Ashton Isaaks

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Je m'appelle Ashton Isaaks. J'ai 17 ans. Je suis chionophobe. Vous devez sûrement vous demander ce que veut dire "chionophobe". Les plus malins d'entre vous sont déjà allés regarder sur internet ce que cela veut dire. Pour ceux qui ne l'ont pas fait, je vous en prie, laissez moi vous expliquer.

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Je me levai de mon lit avec un mal de crâne épouvantable. Je ne savais pas pourquoi, mais je sentais que cette journée allait être affreuse. J'avais un certain don quant à la prédiction d'une journée. Et je me trompais rarement.

J'enfilai aussitôt un T-shirt (au pif parmi la pile qui jonchait mon armoire mal rangée) et me glissai dans un jean noir. Avant de descendre, je filai à ma fenêtre dans l'objectif de tirer mes rideaux, afin d'apporter un peu de jour à cette pièce sombre. Et ce fut là que je la vis.

Je poussai un hurlement de terreur et reculai de quelques pas, avant de m'effondrer sur le sol, en me prenant les pieds dans mon tapis (ah, oui, j'ai sûrement oublié de préciser que je suis un boulet). Sur le sol, je n'osai pas bouger. Je n'arrivai pas à oublier ce que je venais de voir. Même en fermant les yeux, son image restait imprimer sur ma rétine.

Je sentis mon souffle s'accélérer rapidement, tandis que je cédai à la panique. Une seule phrase tournait en boucle dans ma tête. Elle est là.

Je ne savais pas quoi faire, à part rester sur le sol en attendant qu'elle parte. Mais, je risquais d'attendre longtemps.

Sous le coup d'un énervement soudain, je me mis à m'insulter outrageusement. Pourquoi n'avais-je pas prévu qu'elle viendrait ? Pourtant tous les symptômes étaient là !! Je parvins à la conclusion que j'étais con.

Je n'allais quand même pas rester là toute la journée ! Il était hors de question que ma mère me retrouve dans cette position fœtale ridicule en rentrant du boulot ! Je tentai donc de me relever, mais, à peine eus-je redressé mon torse que je la vis de nouveau. Cette fois, prenant mon courage à deux mains, je fermai les yeux et serrai mes paupières l'une contre l'autre le plus fermement possible. Ne te laisse pas aller à la panique Ash, ce n'est qu'elle ! Oui, bah justement ! Oh ferme-la !

À tâtons, je posai ma main sur mon bureau, les yeux toujours clôts et me relevai, le cœur battant. Mon mal de crâne s'intensifia de plus bel et je tentai de calmer ma respiration toujours trop accélérée. Mais, malgré mes yeux fermés, je la voyais toujours. Elle était là, elle m'observait, et je savais qu'elle ne bougerait pas avant un bon bout de temps.

Je me mis à crier de façon très virile avant de m'éloigner le plus loin possible de la fenêtre, comme si cela allait la faire disparaître. Je me précipitai dans le couloir et claquai la porte de ma chambre aussi fortement que possible.

Enfin sûr que j'étais relativement en sécurité, j'ouvris les yeux. Je me trouvai dans le couloir qui menait à ma chambre. Ici, aucune fenêtre. Elle ne risquait pas de m'observer. Je me laissai glisser contre le mur, couvert de sueur. J'eus la certitude qu'un jour cette phobie me tuerait.

~

Vous voulez vraiment savoir de quoi j'ai peur ? S'il vous plaît, quand vous le saurez, soyez respectueux envers moi. Vous allez sûrement me prendre pour un con, mais je vous jure que ce n'est pas facile. Pas facile du tout.

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Toujours assis dans le couloir, je sentis soudain un vent d'air frais me parvenir. Mes os se glacèrent pendant que mon cerveau parvint à la conclusion suivante : une fenêtre était ouverte.

Je restai un instant sans bouger, trop pétrifié pour faire ne serait-ce qu'un petit mouvement. Bordel, j'ai envie de me gratter l'orteil ! Mon corps ne voulait plus bouger, je ne ressentais rien qu'une peur intense qui m'enserrait tel un carcan violent. Je sentis cet étau m'étrangler et je me roulai en boule, sanglotant. J'avais peur. Très peur.

Cependant, il fallait que je fasse quelque chose. Que j'ose quelque chose. À demi-conscient tant la peur me nouait l'estomac, je me levai tremblotant. Je me dirigeai vers la source du vent glacial. Je me forçai à mettre un pas devant l'autre, chaque pas étant plus difficile que le précédent. J'avais les yeux fixés devant moi, je pleurais. Je savais que je me rapprochai d'elle. Je sentais sa menace augmenter au fur et à mesure que le temps passait. J'étais proche.

Je finis par déduire que le vent venait de la salle de bain dont la fenêtre avait été ouverte. Il allait falloir que j'aille la fermer. À cette pensée, mon estomac se révolta et je vomis sur le sol du couloir. Pourtant, je me relevai. Il fallait vraiment que je le fasse. Malgré mon estomac rebelle, je continuai de m'avancer prudemment vers la salle de bain.

Dès que je fus à sa hauteur, je risquai un coup d'œil dans la pièce. À nouveau je la vis. Sa vision me cloua d'effroi. Je restai tétanisé devant sa beauté effrayante. Son manteau blanc me donna l'effet d'une douche froide et je sentis un frisson me parcourir l'échine, tandis que mes yeux s'exorbitaient. Je ne pouvais plus avancer, ni reculer. J'étais devant elle et je ne pouvais rien faire. Je sentis mon cœur lâcher et je m'effondrai sur le sol, évanoui.

Ce fut comme cela que ma mère me retrouva, le soir, étendu sur le sol, inconscient, une flaque de vomi dans le couloir. Elle me porta jusque dans ma chambre et m'allongea sur ma couverture, en fermant mes volets et mes rideaux. Elle avait l'habitude.

C'était comme cela toutes les années.

Tous les hivers.

À chaque fois qu'il neigeait.

À chaque fois que la neige recouvrait la maison.

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Je m'appelle Ashton Isaaks. J'ai 17 ans. Je suis chionophobe. J'ai peur de la neige.

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By LetTheMagicHappen

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