Chapitre 1

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Des bruits sourds bourdonnèrent de mes oreilles jusqu'au fin fond de mon cerveau. L'obscurité m'enveloppait.
Le sol. Froid et humide. Une forte odeur de sous-bois. Mes sens s'éveillaient peu à peu. J'entendis ce qui s'apparentait à des bruits de sabots. Proches. Je gémis, portant doucement ma main gauche à mon visage, toujours incapable d'ouvrir les yeux.

« L'hétaïre¹ bruit² ! Laissez moi voir cela de plus près. »


Ma confusion s'intensifiait. Qu'est-ce que tout cela signifiait? Un bruit de saut. Puis, des pas à moins d'un mètre de moi qui se rapprochait. Je me raidis, terrifiée.

« Il y a beau temps³ que je n'avais point admirer une telle créature! »

Je fronçais les sourcils, extrêmement tendue. Peu importe ce qui était entrain de se passer, cela me déplaisait au plus haut point.

Je poussai un cri lorsqu'on m'empoigna les cheveux pour soulever ma tête. Mon cuir chevelu semblait se décoller de mon crâne, et mes yeux s'ouvrirent, révulsés par la douleur. J'hurlai à nouveau. Un visage grossier et barbu se trouvait en plein dans mon champ de vision. L'haleine fétide de l'homme s'insinua dans mes narines tandis que ses yeux répugnants lorgnaient sur... mon corps nu. Totalement paniquée, je fermai mon poing gauche et l'envoyai en sa direction. L'homme, touché au visage, laissa échapper un cri en relâchant mes cheveux, et prit un ou deux pas de recul.

« Mais putain de merde ne me touche pas! »

Je me reculai en me contorsionnant afin de cacher mon corps comme je le pouvais. Mon corps entier tremblait, transit par le froid. Je jetai un regard inquiet à mon agresseur, et je croisai presque instantanément son oeillade assassine. Ses vêtements étaient étranges, faits d'étoffes épaisses et de velours vert sapin. Il s'avançait maintenant vers moi, enragé.

« Démon ! Je vais te corriger, moi, à vociférer dans la langue de Satan, sorcière! » cracha t'il.

L'homme avait la main en l'air, prête à oeuvrer. Impuissante et en larmes, je gisais là, dans la terre et les feuilles mortes. Craignant l'impact, je fermai les yeux, priant de toutes mes forces que tout ceci ne soit qu'un abject cauchemar. Ma joue me brûla.

« ROLAND! »

Le cri, ferme, autoritaire, avait claqué dans l'air tel un fouet, en canon avec le coup que je venais de recevoir. Le bruissement des feuilles m'indiquait que quelqu'un s'approchait; j'étais partagée entre le soulagement et une peur encore plus intense. Je me recroquevillai, tremblante, toujours aussi impuissante face à la situation.

« Saliguaud! Eloigne toi immédiatement.

- Mon.. Monseigneur d'Urfé...

- Ne m'as-tu donc point écouté ? Hors de ma vue, vermine! »

J'entrouvris les yeux. Mon agresseur, la tête basse, s'était éloigné, les points serrés. Le fameux Monseigneur d'Urfé s'était approché et, doucement, se débarrassa de son manteau pour me couvrir. J'eu un mouvement de recul.

« N'ayez crainte. Je ne vous veux aucun mal. Vous êtes en sécurité. »

Sa voix était douce et calme. Il réitéra l'opération et je me laissai faire, me faisant enveloppée par l'épais manteau. La chaleur de l'étoffe fut d'un tel réconfort que ton mon corps se relâcha, et je finis par perdre connaissance.

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Je revins à moi dans un lit, sous les draps. Une odeur de lavande m'enveloppa. Je soupirai d'aise, puis m'étirai. J'ouvris doucement les yeux, et poussai un cri. Je n'étais absolument pas dans ma chambre. La pièce était immense, ornée d'immenses tapisseries pendues aux murs faites de fils d'or, aux motifs fleuris et incroyablement délicats. Le lit dans lequel je me trouvais était en baldaquin, tellement haut qu'il touchait pratiquement le plafond. Les draps arboraient fièrement les mêmes motifs que les tapisseries, et la tête de lit était en bois sculpté, ornementée de magnifiques dorures.

 
Mon regard glissa vers ma gauche, où je découvris une femme se tenait à côté de moi. Je sursautai, puis baissai les yeux. Une bassine d'eau sale et une serviette de toilette étaient posées à ses pieds. J'inspectai rapidement mon corps, et  remarquai alors que j'étais habillée d'une longue chemise de soie et que j'avais été lavée. 

Tome I : L'émeraude de Saint LouisWhere stories live. Discover now