Chapitre 5

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Sa feuille sous le bras, les clefs de sa chambre dans une main, sa lourde valise dans l'autre, Joanne arpente les couloirs de l'hôtel à la recherche de sa chambre, la tête levée pour arriver à apercevoir les numéros cloués aux portes des chambres. Elle croise un chariot poussé par une femme de ménage et doit se coller contre le mur pour réussir à passer. « Rentre le ventre », se dit-elle intérieurement, retenant sa respiration pour s'exécuter tandis que le chariot passe devant elle sans ralentir, comme si elle lui devait la priorité. Elle soupire avec bruit, autant pour reprendre sa respiration que pour marquer son agacement. Toute cette journée commence sur les chapeaux de roue et la fatigue n'arrange rien. Véritable boule de nerfs sur le point d'exploser, Joanne finit par jeter sa valise sur un des lits de sa chambre, quand elle parvient enfin à la trouver. Bientôt, elle finit par la rejoindre, enfonçant sa tête dans l'oreiller en grognant.

- Wow et bien, salut colocataire, fait une voix derrière elle.

Elle sursaute et se tourne avec vivacité, causant une vive douleur dans sa nuque, dont le nerf se coince. Jurant, elle met sa main sur la zone douloureuse pour la masser alors qu'elle dévisage la jeune femme qui se tient sur le seuil de la porte. Celle-ci pousse une valise trois fois plus grande que la sienne, qu'elle met bien sagement dans un coin de la pièce avant de refermer la porte et de s'assoir sur le lit restant, fixant toujours Joanne avec un sourire amical.

- Je suis Eva et on va habiter ensemble pendant un mois, dit-elle en se présentant. A moins que tu ne souhaites réellement t'étouffer avec ce coussin, auquel cas je vais être dans l'obligation de t'en empêcher.

- Non non, je... je suis fatiguée, c'est tout. Je m'appelle Joanne.

- Fatiguée alors qu'on a même pas encore commencé ? Tu es plutôt mal parti alors, ma vieille !

En une réplique, Joanne perd la première bonne impression qu'elle avait eue de la jeune femme. Celle-ci commence à déballer ses affaires, comme si son ton moqueur avait été tout ce qu'il y avait eu de plus normal. Constatant que la conversation s'arrête ici, elle l'imite, ouvrant la fermeture-éclair de son propre bagage.

- Tu déménages à chaque fois que tu vas à l'hôtel ? ne peut-elle s'empêcher de demander sur le même ton.

Elle désigne du menton la valise d'Eva et celle-ci sourit, visiblement peu touchée par le sarcasme.

- J'aime avoir le choix quand je m'habille, explique-t-elle. Et puis, un mois de tournage, c'est quand même long. Toi, tu es sûre que tu auras assez ?

Pendant un instant, Joanne se pose exactement la même question. Plus elle sort ses affaires pour les ranger dans l'armoire, plus elle constate qu'elles sont idéales pour l'été, un peu moins pour l'automne qui arrive. Elle réalise qu'elle n'avait absolument pas pensé à ce détail et se met à compter sur une météo clémente pour lui sauver la mise. Mais devant Eva, qu'elle ne connaît pas mais qui l'agace déjà, elle préfère garder la face. Elle affiche son sourire le plus confiant et affirme, une robe légère à la main :

- Mais bien sûr !

Les sourcils d'Eva se hausse mais elle a le bon sens de ne rien ajouter. Joanne termine bien évidemment de ranger ses vêtements avec elle et retourne s'allonger sur le lit, en retirant ses chaussures cette fois-ci. Enfin allongée, elle ferme les yeux et s'endort presque quand la voix de sa colocataire la sort à nouveau de ses pensées.

- Je vais explorer les environs, tu viens avec moi ?

Sa voix est douce et la proposition plutôt amicale mais Joanne préfère refuser, argumentant qu'elle n'a que peu dormi et que si c'est réellement si dur que la nouvelle venue semble le penser, elle préfère rattraper un peu de son sommeil avant de commencer. Eva n'insiste pas et quitte la chambre, lui permettant de s'endormir à nouveau. Son repos est lourd et sans rêve, trois heures plus reposantes que toute la nuit qu'elle a passé. A son réveil, elle se sent mieux mais un regard dans le miroir la prévient qu'elle doit se remaquiller avant de se montrer au public. La première impression doit toujours être bonne. Elle retire donc le mascara qui a coulé sous ses yeux avec un coton-tige avant de se rechausser pour aller déjeuner. Elle met un peu de temps à trouver la salle, avant d'être guidée par un des employés de l'hôtel jusqu'à une grande véranda donnant sur une terrasse, celle-ci donnant elle-même sur le paysage des montagnes alpines et de la campagne provençale. Absorbée par la vue, Joanne va sans réfléchir s'assoir à l'une des tables avant qu'un autre employé lui demande d'aller ailleurs, expliquant que ces places sont réservées.

Those Ocean Eyes [FR]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant