6. Elle a fait un bébé toute seule

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Samedi matin. Neuf heures trente-sept. Je me lève tranquillement. Je ne travaille pas le week-end. Comme avant la fermeture j'ai demandé mon samedi, qu'Hélios m'a gentiment accordé.

Asher doit travailler à cette heure-ci. Je m'amuse à imaginer mon meilleur ami dans sa tenu d'ange déchu. J'espère qu'il ne se sent pas seul, qu'il travaille avec plaisir, qu'il s'entend bien avec les clients, qu'Octave ne lui ai pas cherché des noises... J'espère juste qu'il va bien.

Mon Asher Aaron, mon âme-soeur, l'amour de ma vie. Tout est platonique entre nous, mais on sait parfaitement que c'est pour la vie. Nos parents sont amis, il me connaît donc depuis ma naissance, même si finalement notre tout premier souvenir commun remonte à nos trois ans. Le premier jour d'école. Je pense que c'est le seul souvenir clair que j'ai de ma toute petite enfance.

Je me souviens que j'avais hâte d'aller à l'école contrairement à ma soeur jumelle. Petite, elle a toujours été beaucoup plus introvertie que moi. Ce qui s'est inversé au fil du temps, mais ce n'est pas le sujet. Quand je suis entrée pour la première fois dans la maternelle, j'étais émerveillée. Tout ma fascinait. J'avais envie de tout observer et toucher. En entrant dans la salle de classe, je n'ai pas jeté un regard à ma mère et je me suis mise à parler à tout le monde, beaucoup trop joyeusement je pense. Cet endroit, rempli de petite être de ma taille, qui me ressemblait me donnait envie de chanter, danser hurler. J'étais aux anges à l'école. Ma mère m'a dit que j'amusais beaucoup ma maîtresse, ce que je peux imaginer parfaitement.

Je me rappelle avoir ignoré un garçon qui, dans ma tête de bébé, ne me semblait pas sympathique. Je ne voulais absolument pas lui parler et je crois qu'il l'a extrêmement mal pris. Mais je ne m'en souciais pas vraiment, j'étais une enfant.

Je suis allée m'asseoir à une table ou des feuilles et des stylos m'appelaient. Je sais que je dessinais toujours quand j'étais petite. Même si dessiner est un bien grand mot. J'ai vu le garçon s'asseoir en face de moi et me regarder. Je m'apprêtais à ajouter ma touche final de rouge quand ce margoulin m'a arraché le stylo des mains, me faisant ainsi ruiner mon oeuvre d'art. Sans exagérer.

Je me suis évidemment mise à pleurer. Mon dessin était foutu ! Mais la maîtresse étant occupée elle n'est pas venue directement. Le premier à venir a été Asher. Il a repris extrêmement violemment, pour un enfant, le stylo et a fait un grand trait sur la feuille du voleur. Ça ne lui a bien sûr pas plus ; il a poussé Asher et s'est mis à pleurer. Et les fesses au sol, Asher à suivit notre chorale cacophonique.

C'est vraiment étrange que ce souvenir soit si clair dans mon esprit. Ma mère à certainement du me le raconter, ce qui à du renforcer sa netteté.

Mes lèvres sont étirées en doux sourire. Ce sont toujours les bons souvenirs d'Asher qui me reviennent, alors que j'aurai pu graver dans mon coeur une profonde rancoeur. Je suis heureuse que sa mauvaise période ne m'est pas atteinte plus.

Je me prépare, des souvenirs de mon amitié avec Asher m'assaillant. Il occupe toujours mon esprit, c'est fou. Mais je suis presque relié à lui, donc pour nous c'est finalement normal. Enfin même si je suis sûre qu'en ce moment il n'a d'yeux que pour Rana, ce qui me fait peur.

Mais aujourd'hui, pas de peur, juste de la joie puisque je vais chercher Samae. Elle est dans la grande ville voisine à plus de deux heures de route. Alors je ne traine pas, et une fois prête, je prends directement la route.

Ma petite voiture d'occasion acheté il y a deux ans m'attend sur le parking de mon immeuble. Elle sait ce qui l'attend elle a l'habitude depuis le temps.

Je m'installe au poste et démarre. Oui ma vieille, tu ronchonnes, je sais. Le poste se lance lorsqu'il est alimenté par l'électricité. La voix si particulière d'Asher résonne dans tout le véhicule. Sa voix grave, suave, rauque qui fait craquer tellement de gens, sortant toujours de ses tripes et faisant passer tant d'émotions, sa voix de rockeur glisse jusqu'à mes oreilles et mon coeur.

Des Cendres sous les CieuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant