Le carnet ouvert 5.

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Maman me lisait toujours Le Petit Prince avant que je n'aille rejoindre le pays des rêves. Je ne me souviens plus jusqu'à quel âge. Mais je me rappelle très distinctement le jour où elle m'a donné son vieil exemplaire, un peu corné et jauni. J'étais si heureux.

Je l'ai toujours. Il est sur ma table de chevet. J'en lis quelques phrases, quelques pages tous les soirs. Comme si elle était toujours là pour me le conter. J'ai l'impression de pouvoir sentir ses doigts qui caressent mes cheveux, tandis que sa voix chuchotante me raconte ce récit fabuleux et me berce jusque dans les bras de Morphée.

Mais je ne dors plus comme un enfant. Mon sommeil n'est plus entier ou paisible. Il est rythmé par des respirations fortes, saccadées, des sueurs, des insomnies, des frissons. Je fais des cauchemars, ils hantent mes nuits blanches et même avec ma faible lampe pour m'éclairer dans le noir, j'ai parfois peur de fermer les paupières.

J'ai peur qu'elle ne s'efface. Je peux survivre sans elle, mais pas sans son souvenir. Déjà, je ne suis plus grand-chose, alors si elle disparaît... Si on me l'enlève, je ne suis plus rien.

Ce soir, je serre Le Petit Prince tout contre mon coeur. Peut-être que l'empreinte de maman, la réminiscence de ses doigts sur le papier, pourrait m'atteindre et m'offrir quelques heures de sommeil nécessaires.

Parfois, quand j'étais effrayé, triste, elle me serrait dans ses bras. Elle m'enlaçait fort. Son parfum de vanille envahissait mes narines, mes sens. Et elle caressait mes cheveux en me disant : Ne pleures pas mon bébé, ne pleure pas. Je suis là. Maman est là pour toi.

Alors, je ne pleure pas. Pour elle, si elle me regarde de là où elle est, je ne pleure pas.

C'est une promesse. Je lui ai toujours juré d'être fort.

Le carnet || Larry.Where stories live. Discover now