22. Dis-moi oui

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MAX

Est-ce que je venais vraiment de demander à Marie si elle voulait être ma petite-amie ?
Oui , je crois bien .
Est - ce que j'ai l'impression d'être un ado de quinze ans de nouveau ?
Oui .
Est - ce que je n'aurai pas dû attendre un peu avant de le lui proposer ?
Je crois que si .
Est-ce que je regrettes pour autant ?
Non .

Malgré tout ; je suis fièr de moi de lui avoir proposé de jouer aux devinettes . J'espère juste qu'elle ne trouvera pas tout avant moi ; sinon je devrais respecter ma promesse .
C'est dingue ; j'ai tellement peur qu'elle soit effrayée en voyant l'état dans lequel je suis . J'ai tellement peur qu'elle trouve ça ... répugnant ; que ça la dégoute .
Je ne crois pas que je le supporterai ...
J'ai mis tellement de temps à reprendre confiance en moi après l'accident  ...

SIX MOIS APRÈS L'ACCIDENT

- Bon ; ça suffit ; me sermonne mon meilleur ami ; il faut que tu te  reprennes . Tu ne peux pas continuer à être comme ça ; tel un légume .

Ouais ; facile à dire quand on a encore ses jambes . Il ne peut pas comprendre ; personne ne peut comprendre .
Même pas ma propre mère ; qui n'a pas daignèe venir me rendre visite après l'accident . Elle m'a simplement appelé pour me reprocher d'avoir pris le volant un soir de pluie .
Comme si j'avais pu deviner que ça signerait la fin de ma vie .
Comme si j'avais pu deviner que je perdrais la femme de ma vie .
Comme si j'avais pu deviner que je deviendrais handicapé .

Quand j'étais petit ; je lui ai souvent demandé pourquoi elle me détestait autant ; elle me répondait simplement que depuis le décès de mon père ; lorsque j'avais dix ans ; l'avait rendue si triste qu'elle n'était plus capable d'aimer personne . Même pas son propre fils .
J'ai grandi à Paris ; dans une petite maison ; puis avec Laure ; avons emménagé dans une maison non loin de la Capitale ; au bout de six mois de rencontre .
Les quatres années que nous avons passées ensemble ont été formidable . On se comprenait en un regard ; on se complétait. Je l'ai aimé dès l'instant où je l'ai vu .
Et désormais ; elle n'est plus là. Elle n'est plus à mes côtés .
Plus jamais je n'entendrai son rire mélodieux .
Plus jamais je ne sentirai son souffle sur ma peau .
Plus jamais je ne sentirai ses lèvres sur les miennes .
Plus jamais je ne l'entendrai chanter ses chansons préférées.
Plus jamais . Plus jamais . Plus jamais . Ces trois mots tournent en boucle dans ma tête . Il faut que je m'y fasses ; mais ça m'est tellement insuportable que je me voile la face .

- Comment veux  - tu que j'avances ? je hurle . Comment veux - tu que j'ailles mieux alors que j'ai perdu la femme que j'aime le plus au monde ? Que je ne pourrais plus jamais marcher ? Que je suis vide . Je me sens vide , tu n'as pas idée . Je ... j'aurai préféré mourir à sa place . Putain ; jamais je n'aurai dû prendre le volant ! Jamais ! je crie ; hors de moi .

Marc me fixe ; comme s'il comprenait soudainement . Comme s'il comprenait que je souffrais terriblement et que rien ne pourrait y changer .
- Je ne sais que te dire ; à part que je suis désolé . Je ... putain ; ça me brise le coeur de te voir comme ça , mon pote . Je te jures que si je pouvais ramener Laure à la vie ; je le ferai dans la seconde qui suit . Mais je ne peux pas ; personne ne le peut . Et je sais qu' elle aurait voulu que tu sois fort ; que tu ailles de l'avant ...

Et soudainement ; je me mets à pleurer . Je pleures tellement que j'ai l'impression de ne plus rien sentir . Ça me fait tellement de mal ; et je me sens si brisé , si vide ; si ... malheureux ; que j'ai envie de crever .

Marc reste un moment auprès de moi , ne disant rien . Il se contente de me prendre dans ses bras ; de me dire que tout ira bien . Si seulement c'était vrai . Mais je sais que plus rien ne pourra aller .
Elle me manque beaucoup trop pour que tout aille bien . . .

****

- Alors ? je redemande à ma jolie Marie ; une demi - heure après.

J'étais tellement perdu dans mes pensées que j'en ai oublié notre conversation ...

- Ah ; tu es de retour ! Tout vas bien ?

Non.
- Oui ; ne t'inquiète pas ; je me préparais  à manger .
- À cette heure ci ?
- Il n'y a pas d'heure pour manger ; je mens une fois de plus.

Inutile qu'elle sache à quoi je pensais . Je ne suis pas encore prêt à partager tout ça avec elle . Pas que je ne le veuilles pas ; seulement , je ne suis pas certain que ce sont des choses qu'elle ait envie d'entendre, alors ; ça attendra .

- Moui . Bon ; pour répondre à ta question ; et avant que tu ne le prennes mal ; c'est non . Attends ; laisse - moi t'expliquer ; je dis non maintenant parce qu'à mes yeux ; il est important que l'on apprenne à encore mieux se connaître ; qu'il est essentiel de prendre notre temps . Je veux dire , ce serait dommage de tout accèlérer et de tout gâcher , non ?
- Si tu le dis ; je réponds , légérement vexé .
- Ne le prend pas comme ça Max ; tu sais très bien que j'ai raison . Ne précipitons pas les choses .
- Sans doute . Mais ; je t'aime et je sais que tu m'aimes aussi ; voilà tout .
- C'est vrai . Mais je préfère que l'on soit sur à cent pour cent de nos sentiments . Je n'ai pas envie de tout foutre en l'air en brûlant les étapes .
- Comme tu veux . Bon , il se fait tard ; prétexté - je pour ne pas qu'elle se doute de quelque chose . Je vais finir de manger et dormir . Bonne nuit , Marie .
- Attends ; ne réagit pas comme ça , je n'ai pas dis non ; seulement que je voulais qu'on prenne le temps .
- Ne t'en fais pas ; j'ai parfaitement compris ce que tu avais dit . Bonne nuit ; je répète à ma voisine , décidément indécise .
- Bon très bien , prends-le comme tu veux ; mais saches que ton comportement me déçoit ... bon, eh bien ; bonne nuit Max . À demain ?
- Non , pas demain . J'ai de la visite .
- D'accord ... Lundi alors ?
- On verra Marie , on verra . Bonne nuit ; dis-je pour la troisième fois ; incapable de rester véxé bien longtemps .
- Bonne nuit ...

Merde ; je suis vraiment con quand je m'y mets ! Qu'est-ce qu'il m'a pris de réagir comme ça ?
Tu le sais très bien ; me souffle ma conscience ; tu n'aimes pas que l'on te dise non ... Tu veux tout ; trop et tout de suite . Et ça finit par te jouer des torts .

Ouais ; et ben en attendant ; je me sens sacrèment seul et bête d'un coup !

N'importe quoi .
Si Laure me voyait ; elle serait d'accord avec ma conscience .

Pour l'heure ; il est temps que j'aille dormir . Demain , Éloïse et mon neveu débarquent et je n'ai pas envie de ressembler à un zombie .
J'ai si hâte de les voir .
Et en même temps si peur ; car Éloïse est la copie conforme de Laure ...
Et je sais que je ne pourrai m'empêcher de penser à elle .
Parce que je n'arrive toujours pas à me faire à l'idée que Laure est partie définitivement .

Et que ça me fait un mal de chien ...

Mon cher voisinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant