Andrea Luis

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Je m'appelle Andrea Luis. J'ai 24 ans et je vis dans un petit village au nord de la France. Je fais des études de lettres, dans le but de devenir professeure de français. Et je suis nanopabulophobe.

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Je suppose que vous vous demandez ce que ça veut dire. Vous allez bientôt comprendre, mais vous allez sans doute me trouver ridicule. Essayez tout de même de me comprendre, car voici ce qui m'est arrivé...

Je marchais en direction de la maison de ma tante que je n'avais pas vue depuis presque cinq ans. Et ouais, les disputes familiales chez nous, ça dure longtemps. Je disais, j'étais donc en chemin pour aller voir ma tante. Elle habite dans une maison avec une cabane et un grand jardin. Un chemin en terre traverse le jardin fleuri. Et elle s'appelle Hélène pour ceux que ça intéresse.

Enfin si rien n'a changé.

Je tournais au coin de la rue et je souriais. Ça ressemblait exactement à mes souvenirs. A un détail près.

Je me figeais sur place et retenais mon souffle. Je scrutais le jardin en priant pour qu'ils ne soient pas là. Je priais intérieurement tout en croisant les doigts.

Apparemment non, c'était une bonne chose.

Je m'avançais doucement dans le jardin, pas à pas. J'étais encore sur mes gardes. Ils ne devaient pas être là.

Divers nains de jardin étaient répartis sur la pelouse parfaitement tondue. Certains portaient des pelles, des arrosoirs ou saluaient tout simplement.

Mais d'un coup, derrière le nain à lunettes, il était là.

Je hurlais comme une possédée  avant de me précipiter pour me réfugier dans la cabane à outils. Je claquais la porte derrière moi et m'y adossais. Je fermais les yeux, essayant de calmer ma respiration et les larmes de panique qui me montaient aux yeux et menaçaient de couler le long de mes joues.

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Je sais pertinemment que vous vous demandez qui ils sont pour me mettre dans un état pareil. Je sais aussi pertinemment que quand vous le saurez, vous me trouverez parfaitement ridicule. Mais c'est plus fort que moi et j'en suis désolée alors soyez compréhensifs.

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Quand j'eus le courage de le faire, je regardais à nouveau, mais je ne voyais rien. Peut-être qu'allumer la lumière pourrait être utile, preuve d'intelligence dans une situation comme celle là. J'appuyais sur l'interrupteur et l'enfer se dévoila devant moi. La cabane à outils était en fait un atelier de construction de décoration de jardin. Mais ils étaient partout, avec leur instrument de torture. Ces monstruosités me souriaient, comme pour me narguer en me disant :" Hi friend, c'est nous et on est là pour toi!".

Je hurlais encore, plus fort que jamais. Je hurlais à m'en déchirer les cordes vocales. Je sentis une nausée arriver pendant que mes jambes me lâchaient et que je m'effondrais au sol, le dos contre la porte.

Je fermais les yeux à nouveau en suppliant pour que ce cauchemar s'arrête. Des larmes dévalaient mes joues en semblant ne jamais pouvoir s'arrêter. Je ne pouvais plus bouger de ma place, j'étais complètement tétanisée.

Mon souffle était saccadé, j'avais de plus en plus de mal à respirer. C'était clairement une crise d'angoisse. Ma vue, déjà réduite à cause des larmes, se troubla encore plus et des tâches noires firent leurs apparitions dans mon champ de vision.

Je ne sais pas combien de temps je suis restée comme ça, avachie contre la porte, en larmes. Peut-être était-ce une minute, ou alors une heure, ou même cinq. Je ne sais pas mais ça m'a parut une éternité.

Je suis sans aucun doute tombée dans les pommes.

Ma tante m'a retrouvée plus tard, allongée contre la porte. Elle m'a secouée pour me réveiller en riant et en me demandant ce que je faisais dans son atelier. Je me redressais mais refusais d'ouvrir les yeux. Je refusais de les voir à nouveau, de voir leurs regards posés sur moi.

Voyant ma panique, Hélène a éteint la lumière puis m'a prise les mains pour me guider à l'extérieur de la cabane et rejoindre le jardin. Mes yeux étaient toujours fermés car je savais qu'il m'attendait dehors, prêt à me sauter dessus. Ma tante m'emmena alors dans sa maison ou j'acceptais enfin d'ouvrir les yeux. Je les refermais une seconde après en hurlant et en m'effondrant au sol.

Les fenêtres étaient ouvertes et donnaient une parfaite vue sur le jardin mais aussi et surtout sur lui.

Lui, avec son grand bonnet triangle rouge, sa salopette à fleurs et sa chemise rouge.

Lui, avec ces joues excessivement rouges et ce sourire stupide et effrayant, et ce regard inhumain.

Lui, avec son arme verte à pâquerettes avec une unique roue noire.

Lui, ce nain de jardin à brouette.

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Je m'appelle Andrea Luis. J'ai 24 ans. Je suis nanopabulophobe. J'ai peur des nains de jardin à brouette.

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By elsago30

PhobophobieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant