Chapitre 1

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Des cris. Voilà comment chacune de mes journées débutent depuis maintenant plus d'un an. Des reproches, des prises de tête. Tout et rien sont sujets à une dispute. L'avantage, c'est que je n'ai plus besoin d'entendre le son insupportable de mon vieux réveil. Alors je reste là, quelques minutes pour écouter, essayer de comprendre et donner un sens à tout ce chaos. J'entends des pleurs, des sanglots étouffés, sûrement dans un oreiller ou une couverture. Je décide d'aller voir et trouve ma petite sœur enroulée dans sa couverture, les yeux rouges et les joues pleines de larmes. Une pensée ou plutôt une question traverse mon esprit ; pourquoi devant elle ? Ils savent qu'elle est fragile et ne supporte pas leurs disputes incessantes alors pourquoi s'entêtent-ils ? La prendre dans mes bras et la rassurer est la seule chose que je puisse faire. Au fond de moi, je sais que je lui mens, tout ce que je lui dis ne sont que des paroles en l'air pour lui cacher la vérité, pour qu'elle ne se préoccupe plus de tout ça. En attendant que le silence revienne, on essaye de s'occuper l'esprit avec de la musique, de la lecture, tout ce qui nous passe sous la main est, de toute façon, toujours plus intéressant qu'écouter les reproches et attendre que l'orage passe.

Je me dis que les cours sont une sorte d'échappatoire, un moment de liberté pendant lequel je peux réellement profiter sans me poser un milliard de questions. Mais ce n'est qu'un leurre, toutes ces questions restent secondes après secondes et résonnent incessamment dans ma tête. Heureusement qu'elle est là, elle qui me fait oublier, pour quelques instants, que je traverse une période assez difficile dans ma vie. Je ne pourrais jamais assez remercier le ciel de m'avoir permis de rencontrer une fille aussi adorable. Elle que j'avais harcelée avec tout ces imbéciles qui ne la connaissaient même pas, juste parce qu'elle était différente, qu'elle ne rentrait pas dans ces foutues cases qu'a crée notre société. Elle qui malgré toute la souffrance que je lui avais infligée m'a laissé une seconde chance. Ma meilleure amie est cette incroyable fille. Elle est la seule qui me comprend réellement parce qu'elle a vécu la même chose quand elle était plus petite.

Le soir, en rentrant des cours, la routine s'installe. De nouveau des cris, des reproches sur tout et sur rien, des prises de tête qui n'ont pas lieu d'être, les pleurs de ma petite sœur. L'atmosphère est insupportable, on ne peut plus vivre dans ces conditions. Les cauchemars et les insomnies s'accumulent et des cernes se creusent sous mes yeux. La fatigue commence à se sentir dans mes muscles, je n'arrive même plus à monter les escaliers du lycée sans être essoufflée lorsque nous arrivons devant notre salle de classe. A chaque pas, les larmes montent mais je me force à les cacher, je ne veux pas qu'on me voit pleurer. Je ne veux pas que cette image de fille forte que l'on m'a attribuée ne se brise, encore moins devant tous mes camarades de classe qui me poseraient des tas de questions pour comprendre ce qui se passe. Plus que quelques mois avant la fin des cours, plus que quelques mois à tenir et je pourrais enfin tout recommencer dans une nouvelle classe, avec de nouvelles personnes qui ne me connaîtront pas. Je pourrais enfin laisser cette image derrière moi et enfin me montrer telle que je suis réellement. Une fille fragile, blessée par l'attitude de ces parents et détruite par le poids de tout ce qu'elle porte et cache au plus profond d'elle et qui, petit à petit la tue intérieurement.


Un monde qui s'écrouleWhere stories live. Discover now