Chapitre 13 : Premiers cours

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  Atterrée, je tentais péniblement de suivre les cours depuis voilà trois heures, et la stupéfaction que j'avais ressentie à mon entrée en classe ne refluait toujours pas. Chez moi, les élèves, se dispersaient par groupe de cinq ou six définis selon le niveau et l'intérêt pour le sujet traité (car nous choisissions nos matières et ce, sur quoi nous souhaitions travailler ce qui permettait aux professeurs de bénéficier d'une classe toujours passionnée et attentive) et étaient assis par terre, le plus souvent dehors. Nos professeur nous inculquaient les bases de l'arithmétique, l'histoire de Bédélia et ses traditions, ou encore la signification cachée des runes anciennes, tout en pratiquant leur magie individuellement (ce qui conduisait parfois à une classe trempée jusqu'aux os qui fixait d'un regard noir l'auteur de leur humidité soudaine).

   Mais ici, on était réparti par groupes d'une quinzaine, filles et garçons mélangés, cloîtrés dans le bâtiment et la professeur écrivait (ou du moins je supposais qu'il s'agissait d'une forme quelconque d'écriture, puisque je ne pouvais en percevoir le sens) sur un mur plat avec quelque chose qui ne ressemblait absolument pas au fusain, seul matériau permettant à Bédélia d'écrire sur du parchemin (vélin de maurulain) avec la plume de saudrie (un volatile écarlate dont les ailes immaculées devaient mesurer deux fois ma taille) et qui, bien évidemment, coûtaient tous deux horriblement cher.

   De plus, l'ensemble des camarades de Mallory me jetait régulièrement des regards, tantôt curieux, tantôt dégoutés par, ce que je supposais être, une faute de goût vestimentaire. Cependant, après la longue période où j'étais demeurée tendue en espérant vainement saisir ce que racontait une professeur d'un autre âge radoter sur la Guerre d'Indépendance, je ne prêtais plus attention ni aux paires d'yeux indiscrets, ni aux paroles monotones et incessantes de l'adulte, toute droit sortie de la période poussiéreuse dont elle parlait. J'avais commencé à ressasser certains souvenirs de mon chez-moi qui, je m'en rendais bien compte, me manquait affreusement.

   J'avais tout d'abord aperçu ton visage rayonnant, Papa. Et puis celui de Maman, pénétrant dans la pièce, supportant une somptueuse pâtisserie dégoulinante de sirop et de crème qui chantait de sa voix cristalline pour souhaiter un bon anniversaire à Aslinn qui venait d'apparaître dans le souvenir, souriant de toutes ses dents inégales et les yeux pétillants de gourmandise. Et puis soudain, surgi de nulle part, Elros me saute sauvagement dessus en riant bruyamment. Qu'est-ce qu'il gigote celui-là ! Et...

   Je fus soudainement stoppée dans ma rêverie par une affreuse constatation. J'avais l'horrible impression qu'ici comme partout dans ce monde là, on ne se préoccupait pas du fait que des milliers d'Elfes, mon peuple se fassent massacrer en ce moment même dans les conditions les plus ignobles qu'il soit. Cela ne les angoissait pas que ce monde, jadis si merveilleux et qui était le mien, coulât dans les méandres atroces de la violence, se consumât inexorablement pour une simple querelle dont l'issue se résumerait à un tas de cadavres fumants dans un bazar morbide et désolant.

   Dans cette classe, personne ne semblait considérer cela avec importance. On  écoutait le cours, on discutait, on riait  comme si de rien n'était.  La salle me paraissait si silencieuse par rapport aux échos de la guerre qui résonnaient dans mes oreilles.

   Le bruit, les visions qui me revenaient étaient atroces mais le pire était les cris. Des cris de douleur, de guerre, de peur, de désespoir, de détresse... Aucune image, juste des hurlements et notre imagination qui brode autour de ces sons une souffrance déchirante. Un système vicieux, malsain... Ces lamentations pénétraient en moi par tous les pores de ma peau.

  Comment ces élèves peuvent-ils en être indifférents ? Je me rends compte aujourd'hui que leur indifférence n'était rien d'autre qu'une pure ignorance, pourtant la nuance est subtile. Et cette candeur m'était cruelle.


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C'est le retour en force des Pingouins !!!!

Après plusieurs mois d'absence, de panne totale, de sèche intense, grâce à l'inspiration subite d'un Écureuil, NOUS REVENONS !!!! Pour le grand plaisir de ceux qui attendaient  (enfin) la suite de notre palpitante histoire elfique !

>>> Nous reviendrons sur quelques passages déjà publiés car ils ne correspondent pas à l'esprit de ce livre (notamment le chapitre "Douleurs et Mémoire" qui changera de titre par la même occasion)

D'ENORMES BISOOOOOOUUUUUUS (et nos plus plates excuses pour notre TERRIBLE retard)

             Le club des Pingouins  :)



DEHORS [projet inachevé]Where stories live. Discover now