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Traîtresse, songea Eren. De toute évidence, sa fidèle gouvernante avait envie de jouer les entremet tueuses. Et pour cause, elle ignorait que Livai était hostile à toute forme d'engagement. Eren ne l'avait pas oublié, et malgré lui cela lui serrait encore le cœur. Il ne pouvait plus nier ses sentiments pour lui, tout en sachant qu'ils ne faisaient que compliquer un peu plus la situation.

Les mains dans les poches, il entra dans la pièce et se promena en observant tout autour de lui. Il prit sur lui pour ne pas le chasser, certain que par esprit de contradiction il aurait encore plus envie de fureter. Il se contenta de l'observer tandis qu'il se déplaçait de sa démarche félin qui, malgré lui, le faisait frissonner de désir.

Respirant profondément pour tenter de recouvrer ses esprits, il garda les yeux rivés sur lui tandis qu'il examinant les croquis accrochés au mur et le dessin au crayon exposé sur le chevalet. Il se dirigea ensuite vers la planche à dessin, puis regarda son calendrier avant d'aller voir le panneau en liège auquel il avait fixé des dizaines de photos d'enfants tenant des jouets.

Son bureau se trouvait au premier étage, à l'avant de la maison. Mika l'appelait la tour. Les fenêtres donnaient sur un lac bordé de pins, et à l'arrière plan on voyait les montagnes s'élever vers le ciel. C'était une pièce de taille moyenne, juste assez grande pour contenir le matériel nécessaire et pour lui laisser un peu de place pour faire les cent pas quand il avait besoin de réfléchir. Néanmoins, à l'instant où Livai était entré, c'était comme si les murs s'étaient resserrés autour d'eux et il souffrait tout à coup du manque d'espace.

-Qu'est-ce que c'est que tout ça ? demanda-t-il calmement en se tournant enfin vers lui.

-Mon travail, répondit-il en se levant.

Il n'avait aucune envie de rester assis et de le laisser le regarder de haut.

-J'ai créé une association qui fournit des jouets aux enfants hospitalisés. Je l'ai appelé le Coffret à jouets de Mika, ajouta-t-il en regardant avec émotion les photos qu'il gardait sous les yeux pour trouver l'inspiration. Je dessine les jouets que je fais faire par un fabriquant, et ensuite l'association les distribué en fonction des besoins.

-Qu'est-ce qui t'a amené là ?

Comme il se tenait toujours devant le panneau de liège, il le rejoignit pour regarder les photos avec lui.

-Quand Mika était malade, répondit-il, nous avons passé beaucoup de temps à l'hôpital avant d'obtenir un diagnostic. À force de côtoyer des enfants malades et angoissés, j'ai découvert qu'un animal en peluche, une poupée ou même un petit avion pouvait leur apporter du réconfort dans la solitude.

Il laissa échapper un soupir en se rappelant les heures passés dans des salles d'attente avec d'autres papas ou mamans dévorés par l'inquiétude.

-J'ai tenu Mika sur mes genoux pendant que les médecins l'examinaient sous toutes les coutures. Elle avait peur, mais au moins j'étais là pour la réconforter. De nombreux enfants passaient beaucoup de temps tout seuls à l'hôpital car leurs parents avaient d'autres enfants et un travail qu'ils ne pouvaient pas abandonner. Les infirmières sont formidables mais, avec tout ce qu'elles ont à faire, elles ne peuvent pas toujours prendre le temps d'apaiser les angoisses d'un enfant.

-J'aurais voulu être là. Pour Mika. Pour toi.

En entendant sa voix grave et douce empreinte de regret, il se tourna vers lui. Son regard était si sincère qu'il se sentit plus proche de lui que jamais. Même s'il n'avait pas été présent dans ces moments difficiles, c'était lui le père de Mika, et désormais il comprenait comme lui ce que signifiait avoir un enfant malade.

-Moi aussi, j'aurais aimé que tu sois là, confia-t-il en plongeant les yeux dans les siens. Je sais que c'est à cause de moi si tu étais absent et j'en suis vraiment désolé.

L'enfant de Livai Ackerman. Où les histoires vivent. Découvrez maintenant