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Observer, entendre, sentir et goûter...

Ses petits crocs déchiraient les morceaux de viande que la meute lui apportait. Sa mâchoire manquait encore de force pour broyer les os, mais ses papilles pétillaient au contact de la chaire. Langue, babines et même ses poils se gorgeaient du souvenir de ces instants. L'eau de la rivière rafraichissait l'haleine chaude après repas. Sa langue passait sur ses pattes, récoltait les gouttes et les miettes qui s'étaient faufilées jusque-là, puis léchait ses poils, sans savoir qu'ainsi il faisait sa toilette.

Tout propre et son petit ventre rond, il s'allongeait dès que le sommeil se faisait sentir, avant de fermer les yeux et de s'endormir...

C'était si bon. Le petiot rêvait de la forêt, de la chasse et de la meute. Courir et courir, il se voyait grand déjà, puis courir encore après des proies imaginaires ; s'entrainer à se coordonner ; se placer ; rattraper à larges foulées, se placer en tête de la meute, être le premier à bondir au cou du gibier pour y plonger ses crocs ; et hurler, hurler à la Lune, que la meute se rassemble et pousse son hymne à la nuit.

Lorsqu'il se réveillait il ressentait cette faim, cette soif, cette envie, ce besoin, d'aller et venir, de se rassembler et hurler, de chasser et manger, non guider par le goût du sang, mais par le goût de la meute, le goût de la forêt, le goût de la vie, sa vie et son devenir.

Par le jeu, l'imitation et ses rêves, le louveteau prenait goût et se préparait aux choses de la vie.

Le mouton qui rêvait d'être un loup [Fable]Where stories live. Discover now