2008

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« Il reste toujours quelque chose de l'enfance... toujours. »

Marguerite Duras

          Lorsque l'enfant est heureux, le monde semble invincible. Un rien suffit à la joie, aux rires, mais aussi aux pleurs. L'enfant est volatile.

          Vous voyez cette petite fille qui pleure parce qu'un camarade a pris sa poupée ? Elle exagère, n'est-ce pas : ce n'est qu'un jouet vulgaire, un objet remplaçable et quelconque. Pourtant c'est son père partit à la guerre qui lui a acheté.

          Ce petit garçon qui a encore peur du noir à huit ans ? Il passe ses nuits sous les cris incessants de sa grande sœur gravement autiste.

          Cette fillette qui refuse de répondre quand la maîtresse lui parle ? Son père la frappe car il ne supporte pas sa voix.

          La vie n'est pas toujours aussi dure, le bonheur peut vous toucher sans contrepartie. Alors laissez-le lui. Il est heureux à ce moment, cela ne durera sûrement pas ; ne lui enlevez pas ces moments, s'il vous plaît.

3 mars 2008

          Adam n'avait pas d'ami. C'était comme ça depuis son entrée en maternelle. Adam était bizarre, il restait seul et ne disait rien, il regardait toujours les gens en gardant la tête baissée ; personne n'aimait Adam.

          Voilà ce que les enfants de l'école St André se répétaient entre eux.

          Lorsque le petit garçon entra dans la classe après avoir posé son manteau, et essuyé ses bottes marrons, il s'installa au fond de la classe en fixant le sol. Il posa son cartable vert par terre puis sortit sa trousse à l'effigie des Power Rangers.

          Mélanie, qui était assise devant le bureau de madame Cajolet, le regardait en silence. Elle n'aimait pas Adam, comme tout le monde, bien sûr ; pourtant elle avait envie d'aller lui parler. Son petit cœur se serra quand elle le vit relever la tête et sourire à une autre fille.

          Agathe.

          Le visage de Mélanie devint rouge et elle croisa ses petits bras autour de son ventre. Tout le monde aimait Agathe, alors Mélanie aussi ; pourtant elle n'arrivait pas à la supporter.

          Agathe s'assit à côté d'Adam et celui-ci remua sur sa chaise. Il était si heureux depuis que la petite fille était arrivée ; c'était un mercredi, il y en avait eu deux autres depuis, et elle ne parlait quasiment pas. Elle se contentait d'observer et, parfois (rarement), de réagir.

          Adam s'était donné une mission : la faire sourire. Anne-Sophie lui avait dit que les gens qui souriaient pouvaient sauver le monde : Adam voulait sauver sa mère. Alors il commencerait par faire sourire Agathe, sa seule amie.

          Le garçon salua timidement la petite brune, mais celle-ci ne réagit pas. Adam ne perdit pas son petit sourire, ses yeux pétillaient toujours, comme chaque fois qu'il la voyait. Ce jour-là, elle portait deux longues couettes ; c'était rare que ses cheveux ne soient pas détachés, Adam pouvait ainsi admirer son jolie visage rondelet.

           Madame Cajolet entra en classe et salua les enfants qui lui répondirent gaiement. Le petit Nouka se retourna sur son siège avant de faire tomber la trousse d'Adam en rigolant discrètement. Les affaires du petit garçon se répandirent sur le sol dans un grand bruit ; il se fit encore disputer par la maîtresse. Agathe observa la scène, le regard neutre, sans rien dire.

Ma Seule ÉtoileWhere stories live. Discover now