Chapitre 17 [2/2] ~ Les Deux Orphelins

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- Précédemment -

— Vous êtes certain de n'avoir vu aucune pèlerine, là-bas ? demanda Noà à Matharach à voix basse pour que Töm ne l'entendît pas.

— Je n'en ai aucune idée, petit. Je n'ai pas pris le temps de m'attarder sur les corps déjà froids. Parmi ceux que mes enfants et moi avons secourus, je peux te certifier qu'il n'y avait aucun pèlerin.

     Au même instant, Töm et Iryanä rejoignirent les deux élémentaires, suivis de près par Kalyö et Aria. La xomythoise avait retrouvé des couleurs. Elle s'excusa auprès du groupe d'une voix fébrile et leur assura être prête à poursuivre la route.

— Je lui ai fait boire de l'eau dans laquelle j'ai administré de la sève soporifique, murmura Kalyö à Noà après l'avoir entraîné à l'écart. Mets-toi derrière elle et assure-toi qu'elle ne tombe pas pendant le voyage.

     Pris au dépourvu, Noà écarquilla les yeux et se tourna vers son amie.

— Du calme, ça n'a pas un effet immédiat, précisa Kalyö. Ça suffira à l'apaiser, le temps qu'on trouve un endroit pour passer la nuit.

     Noà retourna alors sur le dos de Kréah, en s'assurant qu'Aria était bien cramponnée. Dans un rugissement majestueux, la dragonne reprit son envol et s'éleva dans le ciel, jusqu'à ce que ses longues ailes vinssent percer les nuages.


     Comme l'avait mentionné Kalyö, Aria s'endormit quelques minutes après le décollage. Plus rien ne perturba le vol des quêteurs. Noà en profita pour admirer les paysages qui défilaient sous ses yeux. Forêts somptueuses, terres désertiques, côtes escarpées derrière lesquelles sommeillait, à l'ouest, la Mer Septentrionale ; le xomythois en avait le souffle coupé. Le crépuscule peignait le ciel d'un halo rosé. Tous décidèrent finalement de s'arrêter en début de soirée, dans une vaste plaine aride toutefois rafraîchie par le vent nocturne.

     À défaut de quelques arbres capables de les protéger d'une averse inattendue, rien ne leur permettait de faire profil bas. Iryanä et Kalyö protestèrent longuement pour changer d'endroit, mais après avoir volé toute la journée, les signes de fatigue montrés par Dylix et Kréah confortèrent Matharach dans l'idée de ne pas aller plus loin. Imité par ses congénères, le père des dragons installa son couchage de fortune. Il sortit de son sac quelques denrées qu'il dévora en un rien de temps.

— Il nous manque juste un feu de camp, une histoire, et ce serait parfait, plaisanta Töm après s'être glissé dans son duvet.

— C'est trop dangereux. On risque de se faire repérer, répliqua Iryanä sans daigner le regarder.

— C'était ironique... l'humour, tu connais ?

— Le feu de camp peut-être, mais une histoire ne devrait pas poser de problème, intervint Kalyö. Matharach ?

— Oh non, petit, protesta le concerné, les yeux cyan levés au ciel. J'ai passé l'âge de raconter des histoires à des mômes.

— Vous m'avez dit tout à l'heure que votre rencontre avec vos dragons était une « longue histoire », indiqua Noà.

— C'est vrai que je n'ai jamais su comment tu les avais trouvés, enchaîna le commandant du troisième escadron.

     Devant l'enthousiasme soudain de ses cadets, Matharach, vaincu, poussa un long soupir. Il se posa sur le ventre afin de leur faire face. Une illumination traversa ses orbes cristallins tandis que ses souvenirs lui revenaient en mémoire.

— C'était il y a plus de quinze ans, lorsque je dirigeais encore le deuxième escadron, commença-t-il. Avec mes soldats, j'étais chargé d'extraire des zircons de leur gisement, à l'intérieur d'une montagne. Après des heures de recherches, l'expert qui nous accompagnait a fini par comprendre que nous nous étions trompés d'endroits et qu'il fallait rebrousser chemin.

Le Conte d'Ustral. Tome 1 ~ L'Oracle du TempsWhere stories live. Discover now