Chapitre XVIII

443 131 86
                                    

Les yeux fermés, ailes étendues au-dessus de l'eau, je laisse ma main glisser le long de la surface, récoltant les minuscules particules d'eau qui s'échappe du reste. Un sourire se forme sur mes lèvres et un petit rire nerveux s'échappe de ma gorge. 

Décalant mes épaules vers la droite, je suis le mouvement du vent et dessine de simple boucles au-dessus de la mer. L'air marin me rentre dans les narines et j'apprécie cette odeur. 

Mes cheveux lâchés titillent mes épaules et je remonte ma main mouillée pour les plaquer dans mon dos. J'ai récemment teint les pointes en rose, afin que l'on cesse de voir ma mère à travers moi. 

J'ouvre à nouveau les yeux pour voir la côte s'approcher et surtout la falaise, celle de laquelle j'ai pris mon envol. Sur cette dernière, je remarque très vite une paire d'aile blanche, probablement mon père. 

Je reprends de l'altitude et met le cap sur ce point, prenant un peu de vitesse. Finalement, une fois proche de la falaise, j'arrête tous mouvements et pose mes pieds délicatement sur le bord de pierre. 

J'ai un peu mal calculé mon atterrissage et si Lucifer ne m'avait pas attrapé le bras, je tombais dans la mer. Un soupir frustré quitte mes lèvres et je croise mes bras sur mon torse d'adolescente, contrariée. 

— Ne t'en fais pas, ça viendra, m'assure mon père. 

Je souris légèrement et secoue ma main encore mouillée pour en faire tomber les quelques gouttes d'eau encore accrochée. 

— Tu dis ça depuis que j'ai appris à voler. Pourquoi c'est toujours aussi compliqué, d'atterrir ?, je proteste. 

Lucifer se met à rire et je le rejoins, sans savoir pourquoi. Son rire est communicatif. J'ai encore du mal à le nommer "papa", quand tout le monde se prosterne devant "l'Archange Sacrifié", comme ils le nomme. 

L'Archange qui a abandonné son statut  pour sauver les Hommes. C'est assez lourd à porter, alors lui dire "papa" devant tout le monde me semble parfois trop difficile. 

— Tu sais, il est toujours plus facile de s'envoler que d'atterrir. Parce que remettre les pieds sur terre, ça veut dire accepter toutes les difficultés et les problèmes que l'on a abandonné en s'envolant, me confie-t-il. 

Je hausse un sourcil, peu convaincue. 

— Tu as des soucis toi ? Tu es Lucifer, l'Archange Sacrifié. Tout le monde t'adore. Je ne pense pas que tu es des soucis quand même..., j'avoue. 

Il me regarde et hoche doucement la tête.  

— Je te souhaite de ne jamais connaître le poids de ma couronne. Je suis plus l'Archange Sacrifiable que Sacrifié, ironise-t-il.

Pris d'un nouveau fou-rire, il s'approche de moi et passe l'un de ses bras autour de ma nuque, pour venir plaquer ma tête sur son torse. Je ris en me débattant, cherchant à retrouver la liberté de mes mouvements. 

Mais il est plus fort que moi et je suis obligée de capituler après quelques minutes, sans manquer de l'insulter dans toutes les langues que je connais. 

Cela ne fait que redoubler notre fou-rire, qui dure si longtemps que je mets quelques secondes avant de tourner la tête vers l'intérieur des terres, où ma tante Uriel se tient.

Mon père m'a lâché et je ne l'ai pas senti. Je ne l'ai même pas entendue arriver. Elle me fusille du regard, s'approche de mon père et lui adresse un faux sourire tout en m'ignorant. 

Les Chroniques d'Idan (tome 2) : La Première ReineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant