Chapitre 4

107 9 2
                                    



Le vent embrassait les feuilles des arbres, les entraînant dans une douce valse; il s'insinuait jusqu'au sol, taquinant les fragiles pétales des fleurs, et parfois faisait s'envoler quelques graines de pissenlit.

L'une d'elle virevolta autour de moi, avant de terminer son envol dans ma chevelure. D'un geste, je la dégageai et la relâchai dans la brise. Le temps était doux, agréable. Un sentiment de paix m'envahie un instant; peut être grâce à la nature, qui semblait prise dans un ballet de beauté et de douceur; ou bien était-ce grâce au seigneur d'Urfé, qui m'inspirait la plus grande des sérénités. Je me demandais comment un homme ainsi pouvait se faire des ennemis. Son visage semblait ne pouvoir afficher que douceur et bienveillance; mais je supposai que la vie à la Cour ne laissait pas de place aux faibles, et que d'une façon ou d'une autre, d'Urfé devait bien avoir un part d'ombre.

L'intéressé raffermit son emprise sur ma main pour attirer mon attention.

« Léonor, nous voilà bientôt à destination. Voyez-vous les quelques tentes, élevées par delà cette haie? »

Je suivi la direction que pointait son doigt. Effectivement, deux grands chapiteaux blancs comblaient le paysage. Mon estomac se nouait instantanément, évaporant par la même occasion ma sérénité naissante. J'eu envie de faire demi-tour, de fuir à grandes enjambées au pavillon et de m'y enfermée.

Mais je devais le faire, je devais passer le pas. Alors, je suivis Claude.

L'activité augmentait à mesure que l'on avançait. Les hommes à leurs montures, les fous et les joueurs de luths à divertir ces dames, qui, abritées par les tentes, étaient confortablement installées, goûtant et buvant le thé, entre quelques rumeurs et compliments vestimentaires. J'expirai à fond.

Claude se tourna vers moi, souriant. Il pressa doucement ma main, puis la lâcha lorsque l'on s'approcha. Il ne tenait pas à ce qu'on le voit tenant ma main, c'était évident. Mais pourquoi? Si il était marié, sa femme serait ici, à la Cour, au pavillon... J'évinçai ces questions de mon esprit lorsqu'une dame s'approcha de nous, souriante. Elle s'inclina.

« Monseigneur, quel plaisir de vous voir! Mon mari craignait que vous ne manquiez le départ pour la chasse. »

La jeune femme, à peine plus âgée que moi, possédait une chevelure châtain clair, qui s'épanouissait en boucles bondissantes. Son nez était fin, ses pommettes saillantes et fardées, des lèvres minces, et des prunelles noisettes. Elle était, tout comme moi, de taille moyenne et m'observait maintenant curieusement.

« Comtesse, toujours un plaisir, murmura Claude en baisant sa main. Laissez moi vous présenter ma très chère cousine, Léonor de Beauvau, qui est arrivée la veille de la province d'Anjou. Léonor, j'ai le plaisir de vous présenter Madame Marie-Louise de Montmorency, Comtesse de Coligny. Son époux n'est autre que notre respectable Maréchal de France. »

Mon souffle se coupait. Montmorency?! Il connaissait donc, si ce n'était une proche, une parente de son fameux rival. Et il avait besoin de moi pour des informations?

Je me ressaisis, et souris poliment en effectuant une révérence. Celle-ci s'empressait de faire de même.

« C'est un plaisir, Madame de Beauvau, de faire votre connaissance! Votre cousin m'a tellement parlé de vous! Et je dois vous dire, Madame, que votre robe est une pure merveille, un ravissement pour les yeux! »

Je lorgnais en direction de Claude, qui haussait les épaules. La Cour, la Cour. Elle adressait un clin d'oeil au Seigneur, certaine que j'avais marché. Et je marchai.

Tome I : L'émeraude de Saint LouisWhere stories live. Discover now