XII- ''L'ombre Immaculée''

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Une ombre saute de maisons en maisons, esquivant les paratonnerres et s'agrippant aux cheminées. Galopant sur les toits, avec pour seul objet une corde ; elle sors la nuit tombée pour assassiner une nouvelle victime. Quand elle trouve une maison qui lui convient, elle défonce les fenêtres et rentre dans la propriété. Elle tue par la suite sans distinction femme, enfant ou mari. Mais jamais elle ne laisse de traces : son travail est toujours bien fait, on ne retrouve jamais de preuves de sa culpabilité. Ses victimes paraissent avoir été choisies aléatoirement, et il est difficile d'établir un mobile pour ses crimes, puisque rien ne relie jamais les morts ; à part le mode opératoire : elles meurent toutes par strangulation. Comme aucune traces de sang n'ont jamais étés retrouvées sur les scènes des crimes, elle a été surnommée ''L'ombre Immaculée''. 

Sa besogne faite, elle sort par la porte, par politesse ; et se dissimule dans les ruelles sombres. De noir vêtue, elle n'a aucun mal à se cacher et à se fondre dans la masse. Arpentant les grandes façades, elle se dissimule parmi les chats de gouttières et échappe toujours au policiers...

Cette ombre, c'est moi. Et oui : après avoir tué Elzbetia et Josiane, Alwenna m'a beaucoup félicitée. D'ailleurs, Matty et Al' étaient contents aussi. Puis, ma tutrice m'a assignée une mission: celle de tuer le plus de monde possible, pour grappiller des places dans le classement. Bien sûr, comme elle avait compris que je n'aimais pas tuer avec un couteau, elle m'assigna l'ordre de me débrouiller avec une corde. De par mon agilité, je n'ai aucun problème à me faufiler sur les toitures des maisons des villes voisines puis entrer par effraction par la fenêtre. Après, je n'ai qu'à me cacher dans les pièces, prendre ma corde et la passer délicatement autour du cou de mes victimes. Je n'ai plus qu'à serrer fort, jusqu'à ce que la personne meurt dans un râle d'agonie horrible...

Voilà à peu près mon quotidien depuis 1 mois. Chaque soir, je pars à la chasse ; et le lendemain, je vois des articles dans la presse à un sou relatant mes méfaits de la veille. Je n'ai plus aucun scrupules à accomplir ma besogne : après tout, c'est un métier comme les autres. Seul une question persiste : pourquoi dois-je faire tout ça? Après tout, comment puis-je être coupable d'un crime dont je ne me souviens même plus? Est-ce qu'il y a vraiment des preuves à charges contre moi? Je n'ai même pas souvenir de mon procès! En ai-je vraiment eu un? Et puis même, cela n'explique nullement le fait d'être dans la prison de Golgotha : c'est quand même une prison pour les créatures de l'imaginaire de l'horreur, alors qu'est-ce j'y fais?


Je suis dans ma chambre. Depuis ma fenêtre, je peux voir le crépuscule s'annoncer. Il va bientôt falloir que je sorte...En ronchonnant, je me lève. En y songeant, cela fait un peu plus d'un mois que je suis ici, et rien n'a jamais bougé dans ma chambre ; je n'ai jamais ouvert les tiroirs des commodes, ni fouiller la pièce de fond en comble. La chambre est toujours aussi calme qu'un mort qu'on enterre, et son atmosphère m'apaise. Souvent, je pense à ce couteau ensanglanté qu'il y avait sur le sol la première fois que j'y ai dormi : j'eus beau demander, jamais je n'ai eu d'explications sur ce qu'il faisait là. 

Je me vêts d'habits noirs et amples et descend le vieux escalier m'emmenant au rez-de-chaussée. Alwenna est dans la cave : comme à son habitude, elle ferre ses poissons. Bientôt, une nouvelle cargaison de victimes viendront se jeter dans la gueule du loup...                                      En passant par la cuisine, j'entends Al' et Maty qui se disputent. Je suis trop loin pour entendre ce qui se dit ; mais après tout, tout cela ne me concerne pas.

Après une heure de marche, je sors du bois sinistre et sombre et me dirige vers une ville se trouvant à proximité d'une grande montagne se jetant dans la mer. L'excitation me prend d'un coup : j'ai hâte d'arriver dans la maison de ma prochaine victime...

En arrivant dans la ville, il se met à pleuvoir. Je cours me réfugier sous le porche en pierre d'une maison près d'un parc public. La pluie s'intensifie, ce qui n'arrange pas la progression de ma mission : je décide de rester à l'abri le temps que l'averse passe. L'hiver s'installe doucement, et, à cause de mes sorties nocturnes répétées, j'ai un rhume. J'éternue deux fois successivement.

-...A mes souhaits...

La famille habitant la bâtisse semble s'amuser : j'entends des rires, des cris, et des bruits de couverts. Sûrement un repas de famille. La famille...Est-ce que j'en ai une, moi, de famille? Suis-je l'enfant d'une famille pauvre, modeste ou bourgeoise? Qui sont mes parents? Est-ce qu'ils me cherchent, est-ce qu'ils m'attendent? 

A force de me perdre dans mes pensées, j'en oublie le reste ; aussi, je ne fais pas attention lorsque quelqu'un s'approche de la porte d'entrée et ouvre la porte grinçante. C'est un homme d'une soixantaine d'années qui m'ouvre. Son regard mélange une expression d'étonnement et d'extrême gentillesse. Il me dit avec une certaine malice dans sa vieille voix rauque :

-Je savais bien que j'avais entendu quelqu'un éternuer...



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⏰ Last updated: Feb 03, 2018 ⏰

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