L'ange déchue

• Chapitre 5 •

                    Allongée sur l'herbe tendre, profitant des rayons de soleil qui réchauffaient ma peau, je buvais les paroles de Ludovic, tout en me forçant à rester attentive à ses propos et à ne pas me perdre sur le rythme doux de sa voix rauque. Nous nous étions donné rendez-vous dans ce parc où nous avions l'habitude de jouer lorsque nous étions encore de jeunes enfants en quête d'aventures. Une prairie de gazon verdoyant habillait la terre, et des arbres semblaient nous accueillir en tendant gracieusement leurs branches vers nous. Ce paysage vert était embelli par les rayons du Soleil qui s'accrochaient sur les pétales des fleurs d'été qui commençaient à se faire emporter par la brise légère.

Le murmure du vent soulignait les paroles graves de Ludovic. Ou plutôt, ses aveux. A propos de tout, d'absolument tout. De la raison pour laquelle il était parti il y a de ça quelques années désormais, de sa véritable nature, de son passé, et même de ma véritable nature à moi. Enfin, tout ça me paraissait encore bien irréel.

Un ange noir combattant des anges blancs. Deux gangs ennemis depuis des millénaires. De la magie, des dons, des pouvoirs, des dimensions hors de l'espace-temps... Tout ça me paraissait... Carrément cool ! J'avoue que j'avais été médusée au début mais, si l'on y réfléchissait à deux fois, toutes ces choses étaient... Il n'y avait pas de mots pour décrire toutes les révélations de Ludovic. Cependant, si je devais en choisir un seul parmi la multitude qui s'offrait à moi, je choisirais : excitantes. Car au lieu de m'effrayer, cela provoquait en moi une sorte d'adrénaline explosive qui menaçait d'aplatir ces quelconques ennemis dont Angie et même Ludo m'avaient parlé. Tous ces aveux sur un monde parallèle et surnaturel m'avaient comme donné une gifle pour me dire : c'est ça mon destin. Je le sentais, j'en étais certaine. Et Angie avait confirmé mes pensées. Elle m'avait dit :

« Ca c'est ton destin. Les pouvoirs, les dons, les combats, c'est ce qui t'attend. Alors prépare-toi ma p'tite, et attache bien ta ceinture parce que ça va déménager ! »

J'avais souri à ces paroles et m'étais déjà imaginée dans une vie future, une vie remplie de risques et de magie. Une vie qui correspondrait à ma personnalité d'enfant qui croyait encore à « toutes ces conneries », comme disaient les adultes. Mais après tout, n'était-ce pas mon droit de continuer à croire à la magie, aux dons et à tout ce qui s'ensuit, même à 16 ans ?

Ludovic me tira de mes pensées en posant sa grande main sur mon épaule.

« Mina, tu m'écoutes ? », me questionna-t-il de sa voix d'ange –noir.

Je lui adressai un petit sourire d'excuses pour lui indiquer que non. Il soupira et ricana devant mon attitude enfantine et reprit d'un ton plus sérieux toutefois.

« A partir de maintenant le monde surnaturel est le tien. La magie, les anges noirs, tout te concernent. Ta place n'est plus sur cette Terre avec des humains, mais dans les cieux avec des anges.

-Comme quoi, des fois, tu peux dire des choses classes », riais-je doucement en me moquant gentiment de lui.

Il sourit, son fameux sourire de tombeur, puis se releva en époussetant son jean noir. Il me tendit sa main tout en lançant un regard au loin. Ses pupilles émeraude semblaient si loin à cet instant. Ses pensées paraissaient dériver encore plus loin que l'horizon, lorsqu'il retourna la tête vers moi. Ses traits étaient contractés et sa mâchoire serrée trahissait son inquiétude et sa colère. Comme si le temps s'accordait avec Monsieur, un amoncèlement de nuages aussi noirs que du charbon provoqua le départ des personnes qui s'étaient installées dans ce parc.

« Dépêche-toi », m'intima-t-il.

Son ton rude et sévère me criait de lui obéir sans poser de questions, mais ce fut plus fort que moi.