PRÉLUDE

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La nuit commençait à tomber, il faisait doux et je courais au milieu d'une vallée verdoyante, grisée par l'odeur fraîche et sucrée de l'herbe qui s'écrasait sous mes pieds. Au dessus de moi, un immense aigle Tyran tournoyait en faisant miroiter les derniers rayons du soleil de son plumage bleu roi. J'étais euphorique ; j'avais l'impression d'à peine effleurer le sol sur lequel je bondissais pour m'envoler avec lui.

Arrivée au sommet d'une des plus hautes montagnes, je trouvais un lac diaphane niché au creux des roches. Je m'apprêtais à m'y rafraîchir lorsque je l'aperçu.

Son corps cuivré était sublimé par le ruissellement de l'eau le long de ses muscles saillants. Je sentis mes joues rosir de plaisir. Ses cheveux bruns retombaient sur son front, soulignant un regard puissant. Il m'observa un instant, puis, toujours sans un mot, il s'approcha.

L'idée de m'enfuir m'envahit un instant. D'une main ferme et douce, il enserra ma taille, ses pupilles brillantes ancrées au fond des miennes. Je sentis mon sang frémir à m'en brûler tout le corps. Je ne savais pas qui il était mais ma chair fiévreuse ne savait pas résister. Je le laissais faire quand, lentement, il amena mon corps contre le sien. En goûtant à son baiser, je su que je ne saurais plus m'en passer, et, grisée par la force de ce sentiment nouveau, je me laissais envahir sans résistance par la chaleur de sa peau encore humide.

Lorsque je rouvris les yeux, le bonheur de le retrouver là, allongé à côté de moi, ne fut pas un instant ombragée par le goût de fer glacial que je sentais dans le fond de ma gorge. J'admirais ce sourire que j'adorais déjà, à peine froissée de ne pouvoir distinguer les sons qui m'entouraient. Rien d'autre ne m'importait que la sensation merveilleuse de son corps contre le mien.

Jusqu'à ce que je remarque la coulée vermeille qui ruisselait le long de ma poitrine.

C'est à ce moment seulement que je compris le piège dans lequel je venais de tomber. Lui ne s'inquiétait pas, il n'était pas même interpellé par la douleur qui m'engloutissait, il ne faisait qu'observer le fluide rouge qui continuait de s'écouler.

Le cri perçant de l'aigle Tyran résonna dans la silencieuse vallée. Je senti ma chair se glacer avant qu'un mélange de sang et de larmes ne me plonge dans l'obscurité.

SACRAS - Tome I : PréludeWhere stories live. Discover now