Chapitre 01

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La porte du dortoir s'ouvrit violemment, claquant le mur derrière elle. Matthew se réveilla en sursaut, perdu. Il mit quelques secondes à se rappeler qu'il n'était plus chez lui mais en vacances. Il sourit doucement avant de se souvenir la raison de ce réveil brutal. Il tourna la tête vers l'entrée de la chambre mais n'y vit qu'une grosse masse blanche tentant vainement de rentrer dans la pièce. Curieux, il se leva et s'approcha de la ... chose.

« Besoin d'aide ? demanda-t-il incertain.
– Si tu pouvais tirer sur la couette, ce serait pas de refus ! »

Suivant les directives, Matthew attrapa le tissu et tira vers lui, laissant au final apparaître un jeune homme d'une vingtaine d'année, les bras chargés de valises et de coussins. Il le vit tout poser sur un lit dans un grand soupir de soulagement. Essoufflé, il se plia en deux le temps de reprendre son souffle.

Face à lui, Matthew tenait toujours la fameuse couette contre son torse. Il observait le nouvel arrivant les yeux écarquillés. Il fallait avouer qu'il avait un style assez .... Atypique. Des cheveux fous d'un blond éclatant, une chemise à fleur tombant sur un bermuda crème, le tout accompagnés d'une longue de chaussettes qu'il n'avait jamais vu chez quiconque ayant moins de soixante-dix ans et d'une paire de boots. C'était ... particulier. Et lorsque le jeune homme releva la tête, laissant apercevoir des yeux d'un vert pétillant, Matthew ne put que se rendre à l'évidence. Malgré tout cela, il le portait bien et une certaine classe se dégageait de lui. Il espérait simplement s'entendre avec lui désormais.

« Euh ... commença Matthew.
– Sérieux, pourquoi, vous les ricains, alors que vous êtes quand même un pays réputé pour vos obèses, vous faîtes des portes aussi petites ? le coupa l'autre avec un certain accent.
– Je ...
– Ah oui, je m'appelle Klaus. J'habite à Sarrebruck, en Allemagne. Je passe tout l'été ici. Je t'avoue que j'avais peur d'être mal installé alors j'ai pris pas mal de coussins et de couvertures ! Et toi, c'est quoi ton petit nom ?
– Matthew.
– Cool. Je peux t'appeler Matt ?
– Si tu veux ...
– Super. Bon, c'est pas tout, mais le voyage m'a donné envie de pisser. A tout de suite. »

Matthew était soufflé. Il avait à peine eu le temps de placer un mot. Il parlait bien anglais pour un étranger en plus. Il se mit alors à rire. C'était, pour le moins, une première rencontre assez particulière.

Il se décida enfin à déposer la couverture sur le lit qu'avait choisi son désormais compagnon de chambre. Il se demandait si les autres venus seraient aussi nature que l'était Klaus. En tout cas, il avait hâte de faire plus connaissance avec lui. Maintenant, cependant, il ne savait pas trop quoi faire. Sortir ? Attendre l'Allemand et les deux autres garçons manquant ? Ou alors foncer sur la plage et enfin piquer une tête ? La réponse arriva finalement sous la forme d'un éclair blond qui entra, en courant, dans la chambre avant de se jeter sur son lit.

« J'ai cru que j'allais exploser ! Je déteste les toilettes dans les avions alors je t'avoue que je me suis un peu retenu ! T'es arrivé il y a longtemps ? demanda-t-il soudainement, prenant de court Matthew.
– Ce matin, il y a ... cinq heures ! s'étonna-t-il en regardant sa montre. Zut, j'ai dû dormir un bon moment.
– T'as pas encore eu le temps de visiter alors ... moi qui espérais savoir où trouver des boîtes de nuit. C'est pas grave ! s'exclama Klaus en se levant. On va faire du repérage ensemble ! Tu viens ? »

Après tout, il était pour ça non ?

Mais finalement, peut-être aurait-il dû attendre encore quelques jours avant de suivre Klaus à l'aveuglette. Ou en tout cas, il aurait dû attendre d'avoir enfilé un maillot de bain sous ses vêtements, cela lui aurait au moins épargné de devoir se balader entièrement trempé jusqu'à l'auberge.

L'allemand avait eu la merveilleuse idée de vouloir traverser la plage en passant de rocher en rocher. Alors forcément, lorsque son pied avait malencontreusement glissé sur une pierre trop lisse, il s'était raccroché à la première chose qui s'était trouvé près de lui, autrement dit à Matthew qui était désormais en train de vérifier l'état de son téléphone, marchant à grand pas jusqu'à sa chambre, ignorant le regard moqueur de la patronne.

Derrière lui, Klaus sautillait, heureux, clamant que ces vacances commençaient à la perfection. Il avait retiré sa chemise qui pendait sur une de ses épaules. Ses cheveux retombaient devant ses yeux à cause de l'eau, mais il semblait ne pas s'en soucier le moins du monde.

Matthew secouait son téléphone, espérant vainement que peut-être ainsi toute l'eau sortirait. Il essayait d'ignorer l'allemand derrière lui. S'il commençait à s'énerver dès le premier jour, il ne donnerait pas cher de ces vacances. Il continua donc à ruminer dans sa barbe jusqu'à l'entrée du dortoir où il percuta un torse. Il releva la tête et se trouva face à un grand _ très grand _ jeune homme. Ses yeux noirs semblaient le sonder, le rendant momentanément mal à l'aise. Il ne savait pas trop quoi faire. Reculer sans rien dire ? S'excuser avant de reculer ? Lui demander de bouger ses fesses du passage ?

« Vire-moi ton cul de la porte, tu bouches le passage ! »

Matthew sursauta. La voix venait de derrière l'homme lui faisant barrage. Il le vit alors lever les yeux au ciel, tendre ses bras pour pousser Matthew et finalement se décaler, faisant apparaître derrière lui un autre homme, tout aussi grand et au regard tout aussi sombre, bien que semblant plus avenant.

« Tient, t'es notre coloc ? »

En le voyant se pencher vers lui pour se trouver face à son visage, Matthew ne s'était jamais senti aussi petit et insignifiant. Vraiment. Le jeune homme face à lui le regardait avec un sourire narquois, les mains dans les poches de son pantalon noir et un sourcil levé. Il semblait le juger de la tête aux pieds et autant dire que vu le bain imprévu qu'il avait pris, Matthew devait plus ressembler à un chien mouillé qu'à un jeune homme près à défier le monde, comme semblait l'être son interlocuteur.

« Es war gut, cria Klaus en arrivant enfin lui aussi devant la chambre. Oh ! Vous êtes les deux mecs avec qui on va partager la piaule ? »

L'autre homme se redressa, abandonnant son air moqueur pour détailler l'allemand de la tête au pied. Il se mit alors à sourire avant de tendre sa main pour saluer l'arrivant.

« C'est ça ! Je m'appelle Théo ! Et la grande tige c'est mon jumeau Léo !
– La grande tige fait la même taille que toi, est plus vieux de dix minutes, donc mérite ton respect, et est parfaitement capable de se présenter tout seul ... Théodore. »

Ledit Théodore s'apprêta à répliquer mais un regard de son frère suffit pour le couper dans son envie. Il gonfla alors les joues et rentra à nouveau dans la chambre pour s'asseoir sur son lit. Matthew en resta mortifié. Celui qui venait de lui donner l'impression d'être un simple insecte était à présent en train de bouder, les bras croisés sur son lit. Son regard alterna entre les deux frères. Leur ressemblance était indéniable. Mais là où Théo semblait finalement plus moqueur et taquin, Léo, lui, portait sur son visage un sérieux et une gravité qui lui donnait une aura bien plus impressionnante que son frère.

« Tu es sourd minus ? demanda Léo. »

Revenant dans la réalité, Matthew vit que l'attention de Léo était tournée vers lui. Etait-il en train de lui parler ? Si oui, depuis combien de temps le faisait-il ? Il ouvrit grand les yeux, se rendant compte que les trois jeunes hommes s'étaient rapprochés. Klaus et son énorme sourire qu'il semblait porter comme un vêtement fétiche, Théo dont les mains avaient retrouvé les poches de son pantalon et son sourcil à nouveau relevé et Léo, le visage impassible. Ils étaient tous les trois plus grands que Matthew, plus charismatique aussi et peut-être un tout petit peu plus vieux. Mais était-ce une raison pour se laisser marcher sur les pieds ?

« Le minus il s'appelle Matthew et il te dit d'aller te faire voir, répliqua-t-il en croisant les bras, dardant un regard déterminé dans celui du jeune homme ayant posé la question. »

Non, ce n'était sûrement pas une raison ... mais avait-il bien fait de répliquer de la sorte ?
...
Au secours ?

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"Es war gut" : "c'était bien" en allemand.

Le temps d'un étéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant