureux de me trouver ici que je ne cache pas mon vilain sourire. Elvin partage également sa joie en me serrant dans ces bras. Après quelques secondes, il saisit mon visage et me contemple.
          - Si tu savais comme je suis heureux de t'avoir rencontré. J'ai cette impression de t'avoir cherché pendant tout ce temps, sans jamais te trouver. Quand je t'ai vu pour la première fois, au Lycée, je ne me suis pas dit que tu étais un ringard et binoclard. Au contraire, je n'ai pas tout de suite compris ce qui m'arrivait. Et lorsque je suis venu à toi pour me présenter, mon coeur m'a clairement fait comprendre que j'étais tombé amoureux de toi en un temps record. Le coup de foudre. Tout le monde voyait tes pseudos défauts à la con, mais moi, je te voyais toi. Je voyais au-delà des apparences et le cours de math qui a suivit a confirmé mes sentiments pour toi. Ce soir, je suis avec toi, pour fêter la nouvelle année et rien ne pourrait me faire plus plaisir.
          - Dix !
          - Merde ! J'ai pas le temps de te répondre !
          - Ce n'est pas grave mon amour, sourit-il. Sept !
          - Elvin ?
          - Cinq ! Oui ?
          - Je t'aime.
          - Andrew... Je t'aime aussi.
          Je croyais avoir vu le bonheur plus d'une fois sur son visage. Or cette joie qui s'émane de ce sourire est bien plus expressive qu'à n'importe quel moment que nous avons vécu jusque-là. Son baiser est également différent que toutes les autres fois où j'ai eu cette sensation qu'il m'aimait plus qu'à l'ordinaire. Mon coeur bat si vite ! C'est de la folie ! Cet amour que j'éprouve et qu'il partage à mon égard dépasse toutes les réalités que je m'étais imaginées. Elvin parvient à me transmettre cet amour et cela amplifie mon sentiment. Rien ne peut me rendre plus heureux à cet instant précis. Lui comme moi partageons nos larmes de joie qui s'invitent à notre baiser.
           Je réalise que nous sommes dans une bulle, une bulle romantique, car je n'entends plus rien. Je ne fais que ressentir Elvin de tout mon être. Il n'y a que lui et moi. Je comprends désormais ce que sont le véritable amour et le romantisme. Quel idiot j'aurais fait si je n'avais jamais connu ceci. Je ne regrette rien et jamais je ne pourrais remercier Elvin autant qu'il ne le mérite. Je suis comblé de lui avoir dit que je l'aime, car c'est sincère, c'est vrai et ça vient du coeur. J'ai trouvé que le moment était bien choisi, malgré qu'il soit cliché pour beaucoup de films et livres, pour moi, c'est quelque chose que je ne concevais même pas l'été dernier. C'est magique, magnifique et inédit.
          - Andrew, je suis tellement heureux que je voudrais sauter de joie ! Je voudrais ne jamais dormir et passer toute ma vie avec toi ! Faire des nuits blanches pour profiter un maximum de nous et notre amour ! Tu n'imagines pas comme je suis l'homme le plus heureux du monde !
          - C'est la même chose pour moi ! M'excitais-je comme lui. C'est comme si des ailes pouvaient pousser dans mon dos pour que je puis m'envoler avec toi au pays de l'amour infini !
          - Andrew, tu es encore plus niais et romantique que moi, rit-il.
          - C'est parce qu'on se complète, je deviens aussi amoureux que toi.
          - Bonne année, Andrew Matthew Gregg.
          - Bonne année, Elvin Camille Martins, répondis-je en omettant de gueuler d'avoir fouillé dans mes affaires pour connaître mon deuxième prénom.
          - Champagne ! Hurle-t-il en secouant la bouteille, puis éjectant le bouchon.
          Il boit directement à la bouteille et il me la tend pour que je l'imite. Qui ne tente rien n'a rien ! Je bois aussi et éclate de rire quand je m'en mets partout. Elvin reprend la bouteille pour boire dedans et nous continuons à nous la passer jusqu'à ce qu'elle soit vide. Durant ce temps, nous sommes retournés vers les inconnus et avons trinqué ! Je ne pensais pas que je me sentirai aussi à l'aise avec des inconnus et dans un endroit que je ne connais pas. Je suis vraiment heureux de vivre cette expérience. Elvin ne me lâche pas la main et me couvre de baisers.
          Nous restons deux heures avec les inconnus qui ont de quoi manger et boire dans des sacs en plastique. À croire qu'ils ont tout prévus. Elvin et moi profitions avant de rentrer à l'hôtel. Le voyage était long à cause des embouteillages humains. Et ce n'est qu'à cinq heures du matin que nous trouvons notre nid douillet. Et je sais pertinemment que la nuit de sommeil n'arrivera pas tout de suite.