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Le lendemain matin, je suis réveillée par des coups sourds contre ma porte. Au moins mes geôliers ont eu la prévenance de ne pas venir me tirer du lit aux aurores...

- C'était trop beau pour être vrai, hein ? commente Maël alors que je me redresse dans mon lit pour resserrer le peignoir autour de ma taille.

Comme mes charmants hôtes ne m'ont pas fourni de pyjama adéquat, il a fallu que j'improvise.

- Pitié ! gémis-je. Est-ce que je dois leur ouvrir ?

- Si tu comptes partir de là un jour, je te conseille de faire semblant de les écouter jusqu'au bout. Ensuite, tu pourras affirmer que leurs histoires ne t'intéressent pas et revenir à ton train-train quotidien.

Maël a affirmé ça avec le sourire, et pourtant quelque chose dans ses paroles augmente la pression qui s'exerce au niveau de ma cage thoracique. Se pourrait-il qu'un pourcentage infime de mon inconscient se réjouisse d'en apprendre davantage sur l'organisation qui a recueilli Axel ? Non... Je ne dois pas me permettre de penser comme cela et de me laisser influencer. Que me disait Harper hier soir ? Que je n'étais pas de taille à survivre dans un tel environnement ? Il n'a sans doute pas tort, j'ai toujours été plus chochotte que mon frangin. Et pourtant... je meurs d'envie de clouer le bec à ce sale petit prétentieux.

On toque à nouveau à ma porte, me rappelant par la même occasion que je suis toujours en sous-vêtements sous mon peignoir et qu'un oiseau a planté son nid durant la nuit dans ma tignasse emmêlée.

- Mademoiselle Rivière ? Vous êtes réveillée ?

- Oui, oui !

Je parviens à enfiler mon jean et mon chemisier sans trébucher dans ma précipitation, il n'en va pas de même pour mes cheveux, qui je crois, auraient mérité que je leur consacre un peu plus de temps...

- Vous n'étiez pas obligée de vous presser, m'assure Josias en détaillant ma coiffure avec intérêt. Enfin, si vous êtes prête, venez : monsieur Fortin nous attend.

Monsieur Marvan insiste pour que je laisse mon pull et mon manteau dans la chambre. Avec une faiblesse que j'attribuerai plus tard à l'étrange petite voix qui chantonne dans ma tête, j'accepte ce compromis et le suis en sens inverse jusqu'à la salle de réunion. Mon estomac se crispe de douleur à ce constat : j'ai faim, terriblement faim. À bien y réfléchir, je n'ai rien avalé depuis plus de vingt-quatre heures.

- Le directeur adjoint a fait preuve d'une attention qui devrait vous plaire, sourit Josias en m'ouvrant la porte. Après vous, je vous en prie.

J'inspire à pleines narines et laisse échapper un petit cri de surprise devant l'étalage de nourriture qui nous attend sur un plateau.

Attendez... Tout ça, c'est pour moi !?

- « Ventre affamé n'a point d'oreilles », me prévient Maël. Je serais toi, je ferais attention : ce type a toutes les qualités du manipulateur.

- Bienvenue, Allyn ! s'exclame Loïc Fortin en se levant pour m'accueillir en bonne et due forme. Comme je me souvenais que vous n'aviez rien avalé la veille, je me suis dit qu'un petit brunch ne serait pas de refus pour entamer la journée. Qu'en dites-vous ?

- Que pour la première fois depuis notre rencontre vous m'apparaissez comme un homme sensé, affirmé-je en me laissant couler sur ma chaise sans quitter les brioches et le bacon des yeux. Je peux ?

- Mais je vous en prie.

Je ne m'embarrasse pas de manières pour engloutir mes premières tartines. À la quatrième, je sens mon ventre réclamer une pause et en profite pour étudier les deux hommes qui ne se privent pas plus que moi. Loïc, qui a intercepté mon regard, se redresse sur sa chaise et essuie ses lèvres enfarinées avec une serviette en papier afin de reprendre comme si de rien était :

Les Arcanes d'Hemera - Tome 1Where stories live. Discover now