Chapitre 7 :"Sa flexibilité m'a scié."

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Robyn


La vieille directrice de l'école primaire arbore trois TOC qui m'agaceraient si je n'étais pas aussi chambardée par l'objet de sa convocation. Elle se racle la gorge toutes les trente secondes, renifle toutes les minutes et pianote sur son bureau en permanence avec ses ongles. Avec ses cheveux poivre et sel tirés en arrière dans un chignon strict, ses lunettes à écailles et son tailleur gris, elle me fait penser à une de ces institutrices de l'ancien temps qui tapaient sur les doigts des enfants avec une règle en bois. En l'occurrence, c'est sur mes doigts que sa règle imaginaire est en train de taper.

– Mademoiselle Lewis, je comprends votre situation personnelle, je vous assure. Le personnel de notre établissement accorde une attention particulière aux enfants qui vivent au sein de foyers monoparentaux. Anya est une petite fille curieuse et intelligente, l'une des meilleures élèves de la classe de madame Sambel. Elle participe beaucoup à la vie de la classe et elle est appréciée de ses petits camarades. Jusqu'à présent, tout ce que l'on pouvait lui reprocher était sa tendance au bavardage excessif. Mais ce qu'il s'est passé aujourd'hui ne doit pas se reproduire, sinon je me verrais dans l'obligation de réunir un conseil de discipline qui édictera une mesure de sanction plus sévère qu'un simple rappel à l'ordre et cent lignes à recopier dans un cahier en retenue.

– Autrement dit, madame Gabin ?

– Son exclusion temporaire de l'école, mademoiselle Lewis.

Je tombe des nues.

Anya a toujours été une enfant sage, bien intégrée et sans histoire. Jamais elle n'a manqué de respect à un enseignant ou à un camarade. Mais aujourd'hui, dans la cour de récréation, elle a frappé un garçon de sa classe au visage, au point de le faire saigner du nez et pleurer à chaudes larmes. Quand son enseignante m'a appelé tout à l'heure au travail pour m'en informer, je n'en ai pas cru mes oreilles. "Mon Anya a fait ça ? Vous en êtes sûre ?" J'étais sous le choc et je le suis encore à l'heure actuelle.

Un incident qui a lieu trois jours après l'intrusion de Lucas chez nous.

Depuis trois jours, ma princesse a des problèmes de sommeil. Elle a du mal à s'endormir – je reste assise à son chevet en lui tenant la main et en lui chantant une berceuse jusqu'à ce que ses paupières se ferment – a des terreurs nocturnes qui la réveillent et a fait pipi au lit à deux reprises. Il ne faut pas être un génie pour comprendre qu'elle est perturbée par la réapparition de son père dans nos vies. Son geste de violence à l'école conforte malheureusement mon sombre sentiment.

– Mais pourquoi a-t-elle donné un coup de poing à ce garçon ?

– Elle n'a pas voulu le dire à son institutrice. L'autre élève a dit qu'elle l'avait attaqué sans raison.

– Non, madame Gabin. Je connais ma fille. ( Elle ouvre la bouche pour répliquer ; je ne lui en laisse pas le temps. ) Ne vous méprenez pas, je ne dis pas ça pour l'excuser car rien ne peut justifier un tel comportement, mais elle n'aurait jamais eu un geste aussi extrême si elle n'avait pas été blessée elle-même d'une quelconque façon.

– Madame Sambel m'a dit que son père était sorti de prison récemment. ( J'acquiesce. ) Je vois.

Non, elle ne voit pas. Elle ne voit pas plus loin que le bout de son nez crochu. Elle ne sait pas ce que nous avons vécu toutes les deux.

Le prince charmant existe!(Il est italien et tueur à gages) *Publié chez BI*Où les histoires vivent. Découvrez maintenant