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Je savais pertinemment que j'aurais dû rebrousser chemin dès la découverte du premier cadavre. Pourtant, mes pieds ne pouvaient s'empêcher de suivre cette route macabre cachée au beau milieu de la forêt, dans laquelle j'aurais dû me contenter de faire mon jogging avant de rentrer tranquillement chez moi.

Un... deux... trois... quatre...

Mon cerveau avait cessé de poursuivre l'addition lorsque j'avais dépassé le quatrième corps sans vie, gisant misérablement au pied d'un arbre. Mon cœur s'était soulevé dans ma poitrine quand j'avais remarqué que sa nuque était tournée dans un angle peu naturel.

Mon dieu, il n'est pas trop tard pour que je m'en aille d'ici...

Au fur et à mesure que je m'enfonçais dans les bois, je me rendais compte que tous les hommes qui avaient été tués partageaient la même tenue entièrement noire, presque austère. Très peu de sang avait coulé, comme si le tueur avait délibérément choisi de les abattre proprement.

— Bon sang, gamin ! s'écria une voix rauque. Combien de nos agents comptes-tu encore tuer pour faire perdurer ta stupide illusion de liberté ? Regarde un peu autour de toi, n'as-tu pas l'impression d'avoir fait assez de mal comme ça ?

Un hurlement de douleur déchira le silence, me donnant immédiatement des frissons.

— Quand est-ce que vous allez réussir à le comprendre ? Vous ne réussirez jamais à m'attraper et à me ramener là-bas, c'est compris ? Jamais !

Avant même que je ne puisse comprendre les paroles de ces deux voix vibrantes de colère, je me retrouvai brusquement face à elles. Retenant un cri d'effroi, mon regard se posa instinctivement sur le jeune homme qui plaquait violemment son adversaire contre le tronc d'un arbre, une main écrasée sur sa gorge pour le faire taire. J'étais en train de reculer lentement, un pas après l'autre pour ne pas que l'on remarque ma présence, au moment précis où le garçon tourna brusquement son visage dans ma direction, ce qui sembla glacer le sang dans mes veines.

Est-ce que quelqu'un va me réveiller de ce cauchemar ?

Un étrange halo de couleur jaune faisait briller ses yeux d'une lueur qui aurait été capable d'hypnotiser les ténèbres. Ma respiration devint saccadée lorsque je me rendis compte que cette lumière éblouissante recouvrait aussi ses mains et qu'elle ondulait le long de ses chevilles, comme si elle prenait source dans le sol.

Ce n'est pas réel, ce n'est pas réel, ce n'est pas réel...

Le jeune homme suivit mon regard jusqu'à ses doigts puis jusqu'à ses chaussures avant de plonger de nouveau ses yeux envoûtants dans les miens. Un voile d'inquiétude obscurcit les traits de son visage alors je fis machinalement un pas en arrière, aussi discrètement que possible. Sans me quitter du regard, il prononça des jurons à voix basse et poussa plus brutalement l'homme qu'il tenait à la gorge contre l'arbre. Ce dernier toussa douloureusement, crachant du sang par le même geste, ce qui força le ravisseur à jeter un coup d'œil à sa victime.

Il n'eut pas le temps de rediriger son attention vers moique j'étais déjà en train de courir à toute vitesse pour m'éloigner le plusvite possible de toute cette horreur. 

Pour Cette Liberté Illusoire. | ✔Où les histoires vivent. Découvrez maintenant